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Match amical - Italie-Angleterre : Les "oriundi", le débat qui n’en finit plus d’agiter l’Italie

Geoffrey Steines

Mis à jour 31/03/2015 à 13:04 GMT+2

Relancé par les déclarations de Roberto Mancini et le but d’Eder en Bulgarie le week-end dernier, le débat sur les "oriundi" a repris de plus belle en Italie. La question de l’utilisation de ces joueurs nés à l’étranger tiraille le football transalpin. Mais les sélectionneurs n’ont pas vraiment d’autre choix que de faire appel à eux au moment de puiser dans un réservoir réduit.

Eder se souviendra de sa première sélection avec l'Italie

Crédit: AFP

La France n’a pas le monopole du débat sur les binationaux. L’Italie se déchire tout autant sur cette question et ça ne date pas d’hier. La seule différence, c’est leur dénomination : elle les appelle "oriundi", mot tiré du latin "oriundum", qui signifie naître ou tirer son origine. Jamais vraiment enterrée, la polémique a refait surface au moment de la dernière liste d’Antonio Conte. Le sélectionneur italien a alors convoqué Eder (né au Brésil) et Franco Vazquez (né en Argentine, d’une mère… italienne) pour les deux matches de la Nazionale en mars. Le premier but en sélection de l’attaquant de la Sampdoria, qui a permis à l’Italie d’éviter la défaite en Bulgarie samedi (2-2), a calmé le début d’incendie. Il pourrait même lui ouvrir les portes d’une titularisation en amical mardi face à l’Angleterre (20h50).
Mais les discussions sur le sujet ne s’arrêteront certainement pas là. Roberto Mancini a lancé les hostilités dans les colonnes de la Gazzetta dello Sport la semaine passée. L’entraîneur de l’Inter a un avis tranché sur la question et le revendique. "L'équipe nationale d'Italie doit être italienne, a soufflé l’ancien attaquant de la sélection transalpine (quatre buts en trente-six capes). Ce n'est que mon opinion. Un joueur italien mérite de jouer en Nazionale, alors que celui qui n'est pas né en Italie, même s'il a des parents italiens, ne le mérite pas." "Je le respecte et je respecte aussi son opinion, mais cette histoire est une polémique inutile, a répondu Eder dans la foulée de son but. Je n'ai pas choisi ce maillot faute de mieux. Je suis content d'être avec la Squadra Azzurra."
Sampnazionale : Eder ! C'est vrai que les Oriundi ne sont pas utiles à l'Italie et aux Italiens... Faisons parler les faits : Félicitation mon Eder !

74% des internautes de la Gazzetta d’accord avec Mancini

Mais l’opinion de Mancini trouve un réel écho au sein de la population. Selon un sondage publié par le quotidien italien en réponse à cet entretien, 74% des internautes ayant pris la peine de répondre à la question se disent en accord avec les propos de Mancini. Preuve que le débat agite le pays, le monde politique s’en est même emparé, par l’intermédiaire de Matteo Salvini. "Que des Italiens en azzurro", a twitté le chef de la Ligue du Nord, parti nationaliste. "L’immigration est un sujet social majeur en Italie, donc en parler permet de faire les gros titres, nous précise Luca Stacul, membre de la rédaction italienne d’Eurosport. Mais le football reste du football et ce qui compte est la qualité des joueurs sur le terrain."
Avec quarante-cinq "oriundi" convoqués dans l’histoire de la sélection italienne, le phénomène n’est pas nouveau et il ne s’est pas forcément accéléré ces dernières années. Il s’est seulement relancé au cœur des années 2000, sous l’impulsion de Mauro Camoranesi, "oriundo" le plus capé de tous les temps avec cinquante-cinq sélections. Né à Tandil et débarqué en Italie à 24 ans, l’ancien de la Juventus a toujours fait l’unanimité de l’autre côté des Alpes. Par ses performances, et surtout grâce à son titre de champion du monde en 2006. Le hic, comme en France (et comme partout), c’est quand la greffe prend moins bien. Ce qui est le cas ces dernières années. Depuis une bonne décennie, en dehors de Thiago Motta, aucun ne s’est imposé comme un titulaire indiscutable et tous ont déçu à des degrés divers.
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Alessio Cerci et Thiago Motta lors d'un entraînement avec l'Italie, avant la Coupe du monde 2014

Crédit: AFP

Amauri et Osvaldo ont particulièrement marqué les esprits, en confessant sans se cacher avoir opté pour l’Italie par opportunité plus que par conviction. La sélection s’en est retrouvé affaiblie et l’échec cuisant au Mondial brésilien, avec une élimination dès le premier tour, est venue renforcer la conviction de certains que la Nazionale ne ferait pas moins bien avec des éléments nés au pays. "Si c’est pour sélectionner un joueur moyen, ils considèrent qu’il vaut mieux prendre un jeune Italien de naissance", explique Luca Stacul. Sauf que Conte doit se gratter la tête à l’instant de retenir 23 joueurs. Les sélectionneurs italiens successifs font avec le personnel à leur disposition, ce qui avait fait dire à Cesare Prandelli, prédécesseur de Conte sur le banc de la Nazionale : "Les ‘oriundi’ sont les nouveaux Italiens".

L’Allemagne et la France comme modèles selon Eder

Avec seulement 45,46% des joueurs évoluant en Serie A ayant fait leurs premiers pas en Italie (au comptage effectué la saison passée), le championnat n’offre pas d’immenses possibilités de rechange au sélectionneur. Bien moins qu’en France (67,55%), en Espagne (60,98%) ou en Allemagne (58,55%). Un vrai problème, souligné par Demetrio Albertini, ancien fer de lance de l’équipe nationale désormais vice-président de la Fédération. "Conte a peu de choix parmi les Italiens". "Comme l’Angleterre, l’Italie ne peut pas compter sur beaucoup de joueurs de haut niveau, donc Conte fait des expérimentations en vue de l’Euro, nous relate Luca Stacul. Les ‘oriundi’ en font partie. Vasquez et Eder sont-ils assez bons ? C’est difficile de le savoir pour le moment."
Finalement, le questionnement de l’Italie sur ses "oriundi", c’est encore Eder qui en parle le mieux. Natif de Lauro Müller au Brésil, celui qui est arrivé sur la botte via Empoli ne voit que "des bêtises" dans les critiques dont il fait l’objet et regrette les "a priori". Dans un entretien accordé au journal brésilien Diario Catarinense, Eder met même en avant le modèle allemand, où s’épanouissent Mesut Özil, Jérôme Boateng ou Ilkay Gündogan. Mais aussi "la France et ses divers Africains". Nabil Fekir pourrait lui en parler, ce n’est pas toujours de tout repos de ce côté-ci des Alpes non plus. L’attaquant lyonnais pourrait aussi lui transmettre une devise héritée d’Hubert Fournier, son coach à l’OL, qui lui avait conseillé, en pleine tourmente, de "parler avec ses pieds plutôt que dans les médias". C’est encore la meilleure chose à faire. Et le meilleur moyen de faire oublier d’où on vient.
Italie - Angleterre à suivre en direct sur Eurosport : Regardez cet événement sur Eurosport Player
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Vasilis Torosidis (Roma) et Eder (Sampdoria), les yeux rivés sur le ballon

Crédit: AFP

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