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Bundesliga - Liga : l'improbable comparaison

Eurosport
ParEurosport

Publié 23/04/2013 à 00:26 GMT+2

Uli Hoeness, le patron du Bayern Munich, s'alarme de voir la Bundesliga ressembler à la Liga avec l'ultra-domination de deux clubs. Un raccourci que démonte notre blogueur Polo.

Frank Ribery y Leo Messi Bayern Barcelona

Crédit: Eurosport

Uli Hoeness a profité du tirage au sort des demi-finales de la Ligue des champions pour lancer un pavé dans la mare. Le président du conseil de surveillance du Bayern Munich a réclamé une table ronde afin d’éviter le risque encouru, selon lui, par le championnat allemand : celui d’une domination écrasante du BVB Dortmund et du FC Bayern, comparable à celle des deux ogres espagnols, le Barça et le Real Madrid, en Liga. Les réactions n’ont pas manqué. Ouvrons le débat. Rassurons tout d’abord les petits porteurs, la Bundesliga affiche une belle santé économique. Pas de cas "Malaga" par exemple, et pas d’enquêtes ouvertes par l’Union européenne sur le financement public du Real Madrid ou du FC Valence. Notre sujet, ici, est purement sportif : la Bundesliga est-elle menacée d'une distorsion de concurrence entre deux gros clubs et le reste du monde ?
Hoeness : "Sur la durée, un championnat doit être attractif"
La Bundesliga et surtout son équilibre sportif sont-ils en danger ? Tel est le message d’alerte que vient d’adresser le président du Bayern, Uli Hoeness, à ses homologues. Il s’appuie évidemment sur le parcours historique et magnifique du club munichois cette saison : 81 points après seulement 30 journées. Le FC Bayern égale le record, avant de le pulvériser bientôt, du Borussia Dortmund datant… de l’année dernière seulement. Déjà en 2011, le BVB avait remporté le Meisterschale avec 75 points, un très gros score pour un championnat à 18 équipes. Les Bubis (garnements) de Jürgen Klopp avaient été élus troisième plus grande équipe de l’histoire de la Bundesliga derrière le Bayern Munich 1972 et le Borussia Mönchengladbach 1970. Une sacrée référence.
Il n'en faut pas plus à Hoeness pour craindre une absence de concurrence à moyen et long terme, la disparition de champions comme le Werder Brême en 2004, le VfB Stuttgart en 2007 ou le VfL Wolfsburg en 2009. Soit cinq vainqueurs différents lors de la dernière décennie. En Liga espagnole, ils sont seulement trois. Et encore, le titre des Valencians date de 2004. La Corogne et son unique trophée national, ça remonte à 2000. Avant ? La France de Platoche remportait l’Euro, tiens donc, justement contre l’Espagne en finale. C’était en 1984… Une éternité. L’Athletic Bilbao dominait alors "nationalement" pour la seconde fois consécutive, succédant aussi au doublé de la Real Sociedad. Inimaginable dans la Liga contemporaine.
Comparaison bien entendu n’est pas raison et si l’on peut concevoir la vision de Hoeness, il faut cependant la relativiser.
Klopp : "J’anticipe plutôt une situation à l’écossaise"
C’est la grande mode : les paris ! D’ailleurs, à ce sujet, quel est le championnat d’Europe qui délivre le plus de "surprises" ? Bien sûr la Bundesliga devant la Premier League. Ce qui est, de mon point de vue, une nouvelle preuve de la densité des équipes. La Buli est tout simplement  le cauchemar des parieurs. C’est surtout le justificatif d’un des leitmotiv les plus communément répétés par l’ensemble des responsables de la Bundesliga, joueurs, entraîneurs, dirigeants, … : "Tout le monde peut battre tout le monde !" Sauf qu’à la fin, depuis l'existence de la Bundesliga (dont nous raconterons un jour l'origine), il n’en reste qu’un et c’est le FC Bayern. D’où la riposte du coach du Borussia Dortmund : "J’anticipe plutôt une situation à l’écossaise avec une seule équipe qui domine. L’année prochaine, on regardera tous l’effectif du Bayern et là on s’écriera : Oups !!! C’est pour cela que je ne suis pas d’accord avec la déclaration d’Uli Hoeness".
Sauf que l’analyse de Klopp est tronquée. N’oublions pas qu’il défend la vision de son club avant tout. Il omet que la Bundesliga livre le Meisterschale, une fois sur deux, lors de l’ultime journée de championnat. La dernière fois, ce fut "mathématiquement" en 2010. Comme en 2009, 2007, 2002, 2001, 2000, 1998, 1995, 1994 pour ne prendre que les vingt derniers exercices. Quel championnat peut s’enorgueillir d’un tel finish en Europe, hormis la Bundesliga ?
Tönnies : "Nous sommes au même niveau que Dortmund"
Evidemment le meilleur ennemi du Borussia ne pouvait pas rester insensible à la déclaration du "big boss" du club munichois. Et, quelque part, la petite phrase du président de Schalke 04 n’est pas complètement fausse. Puisqu’il a remporté la double confrontation cette année, par exemple. Elle n’est pas à 100% exacte non plus, car le palmarès penche très clairement du coté des Schwarz-gelben. Clemens Tönnies nous alerte plutôt sur le fait que le club de Gelsenkirchen a une puissance économique similaire à celle du BVB Dortmund, soit deux clubs qui ont vocation à dépasser régulièrement les 200 millions de chiffre d’affaires par an. Sur le plan de la formation, les Knappen ne sont pas en reste : si Götze, Grosskreutz, Sahin, Schmelzer sont Borussen, les Neuer, Özil, Höwedes, Draxler, Matip sont tous des produits maison. Sans oublier l’excellent Kolasinac ainsi que le futur grand Meyer. Mais une différence demeure d’importance : l’endettement de S04, lequel oblige ses responsables à restructurer le club, et ce pendant dix ans encore.
Il faut ajouter à cela la supériorité dans le jeu de Dortmund et la stabilité du superbe coach, Jürgen Klopp, présent depuis 2008. Dans le même temps, combien d’entraîneurs ont été forcés de faire leurs valises du coté du Veltins Arena ? On assiste donc, fort logiquement, à une domination régionale conjoncturelle et non pas structurelle comme pourrait le laisser croire le palmarès. Dortmund travaille tout simplement mieux que son rival de toujours.
Où sont les Werder, Stuttgart, Wolfsburg et autre HSV ?
La remarque précédente vaut aussi pour tous ces clubs. Notamment les deux derniers. A la recherche de son glorieux passé, le dernier trophée date de 1987, le Hamburger SV est victime d’amnésie. Avec 150 millions d’euros de chiffre d’affaires, sans compétition européenne, il est le chaînon manquant d’un "big 4" allemand basé sur l’économie réelle (FCB, BVB, S04, HSV). Il n’y a, à périmètre constant, aucune raison objective que les Schwarz-gelben soient supérieurs aux Rothosen ! Les pertes financières des dernières années sont dues uniquement à des luttes intestines qui perdurent depuis des lustres. A l’absence de visibilité sportive. Combien de grands joueurs, combien d’internationaux, sont passés dans ce Verein lors de la dernière décennie seulement ?
Plus petits par leur surface financière (aux alentours de 100 millions d’euros quand même), Brême et Stuttgart vivent des lendemains de titre qui déchantent. Tout cela provient des rénovations et agrandissements de stade très onéreux. La qualité intrinsèque de l’effectif en pâtit. Dans le rouge depuis quelques années (quelques millions d’euros de perte seulement, encore une fois, rien de comparable avec la situation espagnole), ces deux entités subissent une réduction de leur voilure, là aussi conjoncturelle. Il n’y a aucune raison que ces clubs ne redeviennent pas, à moyen terme, des candidats à la Ligue des champions.
Mais le cancre de ce classement est bien entendu le champion d’Allemagne 2009, le VfL. Disposant de la manne financière du groupe Volkswagen, matérialisée par la deuxième plus grande masse salariale de la Bundesliga, Wolfsburg est un échec sportif cuisant depuis l’année du titre. Alors que le Werkself (le Bayer Leverkusen) a réussi à se positionner sportivement, placé mais jamais gagnant, la filiale du groupe automobile allemand, elle, cherche encore sa voie. Rien ne dit qu’elle ne trouvera pas son modèle demain.
Si la polémique lancée par Hoeness est intéressante, et prouve que l’on discute toujours de tout en Bundesliga, elle est critiquable et non-fondée. On se rend surtout compte que la domination actuelle du Bayern et de Dortmund est liée à un seul critère : celui du travail, donc de la cohésion, du projet sportif, de la stabilité. Ce n’est pas le cas d’autres Vereine où l’argent ne manque pourtant pas. Dans deux ans, le football germanique des clubs sera toujours là. Certains peuvent même s'imaginer concurrencer le grand Bayern. Qui peut prévoir dans le même laps de temps où en sera celui de l’autre coté des Pyrénées ?  L’auberge allemande a de bonnes fondations.
Polo : Chroniqueur et éditorialiste spécialiste du football allemand sur RMC, Polo a choisi son pseudonyme en hommage au grand défenseur et esprit libre Paul Breitner, buteur lors de deux finales de Coupe du Monde et meilleur joueur étranger dès sa première saison au Real Madrid. Observateur de la saga de la Bundesliga, de ses grandes et de ses petites histoires, Polo a passé une grande partie de son existence outre-rhin à y écumer les stades.
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