Le nouveau Gignac

André-Pierre Gignac l’avait annoncé. Il a tenu parole. Face à la presse, vendredi dernier, l’attaquant marseillais clamait haut et fort sa volonté de débloquer enfin son compteur but au stade Vélodrome contre Bordeaux. "J’attends ce premier but à domicile avec impatience, déclarait l’ancien Toulousain. Il ne faut pas que je le force. Ce n’est pas une obsession mais ce serait bien qu’il arrive dimanche." Et c’est arrivé. A la 23e minute, il plaçait un plat du pied droit entre les jambes de Carrasso. Sa joie était à l’image de l’homme : profonde. Son but marqué, il se dirigea directement vers le banc de touche pour partager son immense bonheur avec Benoît Cheyrou. Front contre front, l’étreinte fut forte et démontra combien Dédé le Martégal attendait ce moment…

Souvent raillé et sifflé par le public du Vélodrome, Gignac a été ovationné à l’issue du succès face aux Girondins. Une revanche que Didier Deschamps tient à souligner. "Entendre scander son nom, c’est une récompense pour tous ses efforts". L’entraîneur olympien espère que ce but va lui donner "confiance après des moments difficiles". Gignac qui marque, c’est tout Marseille qui reprend espoir. Souleymane Diawara ne dit pas autre chose : "Je suis vraiment content pour lui car depuis le début de l’année, il travaille beaucoup. Il est récompensé, c’est bien pour lui, mais surtout pour nous. J’espère qu’il ne va pas s’arrêter là…" Auteur d’un triplé en Ligue des champions à Zilina au cœur de l’automne, le buteur marseillais n’avait pas confirmé ensuite. Mais les choses ont changé. Et Gignac aussi.

A l’heure des bonnes résolutions pour la nouvelle année, Gignac a rendu public la sienne : "être davantage professionnel". Un credo qu’il est venu marteler devant les médias pour sa première apparition de la saison. Ce n’était pas qu’un simple mea-culpa mais une vraie confession. "Oui, je n’ai pas été à la hauteur ; oui, je n’ai pas fait tout ce qu’il fallait pour être compétitif ; oui, je dois faire plus". Sur le plan personnel, un déménagement de Fos-sur-Mer -où réside sa famille- pour une maison proche du centre d’entraînement de l’OM a provoqué un effet papillon positif. Moins de temps passé dans les trajets, plus de temps passé dans les mains des kinés et des masseurs. Moins de temps passé auprès de ses amis, plus de temps passé auprès de ses coéquipiers. La formule a payé.

Dès les premières minutes de l’avant match de Bordeaux, Gignac paraissait à la fois détendu mais très concentré. Il est venu humer l’odeur de la pelouse une heure avant le coup d’envoi. Accompagné de Cheyrou, il a regardé avec envie les équipes de poussins se donner à fond en lever de rideau. Il a même remis les coupes aux vainqueurs et pris des photos avec les minots. Finalement, Gignac a retrouvé les plaisirs simples du football. Se concentrer sur l’essentiel. C’était l’un des objectifs 2011 que Gignac s’est fixé. Il faudra aussi faire preuve de régularité dans la performance.

"Ce but doit l’inciter à faire encore plus", explique encore Deschamps. Car le coach marseillais sent que son poulain doit pour maintenir la cadence pour franchir un cap. "A l’OM, il faut être performant tous les trois jours, rappelle DD. Ça le change." Plus posé dans sa vie privée, Gignac tente aussi de trouver sa place dans le onze des champions de France. A gauche ou dans l’axe ? Son coach n’a pas encore tranché. "Gignac à gauche et Brandao en pointe : c’est une solution possible, avoue Deschamps. Leur complémentarité peut être intéressante, ça demande du temps aussi. Je sais que Gignac n’est pas un ailier mais il y a beaucoup d’attaquants dits axiaux qui évoluent dans cette position, que ça soit en France ou à l’étranger. Il aime bien ce côté, plus que ce rôle de pivot pour lequel il n’est pas habitué. Je l’ai trouvé convaincant. Il n’a pas tout bien fait mais il avait déjà occupé ce rôle notamment en équipe de France. Il a créé des décalages. Ce qui m’intéresse c’est la complémentarité et l’animation offensive. C’est une question d’équilibre. Mais ça ne se fera pas du jour au lendemain." Oui, mais la métamorphose a commencé…