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Peter Sagan est une formidable raison d'aimer le vélo

Benoît Vittek

Mis à jour 30/03/2017 à 18:37 GMT+2

Surprenant, drôle, charismatique… Peter Sagan (Bora - Hansgrohe) jouit d'une aura qui dépasse ses exploits sportifs. En quête d'un nouveau Monument sur le Tour des Flandres ce dimanche, le Slovaque est la star dont son sport avait bien besoin.

Peter Sagan - Milan - Sanremo 2017

Crédit: AFP

Dans le cyclisme de Peter Sagan, le spectacle prendrait le pas sur les résultats. Le conditionnel est de mise : le double champion du monde présente un palmarès plus impressionnant encore que la liste de ces courses où la victoire lui serait peut-être revenue s'il avait mieux exploité sa domination physique. Mais en plus de gagner, le Slovaque revendique lui-même ce goût du spectacle, comme à l'issue d'un Milan - San Remo qu'il a rendu ébouriffant.
Deuxième, je me suis habitué. (…) L'important, ce n'est pas le résultat mais de faire le spectacle pour le public qui est venu voir la course.
Alors autant s'incliner. Et célébrer l'homme qui a choisi de redynamiser nos après-midis cyclistes. Sur les classiques ou les Grands Tours, au sprint, sur les pavés ou en montagne, Peter Sagan est un animateur à nul autre pareil dans le peloton. Sur la Classicisima, il a fait exploser les idées préconçues. Le dernier Tour des Flandres en a fait un flahute accompli. Pendant le Tour de France, Saganator dicte la course sur à peu près tous les terrains. Et Mark Cavendish, pourtant capable d'analyser centimètre de bitume par centimètre de bitume chaque sprint qu'il a disputé, cherche encore à comprendre comment le dernier titre mondial lui a été soufflé.
La folle arrivée de Milan-Sanremo : Peter Sagan, Michal Kwiatkowski et Julian Alaphilippe

Mieux que Contador ou les Sky, "Saganator"

Mais mieux encore, le Slovaque est la star dont le vélo avait besoin pour écrire une nouvelle page. L'ère Armstrong, prolongée par le retour à la compétition et la chute de l'ex-Boss, est bien finie, de nouveaux visages peuvent incarner le cyclisme. Peter Sagan est le meilleur candidat. Alberto Contador a bien le parcours, le panache et les succès pour séduire ; mais il reste associé aux affaires de dopage. Pendant que les Sky crispent, Sagan dégage une légèreté qui fait également pardonner ses rares écarts (comme cette main aux fesses d'une hôtesse sur le podium du Tour des Flandres 2013).
Avec ce mélange de talent incandescent et de personnalité enthousiasmante, Peter Sagan a trouvé la recette. Ses débuts professionnels le montraient déjà. En 2010, pour sa première course professionnelle, il croise la route de Lance Armstrong au Tour Down Under. À l'aube de ses 20 ans, "Peto" impressionne. Et devient le protagoniste d'une anecdote racontée il y a quelques étés dans les colonnes de Pédale et qui m'a également été rapportée depuis : mis au défi de tenir la roue d'Armstrong dans l'étape-reine, Sagan voit un groupe de costauds (Evans, Valverde, LL Sanchez…) partir sans l'Américain. Sa voix interroge à la radio : "Je peux y aller ou je dois rester avec Armstrong ?"
Sept ans plus tard, son compteur affiche 92 victoires professionnelles et celui d'Armstrong zéro Tour de France. Stratosphérique, Sagan est prêt à piétiner le nombre record de maillots verts d'Erik Zabel sur la Grande Boucle (6 pour l'Allemand, 5 en autant de participations pour le Slovaque). Et, à 27 ans, il a tout le temps d'allonger dans des proportions indécentes la liste de ses accomplissements.
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Peter Sagan et Chris Froome sur le podium du Criterium de Saitama le 29 octobre 2016

Crédit: AFP

Un excellent client devant les caméras

Ça, c'est pour ce que Sagan fait en course. On pourrait continuer longtemps mais le Ronde, où il vient éprouver son statut de Lion des Flandres dimanche, devrait nous offrir une nouvelle occasion de lui tresser des lauriers. Resserrons un peu la focale sur ce regard à la malice revendiquée. Aussi important que le coureur, il y a le personnage, avec son caractère, qui parvient à éviter deux écueils : en faire trop dans un rôle qui le dépasserait, ou au contraire devenir lisse.
Devant les caméras, Peter Sagan montre ce qu'il veut. Parfois légèrement tête de con, un peu bête de foire en d'autres occasions, excellent client la plupart du temps. Quand il explique à une équipe de télévision chinoise que ce sont ses "big balls" qui font sa force en course, il participe à sa manière à la promotion globale de son sport. Comme lorsqu'il signe des autographes sur la poitrine de supportrices conquises par sa crinière blonde. On ne paraphe pas un contrat à cinq millions d'euros par an sans faire dans le dépassement de fonction.
Peto prenait des cours de théâtre. Il voulait toujours amuser la galerie.
L'exercice imposé (et répétitif, surtout pour un champion omniprésent comme lui) des conférences de presse et autres zones mixtes ne le convainc certes pas toujours. Heureusement, il y a toutes ces vidéos où il peut se libérer. Son interprétation de "Grease", déguisé au côté de sa compagne, est un classique. Récemment, il est passé en cuisine pour les besoins du sponsor principal de son équipe Bora - Hansgrohe
L'été dernier, il penchait plutôt vers un Sylvester Stallone à chapka.
Avec beaucoup de second degré, Peter Sagan est devenu une sorte d'empereur du cool, tendance kitsch. Les petites vidéos légères qu'il met régulièrement en ligne sont toujours l'occasion de sourire, en plus d'admirer sa dextérité sur un vélo ou d'apprécier son rapport au public. Le "champion de bicyclette" a eu les honneurs d'un article dans le célèbre magazine de grosses cylindrés Hot Rod pour sa reprise d'une Dodge Charger 1970. Même en course, ses célébrations, façon Hulk ou Bolt, en dansant comme un poulet ou en faisant une roue arrière, ajoutent à son panache.
"Peto prenait des cours de théâtre. Il voulait toujours être au centre de l'attention et amuser la galerie", explique son frère Juraj dans un reportage de Stade 2 où l'on entend résonner le rire de crécelle de la star de la famille. "Je ne fais pas ça pour être un showman, tempère Peter. Je fais ce qui m'amuse, c'est spontané." On le croit et on espère qu'il s'amusera encore longtemps. Pour son bonheur, pour le nôtre, et pour le plus grand bien du cyclisme.
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