Zidane, le retour

Après "Comment jouer sans Zidane ?", "Comment jouer avec Zidane ?", la suite. La question mérite aujourd'hui d'être posée. Car, si la France a battu le Togo sans lui, elle a surtout trouvé une formule qui a séduit dans l"animation offensive avec deux latéraux (Silvestre et Sagnol) et deux ailiers (Malouda et surtout Ribéry) qui ont réussi à gaver de ballons Henry et Trezeguet. La relation entre la défense et l'attaque a même parfois paru plus rapide. Mais, dans ce système, il n'y a point de place pour le célèbre numéro 10. Raymond Domenech, lui, a déjà sa petite idée sur l'équipe qu'il alignera face à l'Espagne. "C'est votre débat. Moi, je sais ce que je vais faire. Je connais déjà ma décision" , avait-il répondu dès samedi.

Mais le sélectionneur a depuis décidé d'entretenir le mystère. Alors qu'il devait annoncer la composition de son équipe lundi soir après le dernier entraînement, comme il l'avait fait lors des trois précédents matches, il a finalement décidé de garder le silence. "Je ne donnerai pas l'équipe après l'entraînement lundi. J'aime bien changer les habitudes et sortir du train-train. On doit la communiquer au moins trois-quarts d'heure avant le match. Le tout est de savoir quand les Espagnols vont dévoiler la leur", explique Domenech qui croit au coup de bluff de son homologue. Aragones a en effet annoncé prématurément que Raul et Frabregas seraient titulaires à la place de Luis Garcia et Senna. "Les Espagnols annoncent une équipe. J'attends de voir. On réfléchit en fonction de l'adversaire. On pèse ses forces et ses faiblesses", se méfie le patron des Bleus.

Mais peut-on se passer de Zidane ? "Des casse-têtes comme ça, j'en veux tous les jours. J'ai une formule qui marche (face au Togo, ndlr) mais il y a d'autres avec d'autres joueurs", se réjouirait presque Domenech. Mais, à lire entre les lignes, on imagine mal Domenech, déjà fragilisé auprès des anciens, laisser sur le banc sa plus grande star : "On sait que si on joue contre l'Espagne sans être solide derrière, on peut préparer le billet de retour. Mais il faut aussi savoir poser des problèmes à l'adversaire et donc trouver l'équilibre entre défendre et attaquer " . Le tout pour l'attaque préconisé face au Togo ne devrait donc pas être reconduit.

Egalement suspendu face au Togo, Eric Abidal est lui aussi que le retour de Zidane sera un plus pour les Bleus. "Zizou était frustré de ne pas jouer, il a envie de retrouver la pelouse pour rejouer avec ses partenaires, dévoile le Lyonnais. C'est un gagneur, ça se voit à l'entraînement. On sent qu'il est déterminé, plus que les autres, même si tout le monde a le même objectif. Lui, il a sa fin de carrière à l'esprit et il veut finir sur une bonne note". Willy Sagnol va même plus loin : "En 1984, ça s'était joué sur un coup-franc de Platini et une erreur d'Arconada. Et en 2000, c'était Zidane. Heureusement aujourd'hui, on a encore Zizou. Il connaît beaucoup de monde, oui, mais les autres le connaissent aussi. Ce sera un source de motivation dans les deux sens".

"La menaçante France d'Henry ou la décadente France de Zidane ? Laquelle rencontrera l'Espagne mardi à Hanovre ?", s'interroge quant à elle la presse espagnole. "Nous allons mettre Zidane à la retraite", titrait même le quotidien Marca. Mais Luis Aragones ne partage pas cet optimisme arrogant. "Il est toujours très dangereux sur des matches à élimination directe", rappelle le sélectionneur espagnol. Ce dernier a certaine en mémoire que le Madrilène d'adoption a déjà frappé deux fois en quatre confrontations face à la Seleccion : un coup franc magistral en quart de finale de l'Euro 2000 (2-1) et le premier but de l'histoire au Stade de France en janvier 1998 (1-0). Une passe millimétrée ou un coup de patte bien placé pourrait encore une fois faire la différence. Après neuf jours de repos, il devrait en outre être plus frais pour relever son défi espagnol.

L'équation est donc simple : qui faut-il sacrifier ? Domenech pourrait reconduire un 4-4-2. Mais où placer Zidane ? Le bruit a couru que ZZ pourrait évoluer à droite et pousser Franck Ribéry sur le banc. Pourtant, au Real Madrid et sous Jacques Santini à l'Euro 2004, il a déjà joué à gauche. Mais, s'il prenait plutôt la place de Florent Malouda, Zizou serait positionné dans une position bancale où il serait obligé de boucher son couloir et se charger des taches défensives. Une autre solution pourrait être de se priver d'un milieu défensif. Mais, outre le choix cornélien entre Makelele et Vieira, l'appel à l'équilibre entre attaque et défense prôné par Domenech pour bloquer un milieu de terrain espagnol vif et technique (Xabi Alonso, Xavi, Fabregas) semble fermer la porte à cette option.

Mais la solution la plus simple serait sans doute de revenir au système utilisé face à la Suisse (0-0) et la Corée du Sud (1-1) avec Zidane dans l'axe derrière Henry. Mais cela signifierait se passer de David Trezeguet. S'il n'a pas marqué, le Turinois a pourtant joué un rôle essentiel face au Togo. Interrogé sur la question, il s'était contenté de répondre : "Ce n'est pas moi qui décide. Je suis à disposition, ce n'est pas moi qui fait l'équipe". Mais les propos de Domenech laissent peu de chances de voir un deuxième attaquant. Lors de la dernière mise en place tactique, lundi soir, il a ainsi fait évoluer Henry seul en pointe dans le système en 4-2-3-1 qui porte désormais sa patte. Le sélectionneur pourrait donc s'épargner d'aligner une équipe en 25 matches. Réponse définitive mardi 45 minutes avant le coup d'envoi...