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Leicester est désormais face à un nouveau défi : réussir à changer de dimension

Philippe Auclair

Mis à jour 04/05/2016 à 13:38 GMT+2

PREMIER LEAGUE - Et maintenant ? Une fois les célébrations du titre passées et l'épopée digérée, Claudio Ranieri et son staff vont devoir se pencher sur la saison prochaine. Et l'avenir est pavé d'incertitudes pour le nouveau champion d'Angleterre. Bonne nouvelle tout de même : Leicester, qui fera bientôt partie du Top 20 des clubs les plus riches d'Europe, aura les moyens de ses ambitions.

10 choses Leicester

Crédit: Panoramic

"Et maintenant, que vais-je faire?", s’interrogeait Bécaud. La réponse, donnée dans le dernier vers de la chanson, était glaçante. "Je n’ai vraiment plus rien”, plus rien que des souvenirs qui font mal. Fort heureusement, ceux que laisseront les Foxes de cette saison ne sont pas de ceux qu’on veut, ou peut, oublier. La même question se pose, pourtant. The only way is down. Si leur histoire est un conte de fées, Leicester n’est pas Cendrillon. Il ne resteront dans leur carosse que le temps d’une course de taxi, et quand ils en descendront, bonne chance pour en trouver un autre – comment pourrait-il en être autrement ?
Ce n’est pas tous les ans que Chelsea, Arsenal et les deux Manchester s’empêtreront de la sorte. Ce n’est pas tous les ans que onze joueurs traverseront une saison entière sans jamais se blesser gravement ou encourir les foudres de la commission de discipline de la FA. Remarquez que c’est peut-être dommage, quand on voit l’engouement qu’a suscité le triomphe de Leicester dans le monde entier, au point que le network américain NBC a enregistré des pics d’audience inespérés chaque fois que Claudio’s band montait sur scène.
Mais cette histoire-là, vous la connaissez par coeur, et c’est bien le coeur qui doit parler dans ce cas précis. Un bras d’honneur aux peine-à-jouir, qui se régalent de soccernomics et se pâment à la lecture d’une banque de données, sera toujours le bienvenu. Mais laissons l’émotion de côté un moment. Le champion d’une saison l’est pour l’éternité, mais plus rarement pour celle à venir. La voie triomphale est soudain truffée de mines. Les trois mois et demi qui vont s’écouler avant le coup d’envoi du championnat 2016-17 seront des plus délicats à gérer.
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Leicester City's Italian manager Claudio Ranieri

Crédit: AFP

Petit club à l'échelle anglaise, gros bras à l'échelle européenne

Conserver l’effectif actuel intact sera moins ardu que ce j’ai entendu dire ça et là. La masse salariale de Leicester est peut-être le quart de celles des habitués du haut du tableau, n’empêche que le "petit" club des Midlands disposait déjà cette saison de moyens dont ne peuvent que rêver 95% des clubs européens : les Foxes pointaient au vingt-quatrième rang dans la dernière édition de la Rich List du cabinet comptable Deloitte. Les voilà sur le point d’intégrer le Top 20. Non, ce n’est pas d’une équipe de village que nous parlons.
Les patrons thaïlandais de Leicester n’ont d’ailleurs jamais hésité à mettre la main au portefeuille quand il le fallait, au point que le club qu’ils ont acquis de Milan Mandaric pour moins de 50 millions d'euros fait toujours l’objet d’une enquête de la Football League pour contrevenances à ses règles de fair-play financier. Ne craignez rien pour le titre des nouveaux champions, ils risquent tout au plus une amende, pour avoir dépensé au dessus de leurs moyens lorsqu’ils essayaient de s’extraire du Championship.
Les primes et inévitables revalorisations de contrat qu’ils devront consentir ne les gêneront pas plus que cela; pas plus que le bonus que va percevoir Claudio Ranieri (un peu plus de 2,5 millions d'euros), qu’il a très largement mérité. Leicester City n’est pas à la traîne non plus en termes d’infrastructures, son propriétaire Vichai Srivaddhanaprabha ayant fait le choix d’investir lourdement dans ce domaine dès son acquisition du club. Si Leicester City est un "petit" club, ce n’est qu’en termes relatifs à la Premier League.
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Vichai Srivaddhanaprabha

Crédit: Panoramic

Hormis Kanté ou Fuchs, personne n'a intérêt à partir

Le onze sur lequel Ranieri s’est reposé le plus souvent en championnat (aligné treize fois, du jamais vu depuis le titre de Manchester United en 1992-93, quand c’était un autre Schmeichel qui gardait la cage des vainqueurs) a coûté moins de 30 millions d'euros, et il est exact que MU a dépensé plus sur le marché des transferts en l’espace de deux saisons que Leicester en 132 ans d’existence.
Cela n’a pourtant pas empêché les Foxes de mettre environ 15 millions d'euros sur la table pour acquérir Yohan Benalouane de l'Atalanta et Gökhan Inler de Naples l’été dernier, pour ensuite les ignorer à peu près complètement. L’année précédente, l’attaquant croate Andrej Kramaric, prêté à Hoffenheim en janvier dernier, avait coûté 8,5 millions d'euros. Nous n’avons pas affaire à un miséreux, ou à des avares. Les vautours peuvent planer autour des Foxes; mais ils risquent de tomber sur un os, si vous pardonnez l’à peu-près.
Les recruteurs de "grands" clubs (qui, eux, ne sont pas champions) seront d’ailleurs conscients du fait que construire la réplique du laboratoire d’alchimie de maître Ranieri ne se fera pas à coups de sterling, ou en dérobant un seul des éléments de sa pierre philosophale. Des "stars" qui se sont retrouvées dans la maison de Jamie Vardy pour fêter le titre lundi soir, une seule ferait déjà l’objet de sollicitations : le prodigieux N’Golo Kanté, ce qui ne surprendra pas grand-monde. La Juve, par exemple, verrait en lui bien mieux qu’un bouche-trou lorsqu’il leur faudra se séparer de Paul Pogba.
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N'Golo Kanté (Leicester)

Crédit: Panoramic

Renforcer l'équipe sans briser la dynamique

Riyad Mahrez (à qui j’ai donné ma voix dans l’élection du "Footballeur de l’année" de la FWA) ne compte que des admirateurs, mais il n’est pas dit qu’il puisse crever l’écran à ce point dans un contexte différent – une observation qui vaut pour tous ses coéquipiers, selon moi, à l’exception de Kanté et du capitaine de la sélection autrichienne Christian Fuchs, dont je ne comprendrai jamais que Schalke 04 ait pu se séparer aussi légèrement. Quoi qu’il en soit, Leicester City devrait échapper au pillage que craignent tant de ses supporters. On ne quitte pas un champion d’Angleterre (et donc tête de série en Ligue des champions) comme cela.
Pour Ranieri, le défi ne sera pas de conserver, mais d’ajouter; et cela sans briser l’extraordinaire dynamique collective qu’il a su mettre en place dans son groupe, un exercice des plus délicats qui testera ses talents de psychologue comme ils ne l’ont jamais été auparavant. Il lui sera impossible de se reposer sur un effectif aussi restreint quand il ne s’agira pas seulement de défendre un titre de champion, ce qu’aucune équipe de Premier League n’est parvenue à accomplir depuis Manchester United en 2008-09, mais aussi de tenir son rang en Ligue des champions, tout en traitant la FA Cup et la Coupe de la Ligue avec un peu plus de respect que ce fut le cas cette fois-ci.
Fini aussi, le temps où Leicester pouvait recruter au rabais. C’est la rançon du succès. Que voulez-vous : cotés à 5000 contre 1 pour le titre en août dernier, les Foxes ne sont plus qu’à 50 contre 1 aujourd’hui. Pour gagner la prochaine Ligue des champions.
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Le trophée de la Ligue des champions

Crédit: Panoramic

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