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Ligue 1 : Pourquoi Jardim est l'entraîneur dont Monaco a besoin

Nicolas Vilas

Mis à jour 06/06/2014 à 16:58 GMT+2

Leonardo Jardim sera le prochain entraîneur de l'ASM. Valeur montante, le technicien a un profil atypique en France mais qui a fait ses preuves.

Leonardo Jardim

Crédit: Panoramic

"Arrividerci" Claudio Ranieri et "bom dia" Leonardo Jardim. Le nouvel entraîneur monégasque sera portugais. Le conseiller sportif Luis Campos et les autres dirigeants de la Principauté sont allés débaucher leur nouveau technicien au Sporting. Jardim aura 40 ans le 1er août prochain. Depuis quelques jours, son discours sur son avenir à Lisbonne était trouble, crispé.
Après avoir partagé des "idées convergentes" avec son président, Bruno de Carvalho, il se montrait moins emballé dernièrement : "Je ne ferai de promesses à personne" ; "la saison prochaine je serai là… En principe". Du principe à la Principauté, il n’y a pas beaucoup plus qu'un pas. Et quelques millions. Lié aux Lisboètes jusqu’en 2015, Jardim était bloqué par une clause libératoire de 15 millions d’euros. La presse portugaise évoque un accord entre 3 et 5 millions. Le chiffre sera officialisé par les Lions une fois que le transfert sera officialisé (ndlr : en tant que club côté en bourse, le Sporting a une obligation de transparence sur ses comptes). Mais un club français qui paye pour avoir un coach, ce n’est pas banal. Et c’est normal parce que Jardim ne l’est pas non plus…
Pas un fils à papa
Leonardo Jardim, c'est avant tout une fulgurante et impressionnante ascension. Celle du gamin né au Venezuela, dans la bien-nommée ville de Barcelona. Il n’est encore qu’un gosse lorsque ses parents décident de retourner vivre à Madère. Leonardo grandit derrière le comptoir du restaurant familial. "Je n’étais pas un fils à papa, tient-il à préciser dans un entretien accordé, il y a un an, à maisfutebol. Je les aidais dans ce qu’il fallait et eux m’ont permis de poursuivre mes études". Les journées de Leo sont sportives et bien fournies. Il pratique simultanément le hand et le football, durant de longues années. Son cœur balance vers ses pieds mais il continue de penser avec sa tête.
L’ado évolue défenseur et sa réelle passion est déjà axée sur la tactique, l’entraînement et ses méthodes. C’est donc la case STAPS qu’il coche lorsqu’il intègre la fac de Madère. "Mes parents auraient préféré que je choisisse une autre voie. J’étais bon élève", poursuit-il. S’il n’avait fait carrière dans le foot,  il aurait opté pour un métier en rapport avec la mer, la biologie qu’il "adore". Il précise : "J’adorais les documentaires de Cousteau". Il raffolera donc du Musée océanographique de Monaco qui fut présidé par "Le Commandant".
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Jardim va dire adieu au Sporting pour débarquer à Monaco

Crédit: AFP

Un profil atypique

Rien ne prédestinait Leonardo Jardim à devenir un grand entraîneur. Si ce n’est sa propre conviction. Le Portugais n’a pas le profil-type de l’entraîneur de Ligue 1. Contrairement à l’immense majorité de ses nouveaux confrères, il n’a pas été joueur pro. Plus encore que Guy Roux et Elie Baup - qui ont évolué à un bon niveau comme amateurs - Gérard Houllier peut comprendre. Jardim est un "Professor", comme Jesualdo, Mourinho Villas Boas ou Queiroz. L’ex-sélectionneur du Portugal est d’ailleurs le "modèle" de Jardim qui, du temps où il griffonnait ses premières compos, assistait, admiratif, aux succès mondiaux des juniors portugais en 1989 et 1991.
Et il rêve d’une carrière aussi exotique que lui (Queiroz a officié en Afrique du Sud, en Espagne, en Angleterre, au Japon, aux Etats-Unis, aux Emirats Arabes Unis et est actuellement sélectionneur en Iran). Il aimerait lui aussi "expérimenter la J-league, la Premier League et les pays arabes". Mais comme un AVB, il aspire à une carrière courte : "Je veux arrêter à 45 ans". Car il espère ainsi s’adonner à ses autres passions : la cuisine, le cinéma et les joggings matinaux. Il aura de quoi se régaler sur la côte monégasque qui en demande autant en retour.

Des résultats probants

En se posant prochainement sur le Rocher, Jardim devrait franchir une nouvelle étape dans un parcours ponctué de succès. Il vient de réconcilier le Sporting avec la Ligue des champions, après cinq ans d’abstinence. Une deuxième place en championnat, devant le FC Porto, malgré un budget divisé de moitié (25 millions d’euros). Il faut remonter à plus de dix ans pour trouver pareil taux de succès (66,7%). La victoire, Leonardo la cultive. Il n’a que 28 ans lorsqu’il remporte la Coupe de Madère avec Camacha, sa première aventure en tant que principal. A Chaves, il est champion de D3 2009 ; champion de D2 au Beira-Mar en 2010 ; c’est bientôt le grand saut au Sporting de Braga.
Il signe un contrat de trois ans et (déjà) une clause libératoire de deux millions d’euros. Il accroche le podium en 2012 et atteint, pour la première fois de l’histoire du club, les seizièmes de la Ligue Europa (en passant par la phase de groupes). La rupture avec le président Salvador sera brutale. Dans un entretien accordé en fin de saison au journal O JOGO, Jardim affirme avoir "une relation strictement professionnelle" avec son patron. L’intéressé n’apprécie pas. Rupture. La Grèce lui tend les bras. Le super-titré Olympiakos l’engage. Le club empoche le doublé Coupe - Championnat en 2013. Mais Leonardo a été abandonné à mi-chemin. Viré à la trêve alors que son équipe compte dix points d’avance. Une folle rumeur circule : il aurait couché avec la femme du président. Il dément et corrige : "J’ai été renvoyé à cause des résultats". Un choix politique. Tel un Kombouaré ou… un Ranieri…

"Un bon staff" snobé par Evian et Montpellier

Ces lignes, Jardim ne les a pas écrites que de sa main. Le technicien est bien entouré. "C’est un très bon et il a un bon staff, assure Djamel Abdoun qui a œuvré sous ses ordres à Athènes. C’est bon mec, il travaille bien avec son équipe". Voilà plusieurs années que le Portugais ne voyage jamais sans ses fidèles Antonio Vieira (adjoint), Miguel Moita (observateur) et Nélson Caldeira (adjoint). Et ce dernier maîtrise à merveille le français. Si on en croit son CV officiel, Jardim a quelques notions de notre langue. Il y a un an, alors que lui et sa bande connaissaient un rare période d’inactivité, leurs noms sont soufflés aux dirigeants d’Evian TG et de Montpellier. Sans suite…
Il y a quelques semaines, c’est l’OM qui y songeait avant de se rabattre sur le libre (et donc gratuit) Marcelo Bielsa. Une équipe soudée qui a aussi trimé. Lorsque Jardim s’est installé sur le continent, à Chaves, Vieira et Moita l’ont suivi. "Je n’avais pas les conditions financières pour avoir ma famille avec moi", confiait le coach. A Aveiro, d’autres galères d’argent l’attendent. Lui et ses hommes ont attendu quatre mois - et la montée en Liga - avant d’être payés. C’était il y a quatre ans, seulement…
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Leonardo Jardim, Sporting Sportugal, 2014

Crédit: AFP

Le profil idéal : "Un entraîneur, pas un manager"

L’AS Monaco était en quête d’un entraîneur. Et pas d’un manager. A l’inverse de son ancien voisin du Benfica, Jorge Jesus annoncé un temps à Louis II, Leonardo Jardim assume son rôle de technicien. Et il s’y tient. En 2011 alors que les dirigeants du Beira-Mar viennent de vendre leur buteur Ronny en Chine en pleine saison, Jardim se retrouve dans une situation un peu caricaturale et il lance : "Je suis un entraîneur, pas un manager". A Braga, il bossait sous la coupe d’un directeur sportif (Fernando Couto) et en collaboration avec plusieurs coordinateurs sportifs ; et, au Sporting, il devait composer avec l’omniprésent président Bruno de Carvalho et un DG du foot, Augusto Inacio. Les deux dirigeants s’assoient d’ailleurs souvent sur le banc, les jours de matches. Là-dessus, pas de doutes, il sera plus tranquille à Monaco…
Mais, n’allez pas croire que Jardim est un soumis. Son départ surprise de Braga ou ses dernières négociations avec les Lions montrent qu’il a du mordant. Quant au jeu, Jardim est un adepte du 4-3-3. Il connaît à merveille certains des joueurs majeurs de Monaco. Il a entraîné Elderson (à Braga) et a souvent croisé Moutinho, James ou Falcao. Et tous ont été habitués à évoluer dans ce système. Entre ses débuts à Madère et sa dernière pige au grand Sporting, il a en tout cas déjà démontré qu’il était capable de responsabiliser des jeunes (Hélder Barbosa, William Carvalho, Mané, Yohan Tavares…), de (re)lancer des revanchards (Adrien, Miguel Lopes, Lima, Djamal…) mais aussi d’optimiser le rendement des talents et ego de son vestiaire (Djebbour, Abdoun, Mitroglu…) et, ce, parfois sous une importante pression.
Un malin qui sait se faire respecter
Dans sa gestion au quotidien, Leonardo Jardim n’est pas du genre à attiser les conflits. Le "Madeirense" est plutôt un diplomate. Pour Djamal qui a bossé avec lui au Beira-Mar et à Braga : "Jardim est malin. Il ne va pas clasher. Il va savoir utiliser à bon escient chaque joueur et il saura comment lui parler". Même constat chez le Franco-Portugais Yohan Tavares qui l’a connu à Aveiro : "C’est quelqu’un de malin. Quand il prend une décision, il a réfléchi à tout en amont et à tout ce que cela va impliquer par la suite. Il sait gérer son groupe, à sa manière. Et partout où il passe, il obtient des résultats". L’international algérien Djamel Abdoun, parle d’ "un bon mec avec du charisme".
Marié à une psy, Leonardo Jardim saurait donc interpréter, déceler, gérer les caractères et personnalités de son vestiaire et celles de son environnement. "A l’Olympiakos, il a été à la tête d’un club où il y a une grosse pression, avec des joueurs importants", rappelle Adboun. Et même Emmanuel Imorou qui n’en garde pas un grand souvenir à Braga - "Il m’a un peu boycotté à mon retour de blessure" - l’admet : "Il sait se faire respecter". Un bosseur, peu expressif ; un insulaire, diront les plus caricaturistes, à l’image de son archipel de Madère. Les plus optimistes y verront un espoir, un appât, un mirage (?) pour attirer d’ici deux ans - durée du contrat promis à Jardim - Cristiano Ronaldo qui va maintenant partager un soupçon de notoriété avec le nouveau pensionnaire du Rocher.
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