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Durand : "Ma victoire à Montauban, un sacré bol d’air en pleine affaire Festina"

François-Xavier Rallet

Mis à jour 07/07/2016 à 00:07 GMT+2

TOUR DE FRANCE 2016 – Jacky Durand s'est imposé lors de l'unique arrivée du Tour avant celle de jeudi. C’était en 1998, quelques jours après le début de l’affaire Festina. Ce jour-là, notre consultant, alors chez Casino, avait été plus fort que la chaleur, le vent de face et un certain Andrea Tafi.

Jacky Durand l'emporte à Montauban en 1998

Crédit: Eurosport

La 6e étape du Tour 2016 arrive à Montauban, ce jeudi. La ville de votre 3e et dernière victoire sur le Tour. C’était en 1998, le 19 juillet. Quel souvenir en gardez-vous ?
JACKY DURAND : C’était la canicule ce jour-là. C’est mon premier souvenir de l’étape. Aujourd’hui (jeudi), il risque de faire chaud mais je ne pense qu’on atteindra les chaleurs de 1998. On était parti de Brive, je connaissais bien la région car j’habitais à Limoges à cette époque. Il faisait 40°C à l’ombre. J’ai gagné l’étape grâce à ça d’ailleurs. J’aimais bien quand les conditions étaient extrêmes. Qu’il fasse très froid ou très chaud, ça ne me posait pas de problèmes.
Le peloton roulait très vite en début d’étape. Personne n’avait de bons de sortie. Votre attaque a été la bonne. Et celle-ci est née… en queue de peloton. Racontez-nous…
J.D. : Après 30-40 kilomètres, j’avais épuisé mes deux bidons. Je m’étais dit que c’était le moment d’aller me ravitailler. Je suis donc descendu en premier à la voiture de mon directeur sportif pour prendre des bidons. Je voulais être prêt à attaquer au bon moment. Et c’est ce qui s’est passé : après 75 km, je suis parti quand le paquet a eu envie de faire une pause, de s’hydrater. Avec plusieurs coureurs, on a tenté notre chance. C’était le bon moment.
Vous attaquez et vous vous retrouvez notamment avec Laurent Desbiens (Cofidis), votre ancien équipier chez Castorama pendant trois ans et qui enfilera le maillot jaune à l’arrivée…
J.D. : Je vais être honnête, je ne me rappelle plus qui avait attaqué avec moi. Je me souviens juste qu’on s’était retrouvé dans un groupe de 7, puis de 6. Avec nous, il y avait Philippe Gaumont (Cofidis), qui avait roulé comme une brute pour Desbiens et qui avait lâché prise dans les derniers kilomètres. Il y avait Andrea Tafi (Mapei) forcément. Il en avait fait des caisses, ça lui avait coûté cher d’ailleurs. Il y avait un Finlandais… Joona Laukka (Lotto-Mobistar) ! Et les deux autres ?
Deux Italiens…
J.D. : Eddy Mazzoleni (Saeco) et… (il hésite)
Un coureur de chez Polti…
J.D. : Sacchi ! Fabio Sacchi.
Gaumont lâche dans le final. Et vous vous retrouvez à 6…
J.D. : Voilà. Il ne restait que deux Français, Laurent et moi. On était de la même génération et on s’entendait bien. J’étais content qu’il prenne le maillot jaune. Moi, je voulais l’étape. Mon idée, c’était d’attaquer à 5km de l’arrivée. Mais il y avait un fort vent de face, donc je savais que c’était quasiment impossible de sortir seul.
Et puis, il y avait le fameux Tafi, qui se pensait "invincible" ce jour-là, selon vos dires de l’époque.
J.D. : Il était costaud. Sacchi allait vite au sprint aussi. Tafi était allé chercher tout le monde. Il était impressionnant. Mazzoleni, qui n’avait pas trop roulé, a attaqué sous la flamme rouge et c’est Tafi qui a fait le gros du travail pour revenir sur lui. Je savais qu’il allait faire d’autres erreurs. Lors du sprint, il a attaqué de trop loin. aux 300m. Et j’ai pu le déborder et gagner.
La Coupe du monde de football s’était terminée une semaine plus tôt. Ce jour-là, c’était un peu la France contre l’Italie…
J.D. : Je m’étais méfié d’une possible alliance italo-italienne, c’est vrai. Mais j’ai appris, après l’arrivée, que Tafi et Mazzoleni étaient loin d’être les meilleurs amis du monde. Ça expliquait pourquoi Tafi était allé le chercher à un kilomètre de l’arrivée. Tafi voulait gagner l’étape mais il ne voulait surtout pas la perdre au profit de Mazzoleni.
Quel souvenir gardez-vous des secondes qui ont suivi votre victoire ?
J.D. : J’étais épuisé. Je me suis effondré. Je ne me souviens que de ça. Je cherchais de l’air et à boire.
Vous aviez aussi fait un magnifique dérapage tout en contrôle…
J.D. : (il rit) C’est vrai ? C’est possible. En tout cas, ce n’était pas un wheeling, je ne sais pas les faire (rires).
Vous étiez absent du Tour 1997. Montauban, c’était une belle revanche ?
J.D. : Sincèrement, je ne l’avais pas pris comme ça. C’est vrai que je n’avais pas bien compris pourquoi Vincent Lavenu (son directeur sportif) ne m’avait pas retenu l’année précédente avec Casino. Je marchais bien en juillet, j’aimais bien le Tour. D’ailleurs, en 1998, C’est le seul Tour que j’ai fini dans les 100 premiers (NDLR : 65e). Mais j’avais peu de mérite : le peloton avait perdu pas mal d’acteurs en cours d’épreuve (rires).
1998, c’est évidemment le Tour de l’affaire Festina. Et cette victoire, la seule d’un coureur français cette année-là, c’était un sacré bol d’air pour le cyclisme tricolore, non ?
J.D. : Oh que oui ! 1998, ç’a été le Tour le plus épuisant que j’ai connu. Physiquement déjà, mais le Tour, ça l’est toujours. Mais c’est vrai que depuis le départ, il y avait trois fois plus de journalistes autour de nous, qui nous posaient 300 fois les mêmes questions sur Festina. Chez Casino, on avait aussi eu l’épisode avec Rodolfo Massi (NDLR : arrêté le 29 juillet 1998 et plus connu sous le nom du "pharmacien" pour avoir fourni des drogues au peloton). C’était très pesant. C’était un soulagement de gagner. Une bouffée d’air frais en pleine affaire Festina.
A l’époque, le journal L’Equipe avait conclu son compte-rendu d’étape comme ça : "il fallait bien le sourire du meilleur boute-en-train du peloton pour rendre sa bonne humeur au Tour de France". C’est qui le boute-en-train du peloton aujourd’hui ?
J.D. : Julian Alaphilippe, mais puissance dix. Il prend les étapes comme elles viennent. Il a certainement plus de talent que moi dans la montagne. Il se fait plaisir sur un vélo. Coureur cycliste, c’est un métier, mais ça n’a jamais été une contrainte pour moi. Je n’étais pas le plus professionnel, je roulais aux sensations. Aujourd’hui, tout est planifié. Moi, j’ai eu la chance de gagner le Tour des Flandres en début de carrière. Personne ne m’a jamais interdit d’attaquer ensuite (rires)…
Enfin, votre favori pour cette 6e étape ?
J.D. : Un sprinter. C’est une des dernières occasions avant Montpellier. Après, qui ? Je ne sais pas… Allez, Peter Sagan. Il a fait une petite journée ce mercredi. Il a gardé des forces.
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