Quand Bordeaux s'est renié

S'adapter pour ne pas couler. Pour se sauver surtout. Quand Francis Gillot a décidé de changer de dispositif tactique à la trêve, l'entraîneur bordelais abattait l'une de ses dernières cartes. Les Girondins étaient alors plus proches de la zone rouge que des places européennes. L'idée de l'ex-Sochalien? Zapper son 4-4-2 et passer en 3-5-2 avec trois défenseurs centraux épaulés sur les ailes par Trémoulinas et le Brésilien Mariano, arrivé au mercato. L'objectif? Mieux équilibrer sa formation et utiliser à bon escient les qualités offensives de ses latéraux ainsi que le profil plus "contreur" que buteur de ses armes offensives: Gouffran, Jussiê, Maurice-Belay ou encore Obraniak.

Cette évolution, Gillot la justifiait déjà avant les victoires sur Lille (4-5) et Lyon (1-0). "Je veux bien faire le spectacle mais arrive le moment où il faut prendre des points. Aujourd'hui, on a moins le ballon, on est moins beaux à voir jouer mais je vous rappelle qu'on a joué cinq mois en 4-4-2 pour nous retrouver à la 18e place." Deux semaines plus tard, les résultats le confortent. Les Bordelais (9e) ne sont plus vraiment concernés par le maintien (15 pts sur Auxerre, 18e). Mieux, ils se rapprochent tranquillement des places européennes grâce à des victoires sur des formations mieux classées alors qu'ils n’avaient gagné aucun match face aux équipes actuellement entre la première à la huitième place (4 nuls et 4 défaites).

Sur le plan du jeu, les Bordelais ont moins le ballon mais sont plus efficaces. La preuve, ils sont parvenus pour la première fois de la saison à mettre plus de deux buts dans le même match (à Lille), ont marqué avec deux tirs cadrés face à Lyon et possèdent la meilleure attaque de L1 en 2012 (10 buts). Et si la défense a pris l'eau dans le Nord, elle est globalement plus fiable grâce, en amont, à un milieu plus dense. Le match face à l'OL l'a prouvé. "Lyon ne s'est pratiquement pas créé d'occasions pendant 90 minutes, cela veut dire quelque chose, explique Gillot dans Sud Ouest. On a été bien en place, on a respecté les consignes, on a été très hargneux sur leur porteur, bien dans les duels. On emm… beaucoup d'équipes."

Evidemment, tout n'est pas encore parfait et les joueurs sont encore en plein rodage eux-aussi. "C'est un nouveau système, il faut s'adapter, reconnaissait Marc Planus après Lyon. Il y a des changements comme Carlos Henrique (blessé, ndlr) avec Lamine Sané. Samedi soir, avec ce 3-5-2, c'était le match le plus abouti tactiquement et défensivement. Comme contre Toulouse (2-0). Même si on leur a laissé le ballon, on n'a pas concédé d'occasions, c'est le gros point positif, explique le défenseur. Et on a nos attaquants qui avec deux occasions en marquent quatre. On est très réaliste partout mais on sait que le vent tourne parfois, il faut faire attention".

Les semaines à venir en diront plus sur les capacités de ce nouveau Bordeaux. Et en premier lieu, le déplacement à Montpellier, ce week-end. "Si on pouvait poursuivre la série, ce serait une bonne chose, reconnait Gillot. Cela veut dire qu'on peut se mêler à la lutte pour la 5e, 6e ou 7e place." L'entraîneur ne cache pas non plus que cette embellie pimente la fin de saison. "Rester au milieu de tableau, cela aurait été embêtant. Au moins, on ne sera pas en roue libre". Quant à Planus, il avoue a demi-mot qu'un nouveau résultat positif pourrait faire évoluer les ambitions du club. "Peut-être qu'en faisant un résultat à Montpellier, on se donnera un peu plus de confiance pour voir mieux." Qui l'eût crû il y a encore trois mois?