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Petit chez les grands et grand chez les petits, paradoxe ou réalité du foot anglais ?

Bruno Constant

Mis à jour 13/04/2017 à 08:50 GMT+2

LIGUE DES CHAMPIONS - Tous les espoirs du football anglais en Ligue des Champions reposent sur son représentant le plus inattendu, Leicester, tandis que son plus riche, Manchester United, tentera de défendre son seul honneur en Ligue Europa.

Paul Pogba face à Riyad Mahrez lors de Leicester City - Manchester United.

Crédit: Panoramic

Quelques jours après l’entrée en vigueur du Brexit, l’Angleterre n’a pas encore totalement dit adieu à l’Europe. Mais on n’est plus à un paradoxe près lorsqu’il s’agit du football anglais. Au-delà de sa puissance financière et de la domination de son Top 6 sur le reste de la classe, d’une équipe nationale en berne et de l’absence de grands entraîneurs, le football anglais réserve encore et toujours quelques bizarreries. Il n’est pas rare – et même plutôt fréquent ces temps-ci – qu’un manager soit remercié par son club quelques mois après lui avoir offert le titre. En fait, les deux derniers (Mourinho et Ranieri).
Aujourd’hui, il est amusant de noter que tous les espoirs du foot anglais dans la plus prestigieuse des compétitions européennes reposent sur le moins puissant et le plus inattendu (Leicester) tandis que son club le plus riche (Manchester United) – et même le plus riche du monde – rêve de remporter la coupe dont tout le monde se moque, pour rester poli.
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La joie des joueurs de Leicester contre Séville.

Crédit: AFP

La réussite de Leicester - car se qualifier pour les quarts de finale de la Ligue des Champions ne tient pas à la chance, pas plus que devenir champion d’Angleterre – est une belle leçon de morale. Celle d’une équipe qui se contente de jouer sur ses qualités plutôt que sur l’ambition parfois démesurée de ses compatriotes dans le jeu. Il y a dans le parcours de Leicester l’image du Petit Poucet qui aurait tracé sa route grâce à de petits cailloux posés méthodiquement là où Tottenham, Arsenal et Manchester City se sont perdus en chemin. Un caillou dans la chaussure qui agace beaucoup de ses adversaires européens.
Car, soyons honnêtes, beaucoup prédisait aux Foxes une humiliation mémorable sur la scène européenne symbole d’une Premier League surcotée. Manque de bol, Leicester est sorti en tête de son groupe avant d’éliminer l’ex troisième de Liga (Séville) dont on vantait le génie et la beauté du jeu. Quel joli pied de nez ! Il n’y a pas plus de vérité sur la valeur d’un championnat quand ce sont toujours les mêmes clubs, "historiques", dans le dernier carré. Quant l’opposition révèle simplement le plus fort des deux clubs sur deux rencontres. Du moment.
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Islam Slimani

Crédit: AFP

Leicester, de la relégation au dernier carré de la C1 en deux ans ?

Au passage, savez-vous où était Leicester il y a deux ans jour pour jour ? Bon dernier du championnat d’Angleterre ! Quasiment condamné à la relégation avec six points de retard sur la zone de maintien à sept journées de la fin. C’est donc une drôle de fable que ce nouveau chapitre dans le conte de fées de Leicester désormais mené par un entraineur nommé Shakespeare. Il y a encore des incongruités à voir une équipe anglaise attaquer une rencontre sans réelle enjeu – Leicester comptait 8 points d’avance sur le premier relégable à 8 journées de la fin - avec une telle férocité que celle des Foxes à Goodison Park, dimanche, trois jours seulement avant un combat acharné sur le terrain miné de l’équipe de Diego Simeone. Heureusement, son entraineur avait prévu le coup en laissant souffler cinq titulaires probables à Vicente Calderon (Simpson et Mahrez sur le banc, Fuchs, Ndidi et Okazaki à la maison tandis que captain’ Morgan est blessé au dos).
Avant sa défaite à Everton (2-4), Leicester restait sur une belle série de cinq succès consécutifs faisant de son nouveau guide le premier manager anglais à remporter ses cinq premiers matches et échouant à une marche du record d’Ancelotti et Guardiola (six avec Chelsea et Manchester City). Cela démontre un peu plus l’effet provoqué par le départ de Claudio Ranieri qui, pour la première fois, lundi sur Sky, est revenu sur les raisons de son départ révélant que quelqu’un avait cherché à le pousser dehors depuis la saison… passée, celle du titre. Depuis le "sack" de l’Italien, l’équipe de Leicester a recouvré ce qui faisait d’elle une forteresse difficilement prenable et aux contres redoutables.
Les coéquipiers de Jamie Vardy, à l’efficacité retrouvée (6 buts lors de ses 8 derniers matches en club), n’ont rien à perdre face à l’Atlético Madrid d’Antoine Griezmann qui aurait, de toute façon, été favori face à n’importe quel autre club anglais. Il lui faudra résister, plier parfois, sans doute concéder aussi sans jamais perdre à l’esprit l’importance du but à l’extérieur. Ce sera sans doute plus compliqué encore face à un adversaire moins joueur que Séville mais les Colchoneros devront faire le jeu. Car il y a quelque chose de l’Atletico dans cette équipe de Leicester. Claudio Ranieri a d’ailleurs confié avoir bâti cette équipe des Foxes sur le modèle de l’Atletico de Simeone, bien plus italienne qu’espagnole, selon lui. Notamment en raison de l’influence du technicien argentin lors de ses années à l’Inter Milan et la Lazio Rome.
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Simeone : ''Leicester ressemble a l'Atlético''

Face à Chelsea, City et Arsenal, Mourinho peut sauver sa saison et enfoncer Guardiola et Wenger

De l’autre côté du miroir européen, moins reluisant celui-là, en Ligue Europa, Manchester United défendra bien plus son honneur que celui du football anglais. A voir la lutte féroce que se livrent Liverpool, Manchester City, Arsenal et les Red Devils (5e à 4 points du 4e) pour les deux dernières places dans le Top 4 occupées par Chelsea et Tottenham, cette compétition de seconde zone européenne représente peut-être la meilleure chance du club d’assurer sa présence en Ligue des Champions la saison prochaine.
Il y a d’ailleurs une part d’ironie à voir le club mancunien rêver à ce point de remporter une compétition que ses supporters moquaient il y a peu. En 2011, les fans de United chantaient le tube "Thursday Nights, Channel 5" ("Jeudis soirs sur Channel 5", la chaîne qui, à l’époque, retransmettait la compétition) à leurs homologues et grands rivaux de Liverpool, condamnés à la petite cour européenne. Un chant repris depuis par beaucoup de leurs adversaires à l’encontre des Red Devils.
Aujourd’hui, il est assez étonnant d’entendre que United est le grand favori de l’Europa League, d’autant qu’il leur faudra se méfier d’Anderlecht et de la nouvelle pépite belge Youri Tielemans. Cela tient davantage à son nom ronflant, à son histoire, son palmarès, à son titre non honorifique de club le plus riche du monde (devant le Real Madrid) et au nom de ses adversaires potentiels à la victoire finale (Lyon, Besiktas, Celta Vigo) qu’à ses performances sur le terrain.
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José Mourinho, manager de Manchester United.

Crédit: Panoramic

Accroché pour la huitième fois de la saison à Old Trafford, mardi face à Everton (1-1), Manchester United continue à décevoir et a parfois donné l’impression de se contenter du minimum face à une équipe de Sunderland réduite à dix pendant toute la seconde période, dimanche (3-0), n’enfonçant réellement le clou qu’à la 89e minute par Rashford, et alors qu’ils auraient pu profiter de l’occasion pour accentuer une différence de buts qui risque d’être décisive dans le décompte final (MU est à +22 contre +25 pour City). A ce rythme-là, Manchester United, toujours à portée sans jamais y mettre un pied depuis le 12 septembre, risque de manquer le Top 4 pour la seconde année consécutive et José Mourinho d’imiter Louis Van Gaal remercié justement pour avoir échoué sur ce terrain-là.
En revanche, José Mourinho a une opportunité en or de sauver une saison décevante. Après avoir glané un titre (la Coupe de la Ligue), il peut dans les semaines à venir relancer la course au titre en battant le club qui l’a limogé l’an passé (Chelsea), dimanche à Old Trafford, et prendre la place de Pep Guardiola dans le Top 4 en remportant le derby de Manchester, le 27 avril à l’Etihad, et enfoncer définitivement son pire ennemi, Arsène Wenger, le 7 mai à l’Emirates, avant, peut-être, d’offrir un trophée européen à son club.
Bruno Constant fut le correspondant de L'Equipe en Angleterre de 2007 à 2016. Il collabore aujourd'hui avec RTL, Europe 1 et Rfi en tant que spécialiste du football anglais et vous livre chaque sa semaine sa chronique sur la culture foot de Sa Majesté.
Pour approfondir le sujet, retrouvez dès mon Podcast 100% foot anglais sur l'actualité de la Premier League et du football britannique
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