Liverpool - Bordeaux : Ils n'ont pas le même maillot, mais ils ont une même passion

Deux supporters, deux clubs, mais un point commun : celui de traverser régulièrement la Manche pour encourager leur équipe. Benoit vit à Bordeaux et ne jure que par le rouge, celui des Reds de Liverpool, qu'il n'échangerait pour rien au monde. Christopher est lui originaire de Chester, à une trentaine de kilomètres de Liverpool mais voue une passion sans mesure pour les Girondins de Bordeaux.

Pour tenter de comprendre l'irrationnel, il faut remonter loin, très loin dans le temps. Une vingtaine d'années pour l'Anglais, Christopher, qui découvre pour la première fois le stade Chaban-Delmas (le Parc Lescure à l'époque, NDLR), lors d'un voyage dans la région. "Ma femme est professeur de français, explique le supporter bordelais. Comme beaucoup d’Anglais, nous allions en vacances en Dordogne. Un jour, je suis allé voir un match des Girondins dans le virage sud". Le professeur de latin, qui maîtrise désormais parfaitement la langue de Molière, est tout de suite séduit. "J’ai été surpris par l’ambiance et la passion des supporters. En plus, sur le terrain, Bordeaux vivait une grande époque,c'était fantastique."

C'est un voyage dans l'autre sens qui permettra au Français Benoit, alors âgé de 12 ans, de découvrir le football anglais. "J'ai assisté à un match de troisième division, précise-t-il. Il y avait 25 000 personnes dans le stade, les tribunes étaient pleines, j'étais impressionné." Il s'intéresse d'abord à la Premier League puis se tourne naturellement vers Liverpool dans les années 1990, avant de se rendre seul à Anfield à partir des années 2000.

Depuis, les deux passionnés multiplient les allers-retours entre la France et l'Angleterre et suivent même régulièrement leur équipe aux quatre coins de l'Europe. "Lorsque Liverpool est qualifié en Coupe d'Europe, la première chose que je regarde en début de saison, c'est le tirage au sort pour savoir où je vais pouvoir voyager," sourit Benoit.

Le Français s'est déjà rendu à Milan, Florence, Madrid, Barcelone et même Istanbul pour la fameuse finale de la Ligue des Champions 2005. Mais son plus grand souvenir reste la demi-finale retour à Anfield cette même année face à Chelsea. "Je n'avais pas pris mes places car je travaillais, raconte-t-il. La veille du match, je n'arrivais pas à dormir, je ne pensais qu'à cette rencontre que j'allais rater.Pendant la nuit, j'ai pris ma voiture, je ne suis pas allé travailler et je me suis rendu en Angleterre." Il finit par acheter son billet au marché noir devant le stade pour un montant avoisinant les 900 euros.

Christopher, lui aussi, en a fait des folies pour encourager les Girondins. La dernière date du mois d'août. L'Anglais, avale alors 6000 kilomètres et se rend à Almaty au Kazakhstan, pour assister au déplacement le plus long d'un club français en Coupe d'Europe. "Je fais une vingtaine de déplacements par an, précise-t-il. Mes amis à Bordeaux disent que je suis un peu fou, sourit-il. Mais ils comprennent aussi pourquoi je préfère supporter une équipe française."

Cet intérêt pour les Girondins et le football français réside principalement dans un désenchantement vis-à-vis de la Premier League. "En Angleterre, l’ambiance est de plus en plus calme, aseptisée, déplore Christopher. Je n’aime pas la Premier League car il y a trop de business. Le prix des places est exorbitant. On ne pense pas aux fans et j’ai peur que les nouvelles générations de supporters ne puissent plus aller au stade."

Benoit rejoint le supporter des Girondins et préfère désormais accompagner les Reds dans leurs déplacements européens pour une ambiance plus "authentique". Il estime cependant que l'herbe est toujours plus verte dans les stades de Premier League, en particulier à Liverpool. "Il y a un état d’esprit propre à ce club, décrit-il. Et puis, quand vous vous baladez dans les rues, vous vous rendez compte que c’est une ville qui respire le football. Beaucoup de gens portent des maillots du club. En France, c’est rarement le cas et on a tendance à supporter son équipe uniquement lorsque les résultats sont au rendez-vous. A Liverpool, on essaye d’être toujours derrière le club."

Les deux supporters se rejoignent sur un autre point, celui des idoles : Jamie Carragher pour Benoit, Marc Planus pour Christopher. Deux défenseurs centraux, deux joueurs symboles d'un certain football, celui des valeurs et de la fidélité que nos deux supporters espèrent retrouver à chaque fois qu'ils traversent la Manche.