"Ce n'est pas le Barça"

Cédric ROUQUETTE : A la lettre, l'homme décisif a été Cristiano Ronaldo. On lui a assez souvent reproché de ne pas être là dans les grands matches... Là, il a marqué un but capital, qui n'était pas donné à tout le monde, devant 90.000 paires d'yeux ennemies. Si on parle du contenu pur, on a vu le meilleur d'Ozil avec et sans le ballon. Et si je m'autorise à interpréter votre question à l'envers, le fait que Messi, Iniesta et Xavi aient été dans un petit soir sur le plan individuel a été l'un des facteurs décisifs du match.

C.R. : Maîtrise tactique sans précédent, oui, c'est incontestable et ce fut le "label" de ce match. Mais le 4-2-3-1 n'y est pas pour grand chose. Le Real était en 4-2-3-1 la saison dernière quand il a pris 5-0 au Camp Nou... C'est le niveau exceptionnel de don de soi et de coordination entre les courses des Madrilènes qui a permis au plan de Mourinho de fonctionner à ce point.

C.R. : Ce 3-4-3 n'a pas empêché le Barça de dominer, d'avoir des occasions et même Tello de se retrouver deux fois dans des situations favorbales. Ce qui m'a frappé, c'est que le Barça n'a eu que très peu de possibilités de déséquilibrer la défense du Real dans les trente derniers mètres. Pour deux raisons : 1/ Individuellement, il y a eu très peu de différences, et le jeu du Barça repose aussi là-dessus. 2/ J'ai trouvé la participation des Catalans assez faible. Comme si le Barça avait peur des contres madrilènes, le porteur n'avait pas énormément de solutions devant lui, alors qu'en général ça grouille de solutions, et de solutions très mobiles.

C.R. : Oui... A chaud, sur twitter, j'ai qualifié ce match de "chef d'oeuvre" et je maintiens à froid. Ce match a été ce que les Madrilènes ont décidé qu'il serait. A l'extérieur. Avec titre en jeu. Sachant que ce plan de jeu n'avait pas toujours suffi dans le passé. Le Real a en quelque sorte obligé le Barça à être stérile. C'est un coup de maître.

C.R. : "Raté sa saison", vous y allez fort ! Ce qui est vrai, c'est que le Barça, au moins en ce moment, a moins de marge. Vous parlez d'un "problème de motivation" : c'est possible. Après trois ans de grandes victoires, on ne peut pas avoir la même fraîcheur avec le même niveau d'exigence mentale. se maintenir au sommet, surtout avec un jeu aussi exigeant, est un challenge exceptionnel. La forme physique a joué un rôle dans les deux défaites à Chelsea et contre le Real. Les joueurs du Barça sont émoussés. On ne peut pas être au top en permanence dans la saison. Clairement, ce paramètre fait que ce n'est pas le même Barça.

C.R. : C'est l'un des enjeux de la rencontre, de toute évidence. Le Barça ne gagnera pas la bataille de la fraîcheur et il sait qu'il aura du fil à retordre sur le plan tactique. Maintenant, je pense qu'il lui reste de l'avance sur le niveau de jeu absolu et que Chelsea, s'il a clairement des armes pour passer, aura encore besoin d'un peu de réussite pour aller en finale.

C.R. : Depuis le début de la saison, il est incontestable que le Real a le niveau pour gagner la Ligue des champions. Quel que soit l'adversaire. La victoire de samedi ne fait que renforcer cette impression.

C.R. : Il est trop tôt pour désigner le favori. Il nous manque plusieurs matches clef de fin de saison et il nous manque l'Euro. En revanche il est clair qu'avec ce but et ce match, Ronaldo a en quelque sorte "égalisé" alors que Messi, notamment grâce à la Ligue des champions, semblait devant. Le Portugais n'est pas distancé et il tient, avec l'Euro, une occasion unique de prendre l'avantage. Si les deux joueurs sont stratosphériques en club mais que CR7 ajoute un gros Euro (ou si au contraire, il passe à côté), cela influencera les votants.

C.R. : "Ecart de niveau", c'est beaucoup dire. Les deux sont monstrueux dans leur registre. Messi réalisé une meilleur saison en coupe d'Europe mais Ronaldo est devant au nombre de buts marqués en Liga et il sera champion d'Espagne. Parler d'écart de niveau entre Messi et Ronaldo aujourd'hui, c'est comme parler d'écart de niveau entre Nadal et Federer. Attendons la fin de leur carrière pour tirer les bilans.