Les masques tombent

La suspicion s'est transformée en certitude. Alors que la possibilité de détecter a posteriori l'usage de CERA (EPO de 3e génération) avait alimenté la chronique ces dernières semaines, deux vainqueurs d'étape du Tour de France viennent d'être déclarés positifs. Dans l'après-midi, le Comité National Olympique Italien (CONI) a annoncé par le biais d'un communiqué que Leonardo Piepoli était bien dopé sur le dernier Tour de France. Contrôlé positif le 4 (veille du départ de Brest) et le 15 juillet (journée de repos à Pau), le vétéran italien sera entendu vendredi prochain par le procureur antidopage de l'instance transalpine devant lequel il ne pourra pas nier l'évidence.

En début de soirée, la confirmation de la positivité de Stefan Schumacher est venue de Hans-Michael Holczer, manager de l'équipe Gerolsteiner. "Le directeur du Tour Christian Prudhomme me l'a confirmé, je n'ai aucun doute sur le fait que c'est vrai" , a affirmé Holczer. Un peu plus tôt dans la journée, alors que la rumeur bruissait autour de lui, le double vainqueur d'étape contre-la-montre sur le dernier Tour de France (Cholet et Saint-Amand-Montrond) s'était défendu sans convaincre: "C'est la première fois que j'entends cela. Tout ce que je peux vous dire c'est que je ne me suis pas dopé. C'est n'importe quoi" avait-il déclaré à l'agence sportive allemande SID.

Cette annonce ne surprend qu'à moitié les observateurs. En 2005, Schumacher avait ainsi été contrôlé positif à la cathine avant d'être acquitté. L'an dernier, il avait fêté sa médaille de bronze aux championnats du monde de Stuttgart en finissant dans une clôture, au volant de sa voiture, une soirée où il avait consommé des amphétamines. Holczer, initiateur l'an dernier avec les directeurs sportifs français du mouvement pour un cyclisme crédible se dit anéanti. Il a d'ailleurs annoncé qu'il allait porter l'affaire devant la justice. "Nous avons tous été dupés par cet homme" , a conclu le manager de la Gerolsteiner qui cessera d'exister le 31 décembre prochain.

Piepoli, pour sa part, était sous les feux des projecteurs depuis le dernier Tour de France. Vainqueur au sommet de la montée d'Hautacam, le grimpeur italien et ses coéquipiers n'avaient pas pris le départ de Lavelanet au lendemain du contrôle positif à la CERA de leur leader Riccardo Ricco. Dans la foulée, l'équipe Saunier Duval décidait de licencier ses deux chefs de file. Si pour Ricco la faute était avérée, il n'en était pas de même pour Piepoli, à l'époque pas encore formellement convaincu de dopage et remercié pour "violation du code éthique".

Fin juillet, Piepoli sur lequel pesait de très forts soupçons, était entendu une première fois par le Comité Olympique Italien (CONI) devant lequel il nia fermement s'être dopé. "Je n'ai rien d'important à dire concernant l'audition. J'ai tout nié. J'ai été auditionné en tant que simple témoin. J'ai dit ce que j'avais à dire, rien de plus, rien de moins", avait-il déclaré à sa sortie fort de l'absence de contrôle positif dont il jouissait alors.

Schumacher et Piepoli pris dans les mailles d'un filet qui ne cesse de se resserrer, les révélations pourraient maintenant se succéder dans les jours et semaines à venir. Fort d'un protocole de tests sanguins permettant de révéler l'usage de CERA, l'Agence Française de Lutte contre le Dopage (AFLD) est en effet en train de procéder à des analyses sur les échantillons de coureurs qui présentaient un profil hématologique suspect sur le dernier Tour de France. Les résultats de ces tests devraient tomber très prochainement mais seulement lorsque la culpabilité des coureurs mis en cause serait avérée de manière irréfutable. "Les laboratoires français de Châtenay-Malabry et suisse de Lausanne ont mis au point chacun de leur côté un nouveau système pour découvrir la CERA dans le sang. Nous avons décidé de travailler de manière complémentaire avec Lausanne. Un coureur sera déclaré positif s'il est positif à la fois à Paris et à Lausanne" avait déclaré dimanche le président de l'AFLD Pierre Bodry sur le plateau de l'émission Stade 2. Une trentaine de coureurs douteux, dont certains "premiers rôles" du dernier Tour, sont ciblés. Certains d'entre eux doivent mal dormir...