Bardet audacieux, Bardet frustré, Bardet ambitieux

Entre un gros coup et une immense frustration, il n'y a parfois pas grand-chose. A peine deux kilomètres. Soit ce qui a manqué à Romain Bardet pour remporter l'étape et fondre sur Chris Froome au classement général. Bonifications comprises, le Français aurait pu espérer grappiller entre 15 et 30 secondes. Mais non. A l'arrivée, le groupe maillot jaune a fondu sur lui pour le gober à quelques encablures de l'arrivée. Et c'est Froome, deuxième derrière Rigoberto Uran et Warren Barguil mais juste devant lui, qui lui prend quatre secondes supplémentaires.

Romain Bardet l'avait donc mauvaise à Chambéry. "Ce soir, j'ai beaucoup de regrets", a-t-il admis. Tant d'efforts pour aucun gain, et même une perte, certes minimale. Son offensive dans la descente du mont du Chat, l'Auvergnat l'avait pourtant anticipée. Le coup était prévu. "J'attendais beaucoup de cette descente", a-t-il expliqué. Ses qualités dans l'exercice sont connues de tous, et en bas du Chat, Bardet a porté son avance jusqu'à une petite trentaine de secondes. Ah, si l'arrivée avait été jugée au pied de la descente, et non dix kilomètres plus loin dans Chambéry...

La portion finale de plat a condamné la tentative du leader de l'équipe AG2R La Mondiale. Après avoir repris puis dépassé Warren Barguil à la faveur d'un petit raidillon, il s'est retrouvé à un contre cinq. Une lutte disproportionnée. "Il ne m'a pas manqué grand-chose, peste-t-il. Il y avait un peu trop de vent de face dans le final. C'est dommage. Mais je ne pouvais pas attendre Warren, même si c'est facile de dire le contraire après coup. Il était fatigué et moi, je devais jouer mon va-tout dans la bosse avant le plat final. Je n'avais pas le choix."

On le sent quand même très frustré, voire un peu abattu, ce que traduit le lapsus suivant : "Ce qui est décourageant", commence-t-il, avant de corriger, "ce qui est décevant, c'est de passer si près de la victoire d'étape." Même après avoir été repris par le mini-groupe Froome, Romain Bardet y a pourtant cru jusqu'au bout. Mais dans le sprint, il a donc dû se contenter de la pire place, la quatrième, celle qui n'offre ni bouquet ni compensation chronométrique. "Même dans la dernière ligne droite, je ne suis pas loin, j'avais à peu près récupéré, mais j'ai une vitesse qui saute au moment où je lance mon sprint", regrette-t-il.

Malgré tout, si le résultat n'est pas à la hauteur de ses attentes et de ses espérances, le bilan n'en reste pas moins prometteur, comme il l'a rappelé. "Je suis content de mes sensations et je suis quand même sur le podium virtuel du Tour, ce n'est pas si mal", a rappelé le natif de Brioude, également satisfait de la performance collective des AG2R. "C'était une belle journée de vélo et de notre côté, on a mené la course comme on l'avait prévu, on a pris nos responsabilités et je sens que le groupe est prêt, il est fort", témoigne-t-il encore.

Du chrono de Düsseldorf à la baston jurassienne, Bardet a pour l'instant répondu présent dans cette première partie de Tour. "Vous en doutiez?, sourit-il. Moi pas. J'ai axé toute ma saison sur le Tour de France, je sais que c'est le moment important, là où tout se joue, et puis j'avais à cœur de répondre présent et confirmer ce qui s'est passé l'an dernier". Il est en train de le faire même si, comme il le martèle, "il reste beaucoup de chemin sur ce Tour." Et le dauphin de Froome en 2016 de promettre encore "de belles batailles dans les Pyrénées et les Alpes."