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Au camp d'Auschwitz, la boxe fut aussi un moyen pour survivre

ParAFP

Publié 24/12/2012 à 06:01 GMT+1

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Eurosport

Crédit: Eurosport

Tadeusz Pietrzykowski, boxeur polonais déporté N° 77 du camp d'Auschwitz-Birkenau, y disputait pour une bouchée de pain des combats de boxe inhumains contre les gardiens allemands. Les derniers témoins se souviennent de cet épisode peu connu de l'histoire de ce camp d'extermination érigé par l'Allemagne nazie en Pologne.
"Le premier match de boxe a eu lieu un dimanche de mars 1941 à côté des cuisines entre Tadeusz Pietrzykowski et le kapo allemand (gardien de camp recruté parmi les détenus de droit commun) Walter Dunning", raconte à l'AFP Tadeusz Sobolewicz, un ancien déporté âgé de 89 ans.
Quelqu'un avait fait courir une rumeur que ce dernier, un boxeur professionnel dans la catégorie poids moyen, cherchait un adversaire digne et offrait en retour un pain et un carré de margarine.
Sans hésiter, Tadeusz Pietrzykowski, poids coq au club de Varsovie Legia, a accepté le défi.
"Teddy, comme l'appelaient les médias polonais d'avant-guerre, devait peser à l'époque 45 kilos et Walter en faisait au moins 70", se souvient Sobolewicz, un ami du boxeur. "Déporté au camp en juin 1940 avec le premier convoi de plus de 700 prisonniers politiques polonais, il était déjà très amaigri après huit mois de travail exténuant et de malnutrition".
"Teddy était plus petit mais très agile et rapide. Il avait une frappe extraordinaire, visait droit dans l'estomac et savait esquiver les coups de l'adversaire", se souvient Sobolewicz. "Il a gagné le combat, a eu son pain et la margarine. Il faut dire que les Allemands tenaient leurs promesses".
Ces combats ressemblaient à des luttes de gladiateurs. Pietrzykowski savait qu'il ne risquait rien, il était de toute manière condamné à mourir de faim. Les SS, eux, voulaient se divertir, surtout à partir des défaites subies sur le front de l'Est contre les Russes après Stalingrad, souligne Sobolewicz.
Avides de combats au plus haut niveau, les SS recherchaient des boxeurs professionnels à l'arrivée des trains parmi les nouveaux déportés tout comme ils sélectionnaient d'autres professions qui leur pouvaient être utiles.
Par ses victoires, Teddy redonnait de l'espoir aux prisonniers.
"La joie était immense. On se disait: tant qu'un Polonais tape sur la gueule d'un Allemand, la Pologne n'est pas encore morte", se souvient-il encore aujourd'hui.
Au début, les matchs se disputaient sur la terre battue, les boxeurs n'avaient pas de gants professionnels. Puis, les Allemands avaient fait construire un vrai ring sur des planches, ils ont procuré des gants de boxeur et les combats avaient lieu en présence d'arbitres professionnels, précise Marta Bogacka dans son livre "Le Boxeur d'Auschwitz", paru récemment aux éditions Demart dans la série des "Histoires invraisemblables".
Les SS assistaient à ces matchs et faisaient même des paris. A Auschwitz, Teddy a mené une quarantaine de combats, et une vingtaine d'autres au camp de Neuengamme (nord de l'Allemagne) où il fut transféré en 1943. Ils opposaient aussi bien les prisonniers aux kapos que les prisonniers entre eux.
Teddy a survécu aux horreurs des camps. Il est mort en 1991 à Bielsko-Biala, dans le sud de la Pologne.
Le plus célèbre de ses combats l'opposa à Schally Hottenach, un boxeur allemand pesant 96 kilos. Teddy fut déclaré vainqueur par un knockout à la deuxième reprise. L'épisode a été porté à l'écran en 1962 par le réalisateur slovaque Peter Solan: "Le boxeur et la mort".
Des matchs de football étaient également organisés à Auschwitz, sur la place d'appel, se souvient Kazimierz Albin, 90 ans, ancien déporté qui a réussi à s'évader en février 1943 et à intégrer la Résistance polonaise.
"Les kapos cherchaient à se divertir. Ils jouaient au foot entre eux, mais disputer un match contre des joueurs d'une autre nationalité était plus excitant", explique-t-il.
"Et pour nous, faire partie d'une équipe de football signifiait des rations alimentaires supplémentaires et l'affectation à un travail moins dur, donc une chance de survie", ajoute-t-il.
Certains matchs se tenaient aux portes mêmes de l'enfer de Birkenau, la partie du camp où dans les chambres à gaz avait lieu l'extermination essentiellement des Juifs européens tués directement à la descente des trains, explique Adam Cyra, un historien du musée d'Auschwitz-Birkenau.
Le terrain de football était situé à proximité du crématorium n°3, au bout de la rampe, sur sa droite.
"Pour les gens qui allaient mourir sous peu, la vue de prisonniers jouant au football contre des kapos, devait être rassurante", dit-il.
mc/ea/mrm/gir
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