Jura, échappés, Français : Les 6 choses à retenir de la première semaine du Tour de France

Dans leur volonté de traverser les cinq grands massifs montagneux de l'Hexagone, les organisateurs du Tour de France ont laissé aux sprinteurs plusieurs occasions de s'exprimer durant la première semaine. Et si les derniers kilomètres ont été l'occasion d'âpres batailles, il faut bien avouer que le temps a semblé long le reste des étapes. Mais c'était avant que le peloton n'entre dans le Jura le week-end dernier.

Peu habitués du tracé de la Grande Boucle, les monts jurassiens ont offert un superbe spectacle tant aux spectateurs qu'aux coureurs, qui redoutaient particulièrement l'étape entre Nantua et Chambéry, dimanche. Et ils avaient raison. Le 9 juillet 2017 semble déjà destiné à rentrer dans la légende de l'épreuve. L'étape des Rousses, samedi, avait déjà été disputée sur un rythme échevelé pour se terminer par une très belle victoire de Lilian Calmejane au panache. Les Rousses, comme le Mont du Chat, ont bien des atouts pour devenir des cols majeurs du Tour dans les années futures.

Les neuf premières étapes n'ont pas manqué de moments forts. En revanche, pour le suspense, c'est autre chose. Les classements se sont déjà bien décantés, la faute en grande partie aux abandons. Pour le maillot jaune, Christopher Froome est déjà en situation idéale avec le commandement de la course et un écrémage déjà sérieux de ses concurrents. Il ne reste plus que trois coureurs dans la même minute que le tenant du titre : Fabio Aru, Romain Bardet et Rigoberto Uran. Au même stade l'an passé, ils étaient onze en 61 secondes. Quintana est déjà à plus de deux minutes, et est esseulé après l’abandon de Valverde dès la première étape. Richie Porte et Rafal Majka ont eux dû quitter la course après être tombés dans la redoutable étape entre Nantua et Chambéry. Et Froome y a aussi perdu son bras droit et principal rempart, Geraint Thomas. Un autre candidat potentiel au Top 5.

Le topo est presque identique pour le maillot vert. Peter Sagan mis hors course, Mark Cavendish blessé et Arnaud Démare arrivé hors délais, les prétendants se réduisent comme peau de chagrin. Marcel Kittel n'a plus guère que Michael Matthews et André Greipel pour le concurrencer. Chez les jeunes, même sans coups du sort, Simon Yates est dans un fauteuil pour le maillot blanc, avec Louis Meintjes déjà à près de trois minutes. Seul le maillot à pois reste presque entièrement à jouer. Enfin, sauf incident évidemment, la cruelle magie du Tour oblige.

A première vue, le cyclisme tricolore peut déjà se réjouir de ce Tour 2017 avec déjà deux victoires d'étape (Arnaud Démare à Vittel, Lilian Calmejane à la station des Rousses), quand l'édition 2016 avait vu le seul Romain Bardet les bras levés en fin d'étape, et en troisième semaine. Ajoutez à cela le maillot vert porté trois jours par le sprinteur de la FDJ, le podium provisoire de Bardet ou encore le maillot à pois de Warren Barguil, et vous obtenez une première semaine a priori réussie.

Mais il y a aussi le revers de la médaille. Car Démare, vraie chance pour le classement par points, n'a pas résisté au deux premières vraies étapes de montagne. Son compère sprinteur Nacer Bouhanni passe lui à côté de son sujet jusqu’ici. Venus sur le Tour pour chasser les étapes, Pierre Rolland et surtout Thibaut Pinot sont pour le moment loin du compte. Il y a de quoi se réjouir mais tout n'est pas non plus rose dans le camp français.

Les choix de Jean-René Bernaudeau n'avaient pas manqué de soulever critiques et interrogations. La non-sélection de Bryan Coquard, le sprinteur de l'équipe Direct Energie, posait question sur la stratégie de la formation vendéenne sur cette Grande Boucle. La victoire du prometteur Lilian Calmejane à la Station des Rousses a été une éclatante réponse. Privilégier les échappées au long cours pleine d'audace au caractère imprévisible d'une arrivée massive était un coup de poker. Il est brillamment réussi.

La FDJ pensait elle aussi avoir pris la bonne direction en donnant les clés de la maison à Arnaud Démare, tout en laissant à Thibaut Pinot le temps de se refaire une santé après un Giro éprouvant. Marc Madiot a eu raison sept jours durant. Car Démare a prouvé qu'il avait désormais les armes et la confiance pour jouer les victoires au sprint et le maillot vert. Malheureusement pour l'équipe au trèfle, la grosse défaillance du Nordiste a plombé ses ambitions pour le reste du Tour et a amputé le groupe de presque la moitié de ses membres. Mettre presque tous ses œufs dans le même panier a certes payé un temps, mais le prix à payer reste lourd.

Jouer des coudes et frotter fait partie du quotidien d'un sprinteur. Mais cette année, les arrivées massives ont ajouté un surplus d'électricité à cette joyeuse partie de manivelle. L'exclusion de Peter Sagan à Vittel, après un coup de coude qui a entraîné Mark Cavendish vers la chute et l'abandon, en a été le paroxysme. Le Slovaque visait son sixième maillot vert consécutif sur les Champs. Il ne l'aura finalement pas porté une seule journée.

L'incident entre le Slovaque et le Britannique a été un des nombreux qui ont émaillé les sprints de cette première semaine. Arnaud Démare et Nacer Bouhanni n'ont pas manqué d'ajouter un peu d'huile à leur rivalité déjà brûlante. A Troyes, Démare est aussi passé tout proche de la catastrophe le long des barrières. Sans irrégularité, la victoire de Kittel pour quelques millimètres à Nuits-Saint-Georges a aussi montré à quel point les arrivées groupées étaient frémissantes cette année. Remporter un sprint sur ce Tour est bien une affaire de costauds.

Lilan Calmejane est le petit veinard de ce début de Tour 2017. Il est jusqu'ici le seul à avoir vérifié l'adage "la chance sourit aux audacieux". Avec les étapes promises aux sprinteurs, le peloton ne laisse pas pour l'instant sa chance aux échappées. Car hormis la victoire en solitaire du coureur Direct Energie, les bons de sortie accordés sont pour le moment distribués à la condition de ne prendre qu'un écart réduit.

Que ce soient les équipes de sprinteurs ou la Sky, à la planche pour le général, les équipes menant le gros des troupes n'ont que peu laissé partir les fuyards au-delà de trois-quatre minutes maximum, que les échappées soient constituées d'un seul homme comme d'une quarantaine de coureurs. Voir les étapes contrôlées n'a rien d'anormal mais pas à de telles mesures. Bien trop court en tout cas pour espérer frapper un grand coup et assez désespérant tant pour les coureurs téméraires, que pour les téléspectateurs. Ceci étant dit, comme souvent, les deuxième et troisième semaines devraient être un peu plus propices aux échappées au long cours.