2010, année polémique

Lionel Messi est un excellent Ballon d'Or. Excellent. Pour le palmarès et pour le football, je ne sais pas, mais pour la vitalité de ce rendez-vous annuel, c'est parfait. Un Ballon d'Or qui divise, il n'y a rien de mieux pour lustrer le prestige du trophée, la curiosité qu'il suscite, la passion qu'il déchaîne. Quand la FIFA a racheté le label Ballon d'Or à France Football, l'objet n'était pas surjouer la polémique et de lancer un grand débat doctrinal. Mais c'est exactement le genre de feuilleton sur lequel prospère le trophée. Lorsqu'une star absolue écrase la concurrence, on s'ennuie un peu non ? Tout le monde se réunit autour du génie pour relever combien il était génial, mais cela manque de sel. Une vraie bonne édition de Ballon d'Or, c'est comme une Palme d'Or à Cannes: rien ne justifie plus son existence que le suspense qui l'escorte et la flamme débordante avec laquelle il sera contesté. Pour le reste, cette recherche permanente d'un "vrai" critère qui "doit" désigner "LE" vrai Ballon d'Or a quelque chose de puéril. Comme dans les grandes compétitions, il y a des crus, qui font une part plus ou moins importante à tel ou tel critère, selon le contexte, l'air du temps, la sensibilité du jury, impossibles à figer. Et voici comment, quand l'Italie gagne la Coupe du monde, Fabio Cannavaro est élu. Voici comment, quand il s'agit de l'Espagne, des footballeurs comme Xavi et Iniesta restent à quai. Il reste quand même un malaise après ce feuilleton de plusieurs semaines: quand elle a désigné les trois finalistes, la FIFA savait que Messi avait gagné. Il n'y avait pas de deuxième tour, de "finale à trois", comme une certaine ambiguïté le laissait penser. Les trois stars planétaires se sont laissé mener par le bout du nez pendant cinq semaines autour du show Ballon d'Or. La même comédie avec Zlatan, Cristiano Ronaldo et Tevez, trois personnalités plus brutes, pourrait susciter au bien beau scandale. (Cédric ROUQUETTE)

Ancien ou moderne ? Les deux mon capitaine ! J’estime que l’ancien système d’élection du Ballon d’Or était suffisamment moderne pour perdurer. La tradition tacite qui consistait à récompenser tous les quatre ans un joueur qui a brillé durant la Coupe du monde n’était pas pour me déplaire. Voilà pourquoi j’aurais récompensé Iniesta. Si Lionel Messi est le meilleur footballeur, l’homme de l’année, c’est Iniesta. Comme Zidane l’a été en 1998. Pour moi, le Mondial est LE juge de paix. D’ailleurs, soit dit en passant, il m’étonnerait que Xavi et Iniesta échangent leur titre conquis en Afrique du Sud contre un, deux ou trois Ballons d’Or. Avec ce nouveau scrutin, désormais ouvert à 416 hommes de terrain (dont la FIFA ne connait pas tous les noms...), le palmarès du Ballon d'Or risque de devenir monotone et récompenser régulièrement les joueurs qui bénéficieront, en plus de leur talent énorme, de la plus grande surface médiatique. Cristiano Ronaldo et Lionel Messi ont de belles années devant eux. (Maxime DUPUIS)

Compte tenu du changement du règlement, il me parait logique de voir Lionel Messi remporter le Ballon d'Or. Ce qui l'est moins, c'est l'attitude des médias, notamment en Espagne où ils sont particulièrement bien placés pour constater que l'Argentin du Barça a été la meilleure individualité l'an passé. Avec 62 buts et 20 passes décisives en 2010, "Leo" a signé une année exceptionnelle d'un point de vue statistique. Aucun autre joueur au monde n'a été impliqué directement sur 82 buts de son équipe. A titre de comparaison, Cristiano Ronaldo, majoritairement cité avec Messi en tant que meilleur joueur du monde à l'heure actuelle, a dû "se contenter" de 48 buts et 14 passes décisives en 2010. Avec les nouveaux critères, surtout la part moindre voire nulle accordée désormais au palmarès, ces chiffres justifient quasiment à eux seuls le sacre de Messi, dont on loue surtout les qualités techniques exceptionnelles et les coups de génie qui font vibrer les amateurs de foot. Le trophée, dans sa nouvelle version, fait encore davantage la part belle à l'individualité, ce qui a vraisemblablement desservi des joueurs comme Andres Iniesta, Xavi ou Wesley Sneijder, dont la fonction première est d'abord de servir les autres. On peut y voir les prémices d'une dérive : pour ceux qui ne sont pas attaquants, cela va devenir encore plus compliqué de remporter la récompense. Mais cette tendance existait déjà avec les anciens critères d'attribution du Ballon d'Or. (Vincent BREGEVIN)

Nous avons titré : 'C'est une injustice en or, Messi attrape le Ballon'. Nous défendons l'idée que Xavi et Iniesta ont montré autant de talent que Messi l'année dernière, qu'ils ont tous les trois remporté le même titre, mais qu'en plus Xavi et Iniesta ont remporté la Coupe du monde alors que Messi n'a pas brillé dans ce qui était, quand même, le tournoi-clef de l'année. Ajoutons que traditionnellement, le Ballon d'Or a été donné à des joueurs qui ont réussi leur année grâce à la Coupe du monde, et ce n'est pas le cas pour la première fois. Messi est de loin le meilleur joueur du monde, aucun doute là-dessus, mais 2010 n'était pas sa meilleure année. Xavi et Iniesta méritaient le Ballon d'Or plus que tous les autres. (Ignacio RUIZ, Eurosport.es)

Lionel Messi a surgi pour s'emparer du Ballon d'Or devant ses deux coéquipiers du FC Barcelone, qui étaient favoris pour le remporter. Cette décision a beaucoup surpris, même à Zurich. Mais s'il existe un homme qui a approuvé cette décision, c'est Josep Guardiola, qui a lui-même vu le trophée de coach de l'année lui filer entre les doigts. Les deux Espagnols ont gagné la Coupe du monde ? Messi reste quand même le meilleur joueur du monde, et le plus talentueux de sa génération. Cristiano Ronaldo peut faire le beau chaque semaine et avoir les abdos les plus reluisants du monde du football, le paon portugais n'a pas une pointure suffisante pour enfiler les chaussures de Messi. Et si la récompense née de la fusion entre le joueur FIFA de l'année et le Ballon d'Or était allée à Iniesta ou à Xavi ? Les deux joueurs ont réussi le tour de force d'être individuellement brillants, et de faire partie de cette sensationnelle équipe d'Espagne qui a vaincu tous ses opposants en Afrique du Sud, avec la bienveillance de Paul Le Poulpe... Mais cela ne les rend en aucun cas meilleur que Messi. L'Argentin est un cran au-dessus de ses coéquipiers du Barça. Et si les succès du club catalan se traduisaient dans le langage des affaires, Messi recevrait 51% des parts de chaque victoire parce qu'il possède l'unique et irremplaçable génie qui permet de réaliser l'opération. (Blog Early Doors, Eurosport.co.uk)