Laurent Blanc, l’intérimaire assumé aux dents longues

Le programme délivré par Laurent Blanc sur sa première année de contrat au PSG, ce jeudi dans le Parisien, ne comporte pas de véritable surprise. Le coach du PSG promet des résultats (d’abord), du jeu (ensuite), mais aussi un maximum de pression pour lui et les siens. “Ce sera une saison difficile, comme souvent l’année suivant le titre national. Il faut confirmer et les gens ne comprendraient pas que l’on ne confirme pas, ce qui rajoute donc une pression supplémentaire.” Mais celui qui nie mollement n’être là, a priori, que pour une saison n’a pas renoncé à imposer une patte, à laisser une trace, et par définition à rester le pilote de ce qu’il décrivait mercredi comme une superbe Formule 1. Quand il affirme que le PSG a le potentiel pour gagner la Ligue des champions, il pose en creux cette question : peut-on virer l’entraîneur qui aura atteint un tel objectif ?

Laurent Blanc n’avait jamais répondu aussi frontalement à la question sur son statut présumé d’intérimaire, appelé à la hâte avant la nomination d’une grosse pointure. Quand Dominique Séverac mentionne dans sa question “une rémunération principalement versée la première année”, Laurent Blanc ne nie pas. Et il accepte le challenge. “Les résultats parleront. Je ne suis pas au-dessus des règles. Je travaille pour faire la meilleure saison (…), je ne me projette pas au-delà. Certains entraîneurs avaient des contrats de six ou sept ans, et, six mois plus tard, ils n’étaient plus là ” Blanc lâche quand même qu’il espère “avoir le temps de bosser”. Il a le droit de le craindre dans un tel environnement. “Au PSG, les objectifs sont très élevés. Si j’y arrive, on aura peut-être la chance de se revoir, sinon je pense qu’on se verra dans un autre contexte.” Et ça n’a pas l’air de le traumatiser.

Les phrases-clefs

- “J’ai choisi de venir au PSG, je n’étais pas obligé. (….) Quel entraîneur débute la saison sans pression ? Si on est surpris d’avoir la pression à Paris, il ne faut pas venir. J’ai accepté de venir avec grand plaisir et je sais ce qui m’attend.” Ce qui l’attend : d’excellents résultats ou la porte, et beaucoup de pression quoi qu’il arrive.

“J’adore le beau jeu, oui, je le revendique. Mais j’adore surtout gagner! J’ai l’impression que l’on me cantonne au beau jeu, qu’à la limite je préfère bien jouer et perdre. Non! J’adore gagner! ” Laurent Blanc, très attendu sur le dossier spectacle et manière, est obligé de faire à peu près le même genre de rappel que lors de sa nomination à la tête des Bleus en 2010.

“Pour l’instant, il est là. S’il est meilleur que les autres, il jouera. Si je l’estime moins bon que les autres, il attendra. Mais ce discours vaut pour Sakho comme pour les autres.” Si Mamadou Sakho attendait d’être rassuré sur son statut en interne après l’arrivée de Marquinhos, il lui faudra repasser. Blanc répète dans cet entretien sa volonté d’alléger l’effectif parisien…

- “Paris peut gagner la Ligue des champions comme Chelsea l’a fait au moment où l’on s’y attendait le moins. Tout dépend du tirage, du chapeau, des joueurs en forme à ce moment-là... Je préfère dire que Paris a le potentiel pour remporter la Ligue des champions.” La chose n’était pas affirmée de façon aussi nette la saison dernière à la même époque. Seul Leonardo avait implicitement évoqué cette hypothèse après le 8e de finale contre Valence. Au moins, Blanc ne refuse pas les obstacles.

“Je ne suis pas un fainéant, je suis un travailleur et je le revendique. S’il faut bosser jour et nuit, ce n’est pas un problème. Après, c’est vrai, je délègue beaucoup. Mais vous croyez que les grands entraîneurs font tout?” Jusqu’ici, Blanc n’était jamais allé aussi loin dans le déni d’une réputation qui lui colle à la peau depuis Bordeaux et les Bleus : il ne serait pas “habité” par sa fonction comme la plupart des managers. “Les gens se font une opinion de moi. Elle est vraie, elle est fausse, peu m’importe ” dit l’ancien sélectionneur.

L’instant drôle : quand Blanc politiquement incorrect sur le fair play financier

Ce n’est pas à proprement parler un grand moment d’humour ou de gaffe, mais Laurent Blanc frôle le dérapage quand il est interrogé sur les montants des transferts dans le football et le fair play financier. “Les plus grands économistes vous le diront, ce n’est basé sur rien du tout. (…) Ces chiffres ne veulent plus rien dire. Je me mets à la place des gens qui vivent cette période très délicate que nous traversons. Le mec qui n’est pas intéressé par le football doit se dire qu’on marche sur la tête.” Etonnant de la part d’un salarié de QSI. Puis Blanc se corrige : “Je dis ce que je pense mais je suis le premier à en profiter. Les joueurs en profitent aussi. ”

Croyant se reprendre, il enchaîne : “Le danger, ce n’est pas pour le PSG, c’est pour les clubs qui n’ont pas les moyens.” Avant de constater : “Un jour, ce sera plus qu’un football à deux vitesses que l’on aura”, et tant pis sur le PSG fait partie des équipes sans souci de braquet.

Interrogé enfin sur le fair-play financier, une règle qui, fondamentalement, va à l’encontre des intérêts immédiats du PSG, basés sur de lourds investissements initiaux, Blanc affirme : “Il faut pouvoir l’appliquer. Cela me paraît compliqué. Si tu les écoutes, les gens sont tous plus moraux les uns que les autres. Mais dès qu’il y a une règle, ils essaient de la contourner pour battre l’adversaire. C’est la réalité de la vie. Elle s’applique aussi dans le football. ” On doute que l’UEFA d’un côté, et QSI de l’autre, soient totalement à l’aise avec ces propos. Pour des raisons différentes.

Cet entretien est disponible dans les pages du Parisien daté de jeudi, vendu en kiosque, et sur le site internet du journal.