Bleus : Karim Benzema n'y arrive toujours pas

Contrôle incertain, conduite de balle moyenne, frappe sans éclat à 20 mètres. A la 27e minute du match face à l'Allemagne (1-2), Karim Benzema a l'occasion d'en terminer avec sa longue disette en bleu. Seul face à Adler, il choisit la frappe instantanée plutôt que la provocation. Le fait de jeu est peut-être anecdotique mais il démontre que Benzema, qui s'attache perpétuellement à donner l'image d'un buteur sur lequel le doute n'a pas d'emprise, traverse une vraie crise de confiance. Il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas constater que le buteur madrilène n'y arrive plus en sélection. Lors de ses dix derniers matches, il a frappé 40 fois au but sans jamais trouver la cible. Depuis le 5 juin et un doublé contre l'Estonie avant le départ pour l'Euro 2012, l'international français aux 15 buts en 55 capes est en effet resté désespérément muet.

Face à l'Allemagne, en plus de gâcher de belles opportunités, il a raté des gestes élémentaires comme cette passe mal assurée pour Ribéry alors que la défense allemande semblait prise de vitesse (31e). La lourde charnière Mertesacker-Hummels lui a offert plusieurs cadeaux, l'attaquant de 25 ans a quasiment méticuleusement tout raté. Comme sur ce centre parfait d'Evra où il s'est montré trop court (61e). Dans les couloirs du Stade de France, alors que les difficultés actuelles de Benzema étaient sur toutes les lèvres, son sélectionneur et ses équipiers ont tout fait pour éteindre l'incendie.

"Il connaît une période plus compliquée, mais il reste un grand joueur, notre attaquant numéro un, a ainsi réagi Mathieu Valbuena. Il a marqué des buts, et il en marquera encore." Yohan Cabaye de tenir le même discours : "Il faut créer des automatismes avec lui, beaucoup travailler. La réussite va revenir, j'en suis certain." Et si le problème était plus profond ? Car si en équipe de France, il reste muet, au Real, c'est à peine mieux. Benzema n'a inscrit que cinq buts en Liga cette saison et Higuain semble désormais le devancer dans la hiérarchie des attaquants merengue. Pas franchement adepte de l'autocritique, Benzema a survolé sa prestation individuelle : "C'est la première fois depuis longtemps que je joue 90 minutes, ça fait plaisir." Tout juste a-t-il admis qu'il "rest(ait) encore des automatismes à trouver entre le milieu et l'attaque."

Après avoir tenter de dissiper les doutes qui entouraient son attaquant de pointe mardi, Didier Deschamps n'a pu les ignorer après la rencontre. "Il lui manque ce petit but pour le libérer complètement, a concédé le sélectionneur. Il a fait des bonnes choses, mais il lui manque un peu cette confiance dont a besoin un attaquant, un peu de réussite aussi. Il lui manque ce déclic pour le libérer complètement." Dans le jeu, Benzema n'est pas inintéressant. Sa relation technique avec Valbuena et Ribéry est même un axe fort sur lequel peut s'appuyer Deschamps. Sa technique en mouvement dans des périmètres restreints et son jeu de remise sont des atouts dont il est difficile de se passer. Si Ribéry et Valbuena ont livré une prestation aussi aboutie, c'est parce qu'ils avaient près d'eux un relais efficace. C'est également son coup franc sur la barre qui a permis à Valbuena d'ouvrir le score. L'ancien Lyonnais a d'ailleurs délivré deux passes décisives lors de ses dix derniers matches en bleu et onze depuis le début de saison au Real, ce n'est pas rien.

Mais Benzema est attendu dans la finition. C'est l'essence même de son poste. Le Stade de France a sans doute été cruel de réclamer l'entrée en jeu de Giroud mais cela en dit long sur la frustration que génère Benzema en bleu depuis plusieurs mois désormais. Deschamps ne cesse de louer son implication dans la construction. Mais face à un Giroud qui empile les buts à Arsenal (cinq buts lors de ses quatre derniers matches), le sélectionneur pourrait avoir la tentation d'exiler Benzema sur un côté. DD n'était pas séduit par l'idée, déjà expérimentée face à la Biélorussie (3-1), avant ce France-Allemagne. Benzema a fait ce qu'il fallait pour le faire changer d'avis.