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Ligue 1 - Monaco : Ranieri ne méritait pas cela... voilà pourquoi

Geoffrey Steines

Mis à jour 20/05/2014 à 22:31 GMT+2

Limogé par l’ASM, Claudio Ranieri quitte le club avec un excellent bilan sur tous les plans. Preuve que le coach italien valait davantage de considération.

Claudio Ranieri incrédule lors de Valenciennes-Monaco (Ligue 1, 2013-2014)

Crédit: Panoramic

Cela ne faisait plus aucun doute depuis de longues semaines. Mais l’épilogue du feuilleton monégasque est arrivé mardi. Claudio Ranieri ne sera plus sur le banc de l’ASM la saison prochaine, comme l’a annoncé Vadim Vasilyev. Le vice-président directeur général était forcément gêné aux entournures au moment de justifier l’éviction d’un homme ayant fait passer le club de la principauté des bas-fonds de la L2 à la Ligue des champions en l’espace de 30 mois. Dans les prochains jours, les décideurs monégasques devraient lier leur destin à celui de Leonardo Jardim, jeune coach du Sporting Portugal (39 ans).
Cette situation n’est pas sans rappeler celle vécue par le PSG à la mi-saison en 2011-2012. Les dirigeants parisiens avaient limogé Antoine Kombouaré, au moment où leur équipe occupait la tête de la Ligue 1, pour placer Carlo Ancelotti sur le banc. A une différence majeure près : le Kanak n’était pas un homme sélectionné par les actionnaires qataris, débarqués dans la capitale six mois plus tôt et qui n’avaient pas touché au staff technique dans un premier temps. Ranieri est un choix de Rybolovlev, qui a sauvé le club de la faillite en janvier 2012 et immédiatement opté pour le coach italien afin de mener à bien le projet sportif. Après un an d’adaptation dans une formation en pleine restructuration, le Romain de naissance (62 ans) a façonné son groupe à son image pour le mener vers les sommets. Il a ainsi démontré pourquoi il était bien l’homme de la situation à Monaco.

Sa saison sans fausse note, ou presque

Que reprocher à Ranieri sur la saison ? Les éliminations en Coupes, à Reims (1-0) et à Guingamp (3-1 a.p.) ? Le caractère aléatoire de ces rencontres a toujours réservé des surprises et il est injuste de juger Ranieri sur ces deux défaites. Ses relations parfois tendues avec ses stars ? Ses clashs successifs avec James Rodriguez, Radamel Falcao ou encore Eric Abidal découlaient tous de performances très mitigées des principaux intéressés. Il est compliqué de lui imputer ce rendement insuffisant, d’autant qu’il a relancé James après des débuts poussifs sur le Rocher et que Falcao s’est gravement blessé mi-janvier.
Au final, les résultats parlent pour lui. Même s’il a disposé des moyens de ses ambitions (170 millions d’euros investis), il a rempli le principal objectif, très élevé pour un club promu, à savoir ramener l’ASM en Ligue des champions. Il est devenu le premier coach à terminer dans le Top 2 du championnat de France avec une équipe issue de l’échelon inférieur depuis 1977-1978 (Monaco champion). Avec 80 points, les Monégasques ont établi un nouveau record de points d’un deuxième en L1 et auraient été sacrés champions sept fois sur les douze dernières éditions. Le principal reproche à formuler à Ranieri est de tomber au mauvais endroit au mauvais moment, avec un PSG monstrueux en face de lui. Et pour rappel, l’ASM n’a pas perdu une fois en deux confrontations avec le double champion de France (deux nuls 1-1).

Son rôle dans la remontée en L1

Malgré des moyens démesurés pour la L2, y remporter le titre n’était pas une sinécure. Après avoir assuré sa montée lors de la dernière journée et terminé sur la deuxième marche du podium, le Lens version 2013-2014, grand favori du championnat, pourrait en témoigner. Monaco s’est arraché pour décrocher son Graal la saison passée et Ranieri a joué un rôle prépondérant dans cette conquête. Fin décembre 2012, l’ASM ne pointait qu'à la deuxième place, venait d'être éliminée à domicile par Troyes en Coupe de la Ligue et, surtout, lors du huitième tour de la Coupe de France par Bourg-Péronnas. En janvier, Ranieri a demandé trois renforts, "des locaux, connaissant la Ligue 2". Rivière, Medjani et surtout Obbadi, découvert à Troyes, ont débarqué. Le visage de l'équipe a radicalement évolué. Monaco est ainsi devenu champion de L2 avec six points d'avance. Du travail bien fait.
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FOOTBALL - 2012/2013 - Nîmes-Monaco - Ranieri

Crédit: Panoramic

Sa rigueur tactique et sa culture de la victoire

Clairement, l’ASM n’a pas toujours développé un jeu flamboyant cette saison. Si les Monégasques ont séduit tous les observateurs lors des premiers mois de compétition, ils ont davantage peiné à partir de février. Dans les moments plus difficiles, Ranieri a su trouver d’autres clés pour permettre à son groupe de poursuivre sa route. En se focalisant sur des options plus restrictives, il a aussi permis aux siens d’engranger des points dans l’optique d’une qualification directe pour la Ligue des champions. C’est aussi dans cette période-là qu’il a fait étalage de sa culture de la victoire, très à l’italienne. Durant le sprint final, l’ASM a gagné souvent sans briller, comme à Rennes (0-1), contre Sochaux (2-1) ou à Lyon (2-3). Reims se souvient avoir cédé dans les arrêts de jeu sur un but de Layvin Kurzawa (90e+5, 3-2). Des signes qui ne trompent pas et qui sont rarement le fruit du hasard.

Sa capacité d’adaptation aux événements

Ranieri l’a montré à de nombreuses reprises : il n’est pas un homme borné. En début de saison, il a recadré James Rodriguez pour son manque d’implication dans le travail défensif. Juste avant de lui confier les clés de l’équipe dans un 4-4-2 en losange taillé pour les qualités du Colombien. Fidèle à sa réputation d’éternel bâtisseur, qui lui avait valu le surnom de "Tinkerman" en Angleterre, Ranieri a donné sa chance à des jeunes joueurs et n’a jamais hésité à les lancer dans le grand bain. Yannick Ferreira-Carrasco, Lucas Ocampos ou encore Kurzawa ont tous bénéficié de la confiance du coach, au moins par périodes pour les deux premiers cités.
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Ranieri : "J'ai toujours eu confiance en James"

Il a aussi su faire oublier la blessure de Falcao. L’ancien buteur de l’Atlético Madrid a été victime d’une rupture du ligament croisé antérieur du genou gauche, dans un seizième de finale de Coupe de France d’apparence anodin, contre les amateurs de Chasselay. En interne, les mêmes qui lui demandaient "un beau parcours en Coupe" se sont ensuite offusqués de la présence de Falcao sur la pelouse de Gerland. Mais le plus gros transfert de l’histoire de l’ASM (60 millions d’euros) n’a pas manqué tant que ça à son équipe. Pour le suppléer, Ranieri a utilisé au mieux les qualités de Dimitar Berbatov, recruté pour six mois dans les dernières minutes du mercato hivernal, alors même qu’il n’était pas le premier choix de son coach. Le Bulgare a paru plus concerné que jamais par les tâches défensives et a prouvé à la Ligue 1 qu’il n’avait rien perdu de son talent. Ce n’était pas évident à l’instant de sa signature.

Son management juste avec ses joueurs

Parfois critiqué pour la gestion douteuse de ses stars, Ranieri est resté fidèle à sa ligne de conduite. Dans un effectif divisé entre les joueurs de renom, achetés à prix d’or sur le marché des transferts, et des éléments issus de L2 ou du centre de formation, le technicien italien a choisi de ne faire aucune différence. Cela a parfois entraîné une légère friture sur la ligne avec les cadres. Mais leurs courbes de performances sinusoïdales justifiaient souvent les coups de colère de Ranieri, qui a joué la carte de la franchise en toutes circonstances. Une attitude qui a finalement suscité l’adhésion. Pour preuve, la haie d’honneur réservé par les joueurs à leur coach après le nul contre Bordeaux samedi dernier (1-1) en clôture de la saison. Le groupe est resté soudé derrière son entraîneur. Jusqu’au bout.
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Falcao Ranieri Nantes-Monaco Ligue 1 2013/2014

Crédit: Panoramic

Son expérience et sa connaissance du foot européen

Après une honnête carrière de joueur, Ranieri a rapidement embrayé sur une vie de technicien. Il l’a débutée en 1987 et a dirigé nombre de grands clubs de sa carrière. Il s’est assis sur les bancs de Naples (1991-1993), de la Fiorentina (1993-1997), de Valence (1997-1999 puis 2004-2005), de l’Atlético Madrid (1999-2000), de Chelsea (2000-2004), de la Juventus (2007-2009), de l’AS Rome (2009-2011) ou encore de l’Inter Milan (2011-2012). Un CV qui parle de lui-même, même si son palmarès n’est pas forcément à la hauteur (la Coupe d’Espagne 1999 et la Coupe d’Italie 1996 comme trophées majeurs). Au cours de ses pérégrinations, Ranieri a également acquis une grosse expérience sur la scène européenne. Il y a dirigé 93 rencontres, dont 44 de Ligue des champions. Peu de coaches peuvent en revendiquer autant sur la planète foot.

Sa communication hors-pair

Pendant les deux saisons et demie passées en France, Ranieri a fait évoluer son comportement avec les medias. D’abord fermé, il laissait transpirer ses états d’âme. Souvent laconique en conférence de presse, il ne communiquait qu’en italien. Mais il a changé du tout au tout avec l’arrivée de Monaco en Ligue 1. Ce n’est pas un hasard si le technicien monégasque est rapidement devenu l’un des héros récurrents de notre Conf’ de Presque hebdomadaire. Dans un français approximatif qui faisait tout son charme, Ranieri a conquis son auditoire semaine après semaine. Il en disait juste assez pour donner du grain à moudre aux journalistes et pour faire passer un message à ses joueurs, tout en conservant une distance indispensable pour ne pas trahir les secrets du vestiaire. Il a même convié les suiveurs de l'ASM à un pot en fin de saison. Un sans-faute, tout simplement.

Son image positive pour le club

L’ASM bénéficie aujourd’hui d’une bonne réputation dans l’opinion publique, et surtout chez ceux qui suivent le football avec attention. Quand un club est possédé par un milliardaire russe aux finances pas toujours transparentes, une certaine défiance peut s’installer avec le public. Monaco a évité cet écueil et Ranieri n’y est pas étranger. Avec son sourire, son sens de la répartie, son analyse sans concession des matches de son équipe et sa faculté à lui donner une identité de jeu relativement attrayante, il n’a pas manqué l’opération séduction sur tous les plans. Il a parfaitement intégré que le sport n’était plus concentré uniquement sur le terrain et se jouait également dans la coulisse. Ce n’est pas la moindre de ses réussites avec l’ASM. Maintenant, la tâche de lui succéder s’annonce compliquée, parce qu’il faudra faire au moins aussi bien dans tous ses domaines. Un pari loin d’être gagné d’avance.
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