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Maroc : Saïd Aouita dresse un bilan alarmant de l'athlétisme marocain qui est à son plus bas niveau

ParVO²

Publié 18/08/2013 à 10:49 GMT+2

De notre partenaire VO²

Maroc : Saïd Aouita dresse un bilan alarmant de l'athlétisme marocain qui est à son plus bas niveau

Crédit: VO²

Dans le centre de presse, une petite cafet exigüe, où l’on se presse pour avaler vite fait une barre chocolatée, un bol de borsch où l’un de ces ragouts à la russe dont l’odeur forte remonte même dans les étages.
A une petite table est assis Saïd Aouita. Il boit un café, seul en attendant Malika Akkaoui qui s’est tristement liquéfiée en demie finale du 1500 mètres. Autour de son cou, une accréditation presse et un petit drapeau américain au dessus de son nom.
Depuis 10 ans déjà, Said Aouita est consultant dans un staff de 25 journalistes et techniciens pour chaîne qatari, Al Jazeera qui est venue chercher les compétences de celui que l’Equipe surnomma en son temps, le « décathlonien du demi fond, capable au plus haut niveau mondial de courir du 800 mètres au 10 000 mètres. Justement, un journaliste s’exprimant en anglais, se penche au dessus de la table : « Monsieur Aouita, vous étiez déjà un Mo Farah en votre temps ». Ce reporter enjoué a raison, les statistiques le prouvent, 115 victoires en 119 courses sur des distances allant du 800 mètres aux 25 tours, le marocain tenta même le pari audacieux aux J.O. de Séoul de remporter l’or sur trois distances, le 800, le 15 et le 5000 m alors qu’il fut médaillé de bronze à Helsinki sur 1500 mètres puis champion olympique en 1984 et champion du monde en 1986 sur 5000 mètres. La manière de courir aussi avec se redoutable finish comparable à l’anglais où bien encore à celui de Kenenisa Bekele.
Said Aouita attend Malika Akkaoui car cette jeune femme veut parler, veut s’épancher tout comme Abdelaati Iguider, médaillé de bronze l’an passé aux J.O. sur 1500 mètres qui lui aussi s’est fait balancer en demie finale. Lui aussi veut vider son sac, son mal au cœur. Il lui avait confié : « Si je cours à Moscou, je vais m’exploser ». Alors ce soir, il sera au micro d’Al Jazeera pour expliquer les raisons de son désarroi. « Il voulait parler, si j’avais refusé, il aurait été sur une autre chaîne, alors on a accepté ».
Plus que des problèmes personnels, c’est la déroute d’une équipe nationale qui une nouvelle fois a sombré corps et âme dans ce Mondial. Histoire d’un naufrage attendu.
L’homme qui partage son temps entre le Texas, son lieu de résidence et le Qatar, pour la saison d’athlétisme, a son franc parlé. Il a toujours été ainsi. A parler haut, à vouloir et exiger beaucoup, à la hauteur de ce qu’il était capable de s’infliger lorsqu’il était athlète. En 1993, il prend déjà les commandes de la direction technique nationale mais il n’arrive pas à imposer sa conception du management d’une équipe nationale et de l’entraînement. Surtout, il veut nettoyer une fédération et un centre national gangrénés par le dopage. Il l’affirme encore comme s’il sortait droit d’un tribunal à répéter sa plaidoirie : « Ils ont préféré le dopage pour arriver vite ».
En 2008, il est à nouveau appelé en urgence au chevet d’une équipe nationale en désarroi. Mais là encore, Saïd Aouita ne peut s’installer dans le temps et faire ses preuves. Il s’exprime : « Moi, je ne suis pas un « Yes Man, Yes Man ». Je connais la route qu’il faut suivre. Pour nettoyer une fédération empoisonnée, il faut du temps. Mais au Maroc, le sport est trop politisé. J’ai demandé « donner moi du temps, ne me juger pas maintenant ». Mais la pression du pouvoir état trop forte. Vous savez le président vient du monde des affaires. Il veut des médailles vite".
Bien entendu, le passage de Saïd Aouita à Rabat ne dura qu’un temps court. Entre frustrations et querelles. Les affaires de dopage se sont multipliées, elles lui ont donné raison (les cas Selsouli, Goumri, Lahlou) et les résultats internationaux se sont enfoncés dans la médiocrité. C’est l’échec de tout un plan de développement. « On s’est concentré sur les installations, sur la détection, c’est bien, mais on a oublié l’élite ». Le Maroc a un genou à terre.
A Moscou, elle a posé le second. Les deux genoux à terre, avec pour constat seulement quatre coureurs en finale (Hamid Ezzine, Siham Hilali, Salima Elouali Alami et Mohamed Moustaoui au départ ce soir sur 1500 mètres) sans même compter un seul finaliste.
Saïd Aouita ne cache pas douleur et sa frustration. Pour lui la recette est simple : « refaire ce que nous faisions de mon temps, du temps du centre Hassan II qui avait été pour et autour du médaillé d’or des J.O. de Los Angeles. Il ajoute : « les américains ne font pas autrement. Ils ont formé des petites structures par distance, ils ont de bons entraîneurs, ils ont un head coach qui contrôle tout, de l’argent aussi et surtout, il se donne du temps pour progresser ».
Pourtant, les jeunes talents sont bien là au Maroc. Ils alimentent et ont même renforcé en masse les équipes de France, du Maroc, d’Italie, de Belgique, de la péninsule arabique, sans oublier ceux qui ont migré vers les Etats Unis. Saïd Aouti avance le nom de Khalid Khannouchi, recordman du monde du marathon avec 2h 05’42 » en 1999 puis 2h 05’38 » en 2002. Il est à ses yeux l’un des grands espoirs perdus par le Maroc. Il en revient à l’exemple de Mo Farah pour conclure : « On a tout au Maroc. On a des physiques comme Mo Farah. On a des jeunes qui ont faim de courir et qu’ils veulent réussir dans la vie ».
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