Alex Ferguson et José Mourinho, les meilleurs ennemis du monde

Leur histoire commence sur un malentendu. Presqu'un mythe qui n'épouse donc qu’en partie la réalité. Ce 25 février 2004 au stade du Dragon, Porto vient de mettre à genoux Manchester United (2-1) en huitième de finale aller de la Ligue des champions. La joie irrévérencieuse de Mourinho n'est pas du goût de Ferguson. L’Ecossais ne serre pas la main du coach portugais. Pas devant les caméras en tout cas : il le fera quelques secondes plus tard. Cette anecdote est symptomatique de la relation qui unit depuis neuf ans deux des plus grands entraîneurs du monde. Ferguson-Mourinho, c'est l'histoire d'une rivalité de 14 rencontres au cours de laquelle le Portugais s'est imposé comme la bête noire de Sir Alex.

Le bilan penche largement en faveur de Mou avec six victoires, six nuls pour seulement deux défaites. Bien sûr, le sommet de leur rivalité est atteint lorsque Mourinho rejoint Chelsea. Au cours de ses trois années passées en Premier League (2004-septembre 2007), le Portugais amasse six trophées dont deux championnats contre deux pour MU (un championnat et un Community Shield). En dix confrontations, Manchester n'a battu qu'à une reprise les Blues version Mourinho. Ils sont rares les managers à avoir fait de l'ombre à Ferguson depuis 1986 en Premier League, Mourinho en fait partie.

Aujourd'hui, Ferguson ne lui en tient plus rigueur. Leur relation était certes partie sur de mauvaises bases : "Je serais triste aussi si mon équipe était si clairement dominée par une formation qui n'a été bâtie qu'avec 10% de mon budget", paradait Mourinho après le succès de Porto en 2004. Si Ferguson le jugeait comme un arrogant en 2004, lors de son arrivée à Chelsea, il est devenu désormais son ami : "Je me rappelle sa première conférence de presse avec Chelsea lorsqu’il s’était présenté comme le Special One. Je m’étais dit : "Il a des couilles."

Leurs retrouvailles, trois ans après leur dernière confrontation en huitième de finale de la Ligue des champions, où MU avait pris le dessus sur l'Inter (0-0, 2-0), se feront sans étincelle. Pourtant l'enjeu est énorme car cette campagne en Ligue des champions revêt un caractère particulier pour chacun des deux coaches. Mourinho peut devenir le premier entraîneur à remporter la C1 avec trois clubs différents, Ferguson a l'occasion d'égaler le record de Bob Paisley en remportant trois fois la Ligue des champions avec le même club. Mais ne comptez pas sur l'un pour miner le terrain de l'autre. 

Les deux hommes ont désormais l'habitude de partager de bonnes bouteilles de vin chaque fois qu'ils se retrouvent. La dernière fois au Manchester Lowry Hôtel avant le nul du Real à City en novembre dernier (1-1). Cette amitié improbable s'étale désormais à longueur d'interviews. Alex Ferguson reconnait en Mourinho son propre perfectionnisme : "José peut diriger n’importe quelle équipe et entraîner absolument partout. Son palmarès est incroyable. Quel âge a-t-il, 50 ans ? Soit 20 de moins que moi. S’il continue à ce rythme, il aura 42 titres de plus à l’âge que j’ai aujourd’hui." Et José Mourinho admire la carrière de Sir Alex et aimerait laisser la même empreinte dans l'histoire : "Ferguson est spécial. C’est un personnage historique du football mondial et un de mes meilleurs amis dans le milieu."

The Special One a une idée derrière la tête et un rêve ultime : remplacer Ferguson sur le banc de MU. Ferguson l'a déjà adoubé : "Je ne sais pas qui sera le futur entraîneur de Manchester United, mais Mourinho peut diriger n'importe quelle équipe." Reste que le comportement bouillonnant du fantasque Portugais et son incapacité à s'inscrire à long terme dans le projet d'un club n'en font pas vraiment le candidat idéal à la succession. Invité à réagir sur le sujet en conférence de presse ce mardi, Mourinho s'en est sorti avec son sens de la formule : "On va finir notre carrière au même moment. Moi à 70, lui à 90 ans."