L'énigme Gilbert

Simple retard à l'allumage ou vrai problème de préparation ? L'énigme Philippe Gilbert alimente les fantasmes des observateurs du peloton, en particulier la presse belge qui ne l'épargne pas en ce début de saison. Ce n'est pas tant son absence de victoire en 2012 qui préoccupe, même s'il avait déjà enlevé les Strade Bianche et une étape du Tour de l'Algarve l'an dernier à la même époque. Non, ce qui inquiète franchement ce sont ses sorties anonymes voire complètement indigentes. Exemple le plus frappant, le contre-la-montre par équipes de Tirreno Adriatico, une épreuve qu'il a traversée comme une ombre, au cours duquel le champion de Belgique du chrono a été lâché ses coéquipiers après seulement 11 kilomètres pour terminer à 2'44" sur la ligne.

"Quand Evans a pris le relais en tête, il a eu du mal à récupérer de ses efforts. C'était une stratégie de l'équipe de le laisser terminer en roue libre", s'est défendu John Lelangue, le manager de BMC. Selon Het Nieuwsblad, Philippe Gilbert aurait envoyé un SMS à De Wolf, son ancien mentor, en reconnaissant qu'il n'était pas au mieux. "Je suis très mauvais", lui aurait-il écrit. En public, les raisons de sa méforme sont avant tout médicales : des problèmes aux dents puis une fièvre tenace qui l'a contraint à abandonner lors de Tirreno-Adriatico.

Un coureur "trop enveloppé",  incapable d'honorer son nouveau statut, la presse belge et flamande en particulier, s'est très vite retournée contre lui. S'il ne pense pas "être trop gros", Philippe Gilbert reconnaît qu'il est "en retard" dans sa préparation. "Ma forme n'est pas assez bonne. Pas mauvaise, mais moins bonne que l'an dernier", a-t-il confié la semaine dernière.  Avant d'ironiser : "C'est la panique en Belgique, pire que lorsque nous n'avions pas de gouvernement !" "Je ne comprends pas comment on peut faire un tel foin autour d'un non-événement", a renchéri Lelangue dans les colonnes de la Dernière Heure.

Jacky Durand joue la même partition : "Oui, il n'est pas à 100%. Il a passé un hiver difficile, a peut-être un ou deux kilos en trop et ça ne pardonne pas. Mais il n'y a pas de problème Gilbert. On se focalise trop sur sa saison passée mais il reste un coureur de caractère." Reste qu'au départ de Milan-San Remo samedi prochain, Gilbert, troisième l'an passé, ne fera" plus du tout partie des favoris". "Pour gagner, c’est mission impossible",, selon le consultant Eurosport. La Primavera ? L'ogre de 2011 botte en touche. Ses objectifs annoncés sont désormais plus lointains : "Je ne suis pas stressé. La saison est encore très longue", a confié le Wallon au quotidien Het Nieuwsblad. "Mes objectifs sont l'Amstel Gold Race, les classiques ardennaises, le Tour de France, les JO et les championnats du monde à Valkenburg." Gilbert ne cite pas Milan-Sanremo. Simple oubli ? Eclair de lucidité plus sûrement.