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Ils courent, ils courent… mais après quoi ?

Benoît Vittek

Publié 29/06/2017 à 13:27 GMT+2

TOUR DE FRANCE - Les 198 coureurs du peloton de la Grande Boucle s’apprêtent à attaquer trois semaines éreintantes. À l’horizon, la gloire et l’argent, peut-être, le dépassement de soi, très certainement.

Tour France

Crédit: Getty Images

Le sport de haut niveau peut offrir un spectacle incompréhensible à ces êtres imperméables au miracle sans cesse renouvelé d’athlètes touchant la perfection dans l’exécution d’un geste, l’improvisation d’une parade, le tutoiement de ses limites personnelles. Le football est facilement ramené à 22 mecs qui tapent dans le même ballon (et sont trop grassement payés pour le faire). Le tennis ? Cette fois, ils ne sont plus que deux “mecs”, toujours à taper dans une balle, se la renvoyer sans cesse, sans objectif constructif.
Et le cyclisme ? C’est peut-être encore pire. Voilà 200 paires de roues mues à la force du jarret pour couvrir des distances artificiellement tracées par des organisateurs sadiques, décidés à faire escalader des cols monstrueux pour que les coureurs les redescendent mieux ensuite. Et en plus ces coureurs sont tous amoraux et s’injectent n’importe quoi dans le corps, c’est bien connu, regardez Lance Armstrong et André Cardoso.
Cette semaine, le peloton du Tour de France prend donc la direction de Düsseldorf, prêt à s’afficher sous les feux de la rampe du contre-la-montre qui lancera la 104e édition du Tour de France. Dans quelle galère viennent-ils s’embarquer ? Pendant trois semaines (pour les plus résistants), ils passeront dans une machine à laver physique et émotionnelle. Et tous se réjouissent de cette perspective.

Amour ? Haine ? Les deux

Venus de tous horizons, les coureurs du Tour seront sous pression, la plupart du temps loin de leurs terres et de leurs proches, parfois poursuivis par les accusations de ceux persuadés que les cyclistes sont les plus grands tricheurs du sport. Ils toucheront leurs limites, éreintés au point peut-être de vouloir imiter Octave Lapize au sommet du Tourmalet en 1910 : “Vous êtes des assassins”, avait lancé aux organisateurs le futur vainqueur de l’épreuve après une étape de plus de 300 kilomètres par delà Peyresourde, l’Aspin, le Tourmalet et l’Aubisque.
Un siècle plus tard, le Tour a eu le temps de réviser de fond en comble toutes ses composantes. La légende est restée, la relation “amour-haine” entre l’épreuve et ses coureurs aussi, pour reprendre le mot de Tony Martin en 2013. “Enfin, pour être honnête, en ce moment il y a surtout de la haine”, avait ajouté la bête à rouler, déjà contrainte à l’abandon l’année précédente, et sérieusement amochée après une chute dès les premiers tours de roues en Corse. L’Allemand a surmonté sa douleur, sublimé sa haine pour aller chercher une victoire d’étape de prestige une semaine plus tard lors du contre-la-montre du Mont-Saint-Michel.
Le Tour, c’est l’espoir de lendemains qui chantent, même s’ils offrent plus certainement la perspective de nouvelles souffrances. “À demain”, soufflait l’année dernière Dan McLay au chauffeur de la voiture-balai, tout juste capable de s’amuser de sa blague après une journée de galère loin derrière le peloton. Le jeune sprinteur britannique n’a pas accroché la victoire après laquelle il courait mais a démontré une résilience qui se suffit à elle-même.

Argent, gloire et lanterne rouge

Beaucoup plus prosaïquement, le Tour, c’est de l’argent. Le coureur cycliste, s’il a vu ses émoluments exploser depuis la révolution qui a fait de Greg Lemond un millionnaire, reste précaire sur de nombreux aspects (carrière et contrats courts, à des niveaux extrêmement fluctuants en fonction des performances récentes du coureur). Réussir son Tour, en tête d’affiche ou loin des caméras, est un gage solide en vue des saisons prochaines. C’est aussi une garantie à plus court terme : les coureurs se partagent 2,3 millions d’euros de dotation, dont un demi-million pour le vainqueur du classement général. Si elles récompensent essentiellement les tout premiers avec un système de répartition particulièrement dégressif, les primes sont ensuite réparties au sein de l’équipe, à parts égales selon la règle officieuse que les leaders sont bien inspirés de suivre.
Le Tour, enfin, c’est le rêve de gloire, pour les cadors comme les porteurs de bidons. Froome, Sagan, Bardet, Quintana ou Cavendish, les stars du peloton sont prêtes à écrire quelques lignes d'histoire. Leur année entière tourne autour de cet événement. Nous ne manquerons pas de vous relater leurs exploits et leurs défaillances. Et nous chanterons également les louanges ou narrerons les malheurs de coureurs peut-être moins talentueux mais suffisamment doués pour se faire une place sur la plus grande scène, à leur manière.
Pour sa dernière participation à la course de sa vie, Thomas Voeckler nous réserve forcément un de ces numéros qui ont fait sa propre légende. Aligné sur un 18e Grand Tour d’affilée, Adam Hansen a trouvé sa façon de faire l’événement. Dans le premier numéro de Bahamontes, nouveau-né parmi les revues cyclistes, Jimmy Casper en décrit une autre. En 2006, il livre un drôle de duel à l'arrière de la course avec Wim Vansevenant pour la place de lanterne rouge : "Il y avait un petit jeu entre nous. Sur la dernière journée, j'avais le désavantage d'avoir quelque chose à jouer sur le dernier sprint. Lui a roulé toute la journée et s'est relevé à quatre kilomètres de l'arrivée." Allez expliquer ça à quelqu'un qui n'a jamais compris la grandeur du cyclisme...
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