L'OM face à son double lillois

C'est souvent dans les tribunes que l'on analyse le mieux les situations de son club. Thierry, jeune responsable d'un groupe de supporters en virage Nord, porte un regard très juste sur le mimétisme qui sévit entre son club, l'OM, et Lille. "On a l'impression qu'ils nous piquent toutes nos idées, lance ce quadragénaire au crâne aussi lisse que José Anigo. C'est comme s'ils prenaient exemple sur nous pour mettre les mêmes choses en place… mais avec six mois de retard." Cette punchline traduit le sentiment du copié-collé réalisé par le club nordiste. Et l'OM va peut-être effectivement affronter son double, vendredi…

Si la ressemblance et les deux clubs interpelle autant les supporters, c'est d'abord parce que Gérard Lopez a failli venir à Marseille plutôt qu'à Lille. "Le propriétaire du LOSC actuel aurait pu être celui de l'OM, sourit Rudi Garcia, grand connaisseur de la maison nordiste pour l'avoir habitée pendant onze ans. Mais finalement il est allé à Lille. Et nos projets sont différents." Au Nord, on mise davantage sur la revente de jeunes prodiges pour remplir les caisses. Au Sud, on s'imagine recruter des joueurs dans la force de l'âge pour concurrencer Paris. C'est le cas de Dimitri Payet, ancien Lillois, et figure de proue du projet McCourt. "On part sur un projet cohérent, reconnait Payet sans le comparer aux idées du LOSC. Mais on sait que ça va prendre du temps. Le projet de Paris a débuté en 2011. Et ils n'ont pas encore réussi à obtenir ce qu'ils voulaient…"

Les nouveaux projets marseillais et lillois débutent à quelques mois d'intervalle. Et la saison prochaine sera déjà un premier juge de paix pour savoir qui a pris de l'avance sur l'autre… "Plus on est nombreux à courir après le PSG, plus le football français pourra briller en Europe, analyse Garcia, conscient qu'il va devoir compter le LOSC dans les prétendants à une place dans le top 5. Les places vont être chères en Coupe d'Europe." Pour mettre en place le projet du LOSC, Lopez a tout de suite pensé à Marcelo Bielsa. L'ancien coach de l'OM, véritable icône à Marseille, prendra ses quartiers l'été prochain. Exactement comme il l'avait fait dans la cité phocéenne. El Loco avait débarqué dans les tribunes du Vélodrome au mois d'avril pour ne prendre les rênes de l'équipe qu'en juillet. Là encore, le parallèle est frappant.

Pour donner encore plus de sel à la rencontre de vendredi, Lille a pris soin de placer Franck Passi dans le rôle de l'entraîneur intérimaire. Un poste qu'il occupait déjà à Marseille avant de laisser son fauteuil à Rudi Garcia. "Je suis content pour Franck, explique Payet. Ça me fait plaisir qu'il puisse retrouver un poste d'entraîneur. On se fera la bise avant le match et je lui serrerai la main à la fin quand on aura gagné… Mais c'est vrai qu'il a l'avantage de bien connaître l'effectif de Marseille." Et Garcia d'ajouter : "c'est un beau clin d'oeil du destin de pouvoir jouer contre lui lors de mon retour à Lille."

Outre Payet, l'OM compte dans son effectif un autre ancien Lillois. En forme internationale, Florian Thauvin revient dans un club qu'il a quitté en gagnant son bras de fer. L'accueil du stade Pierre Mauroy de Lille devrait être à nouveau glacial. Comme la première fois où le milieu de terrain avait remis les pieds en terre nordiste. Franck Passi appelle d'ailleurs ses supporters à faire beaucoup de bruit face à l'OM. "Un stade où il y a beaucoup d'ambiance avec des supporters qui crient, ce sont les conditions requises pour un grand match, rappelle Passi, fin connaisseur du pouvoir des fans sur les résultats des équipes. On espère qu'il y aura beaucoup de supporters…" Et Franck Béria d'apporter de l'eau au moulin de son coach. "Avec Marseille, c'est super car il y a une vraie ferveur, note le défenseur nordiste. C'est un club mythique. Et il y a un côté attractif car les supporters marseillais sont présents partout en France. Ça peut nous permettre de gagner et débuter une série."

Si Lille et l'OM possèdent un grand nombre de points communs, le LOSC envie l'ambiance du Vélodrome. Et l'imposante population de sympathisants marseillais à travers l'hexagone. "Si Lille veut que ça marche, il devra aussi vendre du rêve à ses supporters, lâche encore Thierry, jamais avare de métaphore bien sentie. En prenant Bielsa, ils ont déjà choisi le bon gars pour faire venir du monde au stade. Jamais je ne me suis autant régalé qu'avec lui. Maintenant, il faudra envoyer du lourd pour recruter des bons joueurs. A Marseille, Bielsa nous a lâché car il n'avait plus d'équipe…" Un rappel qui doit interpeller les Lillois. Les supporters nordistes découvriront la saison prochaine un entraîneur au tempérament déroutant, typiquement… marseillais.