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Coupe d'Italie - Elitiste, anti-démocratique et mal-aimée, la Coppa n'a rien d'une belle Italienne

Valentin Pauluzzi

Mis à jour 13/01/2015 à 12:26 GMT+1

Les huitièmes de finale de la Coupe d’Italie opposeront seize équipes de Serie A. Un plateau tout à fait représentatif de ce qu’est la coupe nationale au-delà des Alpes. Une compétition en apparence relevée, mais finalement dénuée d’intérêt et qui cherche encore son identité au sein du panorama footballistique italien.

Leonardo, vainqueur de la Coupe d'Italie en 2011 avec l'Inter Milan

Crédit: AFP

Clichés ou pas, les Italiens aiment les belles voitures, les jolies filles et le football. Pour ce dernier, il s’agit surtout du championnat, lequel occupe les esprits de tous les tifosi, faisant passer au second plan les compétitions européennes où les clubs italiens font désormais de la figuration et une équipe nationale qui n’intéresse pas grand monde hormis un été sur deux. Imaginez alors quel peut être l’intérêt envers la Coupe nationale... Proche de zéro assurément. Malgré un petit regain ces dernières années, cette compétition n’est toujours pas entrée dans les mœurs du calcio, et pas certain que cela s’arrange.

La Coupe d’Italie n’est pas une institution

Une première édition en 1922 remportée par l’inconnu Vado Ligure, puis une seconde jamais conclue quatre ans plus tard. C’est au milieu des années trente que la Coppa Italia commence à s’installer, mais cela ne dure même pas dix ans à cause du deuxième conflit mondial. Pour son retour, cette fois définitif, il faut attendre 1958 soit seulement 68 éditions disputées en comptant l’actuelle. Dans le passé, la coupe s’est parfois déroulée en un mois et après la fin du championnat, ou alors inversement, des phases préliminaires accumulées l’été en guise de préparation d’avant-saison.
En fait, on n’a longtemps jamais su quoi en faire. Difficile dans ces conditions de se frayer un chemin dans le cœur des passionnés. Sa formule, elle, est revisitée très régulièrement, phases de poule, éliminations directes, matches aller/retour ou pas. Ce sont désormais les droits télés qui guident ces choix... quand ils sont vendus ! En effet, les trois premiers tours de l’édition 2014/2015 n’ont même pas trouvé acheteurs, malgré de nombreux clubs de Serie A engagés.
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Marek Hamisk (Napoli)

Crédit: LaPresse

Une coupe antidémocratique

"C’est comme si le vainqueur du Tour d’Italie démarrait le Tour de France à la 10e étape et avec le maillot jaune sur les épaules." Cette magnifique analogie est signée Maurizio Sarri, entraîneur de l’Empoli, et elle vise à dénoncer la surprotection des clubs de l’élite dans cette compétition. En effet, les huit premiers de la dernière Serie A ne font leur entrée en lice qu’à partir des huitièmes de finale et en étant certains de recevoir. Les douze autres ont deux tours de plus au programme mais sont eux aussi préservés par un système très discutable.
En fait, il n’y a qu’un seul tirage au sort dans cette compétition, il s’effectue fin juillet, et à quelques jours du premier tour, comme pour se débarrasser d’une tâche considérée ingrate. Le tout donne un tableau tennistique dont on peut déjà deviner le dernier carré sans prendre trop de risques. Effectivement, pas d’inversions de terrain, les plus petits se déplacent toujours, ceci grâce à un "ingénieux" système : chaque club se voit affubler un chiffre, et celui qui hérite du plus petit reçoit. Evidemment, plus la division est basse, plus le numéro est grand.

Une coupe élitiste

Oubliez les fabuleuses épopées et les petits poucets. Pas de conte de fée à la Calais ou Quevilly. Les clubs amateurs sont presque aux abonnés absents de cette coupe, anomalie qui s’explique principalement par l’organisateur. C’est la Ligue et non la fédération qui est en charge de cette compétition. Ainsi, la liste des participants est variable, mais surtout incomplète. On a par exemple connu une édition 2007-08 exclusivement réservée aux clubs de Serie A et Serie B, comme ce fut le cas de 1959 à 1982. Depuis quelques saisons, les équipes de Lega Pro (3e division) et Serie D (4e division) sont toujours conviées, mais partiellement : 27 sur 60 pour les premiers, 9 sur 167 pour les seconds pour l’édition 2014-15. Des équipes qui sautent vite car contraintes de jouer quasiment tout le temps à l’extérieur.
Les surprises, voilà ce qu’on aime dans une coupe nationale ! Et même si c’est notre propre club qui passe à la trappe. La saison passée, Siena, pensionnaire de Serie B, s'est glissée jusqu'en quart de finale. Une première depuis 2007. Et c'est de cette division que provient très souvent le "Cendrillon". Pescara qui sort le Chievo, Modène qui s’impose à Palerme, c’est ce dont on a dû se contenter cette saison.
Aucun frisson, aucune liesse, rien. Seuls douze clubs de divisions inférieures ont réussi à atteindre les huitièmes depuis 2006, 12 sur 132. L’exploit du Napoli capable de s’imposer en 1962 tout en étant pensionnaire de Serie B n’a jamais été réitéré. A bien y regarder, cette coupe d’Italie est en fait plus proche d’une coupe de la Ligue. D’ailleurs, Lega Pro et Serie D organisent également leur propre coupe. On ne mélange pas les torchons et les serviettes.
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Napoli De Laurentiis Coppa Italia 2014 AP/LaPresse

Crédit: LaPresse

La coupe du turn-over et de la désaffection

L’intérêt des clubs est évidemment très relatif, c'est un lot de consolation et le vainqueur est même parfois raillé. Il s’agit ainsi de faire tourner les troupes en semaine (ne jamais programmer un match de coupe le week-end, diantre !). Et même pour les moyens/petits clubs, résignés à l’idée de créer l’exploit à cause d’un format qui les pénalisent en tout point. L’idée de garnir un palmarès léger ne les motive pas plus que cela, sur les seize vainqueurs différents, seuls cinq n’ont jamais gagné le scudetto.
Aucun champion des deux dernières décennies ne figure dans les différents classements all-time, on ne trouve ni Del Piero, Totti, Maldini, Zanetti ou autres Pirlo, tous généralement au repos lorsqu’il s’agissait d’y participer. Pas de star, pas de suspense, pas d’histoire et donc par ricochet, pas de spectateur dans les travées. 2848, c’est l’affluence moyenne du quatrième tour disputé début décembre avec le triste record de 914 payants d’Atalanta-Avellino. Pour comparaison, ils étaient dix fois plus en Allemagne et en Angleterre au même stade de la compétition, grâce aussi à la présence des cadors qui entrent plus tôt en lice.
Ce n’est qu’à partir des quarts de finale que l’on parlera de la Coupe d’Italie, en attestent les possibles rencontres : Milan-Lazio, Inter-Napoli, Roma-Fiorentina et Juventus-Parma. Les dirigeants du calcio sortiront alors de leur torpeur, prêts à ramasser le flux d’argent que généreront ces affiches vues et revues pour la centième fois, mais continuant de ne rien comprendre à ce qu’est la quintessence de l'état d'esprit d’une coupe nationale. Heureusement, on a daigné disputer la finale dans la capitale administrative depuis quelques temps.
C’est que par les temps qui courent, elle aurait pu être délocalisée au Moyen-Orient ou plus loin encore. Cela n’a tout de même pas empêché Psy et son Gangnam style de venir se produire sous une terrible bronca avant l'édition de 2013. C’était avant un match historique entre la Lazio et la Roma qui écrivait peut-être là les premières lettres de noblesse d’une compétition fade, voire artificielle.
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