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Entre intérêts économiques et amateurisme organisationnel, la Liga prend un pari risqué

François-Miguel Boudet

Mis à jour 30/12/2015 à 10:55 GMT+1

LIGA - Pour la première fois depuis 25 ans, la Liga propose une journée de championnat pour clôturer l'année civile. Simple one shot ou pratique amenée à se développer dans les années à venir sur le modèle anglais ? Pour perdurer, l'essai doit impérativement être transformé.

Liga

Crédit: Eurosport

Dans le championnat anglais, le Boxing Day est une tradition qui remonte à 1888. Les prémices remonteraient même à 1860. Tous les 26 décembre, l'Angleterre digère les agapes de Noël au stade, dans les pubs ou sur le canapé devant un match de Premier League. En Espagne, cette coutume n'est pas séculaire, juste exceptionnelle. La dernière fois, c'était en 1990. Davantage qu'un réel Boxing Day, il s'agit plus d'une "jornada navideña", avec 9 matches le 30 et le derby de la Communauté valencienne entre Villarreal et Valencia le 31 décembre.

L'Euro 2016, argument en or

Longtemps, le syndicat des joueurs a fait en sorte que soit respectée la trêve hivernale. Cette saison, la Asociacion de Futbolistas Españoles (AFE) a accepté une mesure d'exception, d'intérêt national : "Cela n'arrivera que cette année, afin d'aider la sélection", a affirmé Luis Rubiales, président de l'institution. En effet, en jouant les 30 et 31 décembre, la Liga se terminera dès le 22 mai. L'objectif : que Vicente Del Bosque puisse disposer dès le 17 mai de ses joueurs non concernés par les finales de la Copa del Rey, de la Ligue Europa et de la Ligue des Champions.
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Vicente Del Bosque et ses joueurs de la Roja

Crédit: AFP

Après un Mondial 2014 catastrophique, l'Espagne ne veut pas passer au travers, d'autant plus qu'elle est double tenante de la couronne européenne. Pour Javier Tebas, président de la Ligue, c'est un premier pas et une initiative qu'il souhaite répéter tous les ans. L'idée de proposer du football à cette époque creuse de l'année pour concurrencer la Premier League est un cheval de bataille de Tebas. Y être parvenu est un véritable tour de force, sachant que l'argument du soutien à la Seleccion ne vaut qu'une fois tous les deux ans. Pourtant, il est confronté à plusieurs obstacles, et non des moindres.

Le temps des polémiques

Dans les colonnes d'El Confidencial, le journaliste Jesus Garrido a synthétisé le problème majeur de l'initiative censée concurrencer le modèle anglais : "Personne n'a pensé qu'en Espagne les 30 et 31 décembre sont des jours ouvrés et pas des jours fériés ? En d'autres termes : combien de personnes seront libres pour se rendre à Santiago-Bernabeu un mercredi à 16 heures ?" Au Royaume-Uni, le 26 décembre est férié et si le Boxing Day tombe un weekend, le lundi suivant est férié. L'affluence est maximale au stade (98% de taux de remplissage), les prix flambent, les touristes venus en famille sont disposés à mettre la main au portefeuille pour s'offrir un morceau de la légende. "A titre d'exemple, il faudrait comparer l'affluence de n'importe quel stade britannique avec celle du stade de Getafe contre La Corogne le 30 décembre...", conclut Garrido un rien grinçant.
Outre l'avis défavorable du syndicat des joueurs, Tebas pourrait donc être confronté à ce qui s'apparenterait à une véritable gifle : le désaveu des supporters. Reste à savoir s'il en tiendrait compte si le succès était avéré à l'étranger, la Liga se vendant mieux hors de ses frontières que sur son propre territoire.

Des ambitions claires mais un amateurisme patent

"Quelle meilleure époque pour amener les enfants au football, comme cela se fait en Grande Bretagne ?, justifie Tebas. J'espère que l'Espagne acquerra cette tradition." Début décembre, il a présenté le projet #LaLigaNonStop, destiné aux supporters et surtout aux plus jeunes. Autrement dit, aux futurs consommateurs de football. Au programme : fan zone, arbres de Noël et attractions. "Nous espérons que #LaLigaNonStop soit un triomphe. C'est la première fois que l'on joue à Noël (sic) et nous voulons que ce ne soit pas la dernière. Les principaux protagonistes seront les plus petits et c'est pour cela qu'il y aura des prix spéciaux pour les enfants".
Pour autant, l'organisation de cette 17e journée a frisé l'amateurisme. Initialement prévu le 31 décembre, le derby Rayo Vallecano-Atlético de Madrid a dû être avancé, en raison de la tenue de la San Silvestre Vallecana, une course très populaire qui existe depuis 1964. Et face au poids de la tradition, la Ligue a dû plier...
Ce match s'ajoute donc aux 8 autres qui s'étalent sur 4 horaires mercredi (16h, 18h15, 20h30 et 22h). Preuve que l'organisation laisse à désirer, Las Palmas - Grenade débutera alors que les matches de 20h30 ne seront pas achevés. Outre que le stade des Canaries est vétuste et rarement plein, on se demande bien qui pourrait être intéressé par ce duel de mal classés. En la matière, la Ligue a complètement raté son coup. Un enchaînement crescendo avec l'Atlético puis le Real Madrid et enfin le Barça aurait été plus adapté et surtout plus pertinent.
Pour couronner le tout, Villarreal - Valence est le seul match qui se disputera le 31 décembre, à 16h. Pourquoi une répartition aussi aberrante ? Si les deux villes ne sont distantes que de quelques kilomètres, cette partie pose un problème de récupération puisque les deux équipes auront eu un jour de moins pour se reposer en vue de la 18e journée. Or le dimanche 3 janvier, Valence affrontera le Real Madrid. Sachant que Tebas a eu l'idée contestable d'avouer son madridisme avant le dernier clasico, il n'en fallait pas davantage pour déclencher une nouvelle polémique. Le président de la Ligue a donc l'obligation de réussir son coup. Car Boxing Day ou pas, en cas d'échec, personne ne lui fera de cadeau.
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Javier Tebas, président de la Ligue espagnole de football dans son bureau de Madrid le 17 novembre 2015

Crédit: AFP

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