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Séville et Villarreal : deux écoles de recrutement, un même talent

François-Miguel Boudet

Mis à jour 05/02/2017 à 13:29 GMT+1

Villarreal et Séville font partie du gratin mondial en matière de cellule de recrutement et sont toujours citées en exemple pour leur flair et leur professionnalisme, malgré des caractères très différents.

Séville et Villarreal

Crédit: AFP

Villarreal et Séville sont ce qu’on a coutume d’appeler des clubs vendeurs. Pour continuer de progresser et se maintenir dans les hautes sphères du football espagnol, les deux clubs ont l’obligation d’avoir le nez creux en matière de recrutement et donc d’acheter malin. Pour le club, c’est une manière de survivre. Pour le joueur, une façon d’exploser aux yeux des très grands clubs et de franchir un cap dans un championnat ultra-compétitif. Pour ça, Submarino Amarillo et Palanganas sont des orfèvres. Une telle réussite ne s’obtient pas en claquant des doigts, c’est un travail de longue haleine.
Débauché en début de saison par l’AS Monaco, Antonio Cordón travaillait depuis 17 ans à Villarreal, dont 8 comme directeur sportif. De son côté, Monchi est un pilier de l’institution andalouse depuis 2000. La constance et la compétence déterminent le cap. Si le Sous-Marin a connu une descente en 2011-2012, sa solidité institutionnelle lui a permis de retrouver la Liga dès la saison suivante, jusqu’à devenir un prétendant constant à la qualification en Ligue des Champions. De son côté depuis 2001, Séville n’a jamais achevé le championnat dans la "segunda tabla", sans parler de ses Ligue Europa et de sa saison 2016-2017. Difficile d’imaginer qu’il y a 20 ans, les Rojiblancos était ruiné économiquement et sportivement !
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Monchi

Crédit: AFP

La réussite se provoque par le travail forcené

Les deux clubs ont une façon de travailler particulièrement professionnelle. Quatre points sont envisagés : économique, tactique, technique et personnel. "Nous sommes 16, décrivait Monchi dans El Pais en mai 2015. Je parle tous les joueurs avec au moins cinq représentants. Chacun des membres du secrétariat technique contrôle une série de critères. Grâce à ces informations, nous établissons chaque mois un onze pour chaque pays. De ces onze, nous ciblons ceux que nous suivrons de plus près. La norme, c’est que 7 techniciens suivent le joueur. Ensuite, il nous reste 8 ou 10 footballeurs par position. Nous les cataloguons de A à E, sachant que A est pour un joueur à signer immédiatement. Et quand on me propose un joueur, il doit déjà être dans ce catalogue".
Cette enquête poussée permet de limiter les risques et de sortir le carnet de chèques avec le plus de certitudes possibles, même si la chance est aussi un facteur à prendre en ligne de compte. L’objectif recherché : avoir l’équipe la plus compétitive possible pour mettre ses joueurs en valeur et ainsi mieux les revendre. Un cercle vertueux en somme. Toujours dans les colonnes d’El Pais, Monchi a apporté quelques détails sur sa façon de fonctionner : "Ce n’est pas exactement vendre pour grandir. C’est vendre pour maintenir un niveau supérieur à tes possibilités. Oui, nous sommes un club vendeur parce qu’avec nos revenus habituels, nous ne serions jamais arrivés là où nous en sommes. Ce n’est pas vendre mais générer des plus-values pour avoir un effectif au-dessus de tes possibilités. En plus, ça ne garantit pas le succès".
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Adil Rami et Kevin Gameiro

Crédit: AFP

Séville comme Villarreal excellent dans ce domaine. Monchi a par exemple réalisé une plus-value totale de 200 millions d’euros. Son prochain bon coup sera vraisemblablement Steven N’Zonzi. Acheté 10 millions d’euros à Stoke City, le Français vient de renouveler son contrat jusqu’en 2020. Tout est réuni pour au moins doubler la mise de départ deux ans après son arrivée. De son côté depuis dix ans, Villarreal affiche aussi une sacrée réussite. Reina, Godín, Forlan entre autres ont été très bien vendus. Plus récemment, le club a réalisé 75 millions d’euros de bénéfices avec seulement 4 ventes : Gabriel Paulista à Arsenal (15M€), son remplaçant Eric Bailly à Manchester United (48M€), Luciano Vietto à l’Atlético de Madrid (20M€) et Alexandre Pato à Tianjin Quanjian (18M€).
Le scouting et le monde des transferts ne sont pas une science exacte. La marge d’erreur existe. El Mundo a cité une anecdote que Monchi à l’habitude de raconter à ses amis. Alors qu’il avait signé Aboulaye Konko pour 9M€ en remplacement de Dani Alves en 2008 (acheté 1M€ et revendu… 42M€ !), l’Andalou s’est immédiatement rendu compte de son erreur de casting quand le joueur lui a demandé "qui est Dani Alves ?". Mais à Séville aussi bien qu’à Villarreal, les bons coups prennent largement le pas sur les échecs. Ce n’est pas un hasard si ces deux équipes développent un jeu attrayant, même quand son DS et son coach quittent le club comme cela a été le cas pour Villarreal l’été dernier. Une cohérence dont devrait s’inspirer ses rivaux en Liga aux budgets supérieurs (coucou le Valencia CF) et beaucoup de clubs européens. Il se murmure avec insistance depuis quelques semaines que l’AS Roma a convaincu Monchi de tenter l’aventure de la Serie A dès la saison prochaine, certainement pour un salaire plus important. Avant son renouvellement de contrat en 2015, Monchi était rémunéré aux alentours de 300.000€ par an quand Eduardo Macía, son alter ego du Betis, touchait près du double. Même a un tel prix et une clause de rescision de 5M€, c’est très bon marché.
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Villarreal

Crédit: Eurosport

Villarreal la discrète, Séville la médiatique

La visibilité médiatique est le domaine où les clubs se différencient le plus. Vous ne connaissez pas Pablo Ortells ? C’est normal. Il n’a beau avoir que 36 ans, cela fait plus de 15 saisons qu’il est à Villarreal. Il a été entraîneur des pré-benjamins aux sub-15 et c’est lui qui remplace Antonio Cordón comme directeur sportif à Villarreal. Ancien directeur de la cellule de détection, son nom n’apparaît même pas dans l’organigramme du club sur son site officiel. Une discrétion que cultivait déjà son prédécesseur. Le Sous-Marin jaune tient à sa tranquillité et refuse d’aborder le thème en profondeur dans la presse. Et quand la famille Roig sort de son silence, c’est pour rappeler que l’institution préfère l’ombre à la lumière.
A l’inverse, Monchi parle régulièrement dans la presse. Son vrai-faux départ la saison dernière a fait la une des journaux ibériques plusieurs jours. Sa visibilité permet aussi à des clubs et des joueurs de se sentir valorisés. Avoir une figure de proue en plus de résultats sportifs probants peut faciliter la venue des joueurs, et ce n’est pas le Valencia CF qui piste souvent les mêmes joueurs mais se fait souvent griller (Stevan Jovetic en est le dernier exemple) qui dira le contraire. Les deux méthodes de communication se valent et c’est surtout les résultats obtenus qui plaident pour les deux institutions. Une manière d’envisager le football et la vie d’un club qui devrait inspirer mais qui n’est pas suffisamment mis en pratique par leurs concurrents.
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