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Zeman-Roma : chambre à part !

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 03/02/2013 à 12:41 GMT+1

Le deuxième chapitre de l'histoire commune entre Zeman et la Roma tourne au vinaigre. Le divorce est consommé et la rupture n'a jamais été aussi proche.

Zdenek Zeman (Reuters)

Crédit: Reuters

Les histoires d'amour finissent toujours mal. La première, en 1999, avait conduit au licenciement de Zeman de la Roma, après deux saisons pleines de passion, de spectacle, de matchs historiques et d'un jeu offensif de toute beauté. Quand la Roma et Zdenek Zeman ont décidé de revivre une deuxième histoire d'amour l'été dernier, les risques d'une deuxième rupture étaient grands. Si le couple se laisse encore une nouvelle chance, après une double réunion ce mardi, Zeman et la Roma font désormais chambre à part.
La colère froide de Zeman
À la veille du match à Bologne dimanche dernier, Zdenek Zeman tient sa traditionnelle conférence de presse où le ton monocorde de l'entraîneur cache, comme d'habitude, quelques piques lancées à droite et à gauche. Sauf que là, le Mister va plus loin et attaque ses dirigeants sur le thème du règlement interne. En effet, selon Zeman, les joueurs ne sont pas bien encadrés, ne savent pas ce qu'ils ont le droit de faire ou pas (comme Stekelenburg au cours de l'interview dans laquelle il critique son entraîneur et son concurrent direct), et se laissent vivre, affichant un état d'esprit collectif tout relatif, qui explique sans doute l'irrégularité chronique de ce club depuis quatre ans.
Zeman est très pointilleux et ce laisser-aller ne lui sied guère. "Il y a un problème général autour de la discipline, explique l'entraîneur italien. On doit s'améliorer. J'ai demandé l'aide de mes dirigeants mais nous n'avons pas de règlement écrit. Cela manque et les dirigeants doivent y remédier. Sans discipline, on ne peut pas être une équipe." Cette critique fait suite à une autre pique, envoyée cette fois-ci à ses joueurs, en évoquant l'esprit de sacrifice dont devraient faire preuve les joueurs pour se sortir de la mauvaise passe actuelle. Puis, il a individualisé deux cas. Celui de Stekelenburg, et sa fameuse interview à charge, après laquelle Zeman a expliqué que le Néerlandais ne faisait rien pour s'intégrer au reste du groupe. Puis il s'en est pris à Miralem Pjanic, coupable d'avoir lâché un "en ce moment, les points comptent plus que le jeu", une maxime qui va à l'encontre de tous les principes de Zeman. Il a d'ailleurs expliqué qu'il ne partage pas l'analyse du Bosnien et que cette analyse ne reflète pas une bonne mentalité.
En dehors du cas Pjanic, qui tient plus d'une situation d'urgence, car l'ancien Lyonnais apprécie énormément le jeu prôné par Zeman, l'entraîneur italien a bien analysé la situation. Sur Stekelenburg, Zeman a dit tout haut ce que les autres pensent tout bas, à commencer par les dirigeants du club, qui trouvent que le portier ne s'intègre pas. Stekelenburg avait également mis en colère ses dirigeants la saison passée, quand il avait refusé de se faire opérer de l'épaule à quelques mois de l'Euro car cela représentait, selon le Néerlandais, un trop grand risque pour sa carrière avec les Pays-Bas de rater une telle compétition.
Sur la mentalité générale des joueurs, j'ai déjà eu l'occasion d'en parler dans mes articles précédents. Les joueurs de la Roma aiment se laisser porter après quelques succès, ne se remettent jamais en question, préfèrent l'enflammade à l'analyse froide et affichent un état d'esprit très moyen dans l'engagement sur le terrain. Est-ce culturel ? Est-ce dû à la douce folie romaine ? Est-ce que Zeman ne tient pas assez ses joueurs ? Est-ce que les dirigeants ne soutiennent pas assez Zeman dans ce domaine ? Probablement un peu de tout cela.
Sabatini se lâche et met le feu
Walter Sabatini a laissé passer le match à Bologne avant de répliquer à son entraîneur. Le directeur sportif de la Roma a profité de la présentation du dernier arrivé, le grec Torosidis, pour donner son point de vue sur cette affaire. Et il a mis le feu au club en quelques phrases : "Ce n'est pas une erreur d'avoir recruté Zeman, il a valorisé des jeunes joueurs, a proposé un jeu offensif et du spectacle. Il a eu tout ce qu'il demandait et la situation actuelle est tout sauf satisfaisante. On s'interroge sur les motifs de notre mois de janvier raté. On évalue tout, même s'il faut garder Zeman ou non. Qui sera sur le banc vendredi contre Cagliari ? Je ne peux pas vous répondre. Un nouvel entraîneur ? On y pense tous les jours, c'est lié à mon boulot de directeur sportif et c'est partout pareil." Zeman, qui attendait un soutien de ses dirigeants, n'a pas été déçu.
Ces déclarations ont enflammé la maison Roma. Le contexte médiatique de ce club est bien particulier et n'existe nulle part ailleurs. Cette pression quotidienne des supporters et des journalistes (des dizaines de radios et de sites professionnels sont dédiés uniquement à cette équipe et occupent une place très importante dans l'univers médiatique italien) a contribué à lancer les rumeurs les plus folles sur une démission à venir de Zeman. Car l'entraîneur italien est orgueilleux. Il a besoin de sentir que tout le monde adhère à sa cause, autrement il s'en va. Zeman est exigeant avec lui-même et avec les autres. Il était comme cela il y a trente ans, et il n'y a aucune raison que cela change maintenant. Chez Zeman, rien ne change : son 4-3-3, ses critiques contre le pouvoir des trois gros clubs du nord, sa préparation physique, ses principes de jeu, sa volonté de tout maîtriser et d'établir des règles… Le management est lourd et certains joueurs ont du mal à supporter.
Après deux réunions ce mardi, Zdenek Zeman a été confirmé par ses dirigeants. Le face-à-face a duré deux heures et chacun a fait part de son point de vue. Sabatini a beau faire bonne figure, le ressort est cassé et il n'a peut-être que fait retarder l'échéance pour Zeman. Lundi, il a quasiment "démissionné" Zeman et a fait l'essentiel de sa conférence de presse en parlant au passé de son entraîneur. Et aujourd'hui, il voudrait nous faire croire que tout va bien ? Quand on connaît Il Boemo, on ne peut être que perplexe.
Sabatini a semblé découvrir ces derniers jours la personnalité de Zeman. Or, il aurait dû se poser tout un tas de question avant de l'embaucher. Je ne peux pas croire qu'un directeur sportif ne connaît pas, aujourd'hui, ce que veut dire travailler avec Zeman : son franc parler, ses méthodes d'entraînement, les joueurs qui doivent entrer dans le moule 4-3-3, son management… La vraie question est : qu'essaye de nous faire croire Walter Sabatini, et n'essaye-t-il pas de sauver sa peau par tous les moyens, alors qu'il est responsable d'un recrutement plus que moyen depuis deux ans (Kjaer, José Angel, Luis Enrique, Stekelenburg, Bojan, Gago, Piris, Balzaretti…).
Et la Roma dans tout ça ?
Avec deux points pris en janvier, la Roma n'est plus dans le coup pour la Ligue des Champions, et est à la traîne pour l'Europa League. Le mois de janvier est souvent le meilleur mois des équipes de Zeman, et cette fois-ci, cela n'a pas marché. Deux causes à cela : la première concerne le voyage fin décembre et début janvier aux Etats-Unis, pour des questions de business, alors que Zeman profite habituellement de cette période pour doser sa préparation physique pour les cinq derniers mois de compétition.
La deuxième est à chercher sur le front de l'attaque. En effet, qu'une équipe entraînée par Zeman encaisse beaucoup de buts, ce n'est pas une nouveauté. Mais qu'elle rate autant d'occasions dans ses matchs est une véritable surprise. Si quelques retouches peuvent être effectuées sur le plan défensif en mêlant concentration, grinta et intelligence, c'est en attaque que cela ne va pas. Avant le match à Bologne, la Roma n'avait marqué que deux buts en trois matchs au mois de janvier. Après Bologne, cela fait cinq en quatre matchs et c'est encore insuffisant. Pourtant, la Roma se crée d'innombrables occasions, comme à Catane où Bradley, Destro et Florenzi ont raté le cadre… à trois mètres du but. Rebelote avec Florenzi contre Bologne dimanche où il aurait pu offrir au club romain deux buts d'avance.
La Roma est l'équipe avec le deuxième plus haut total de tirs par match, avec en moyenne 17 frappes. Mais seulement 6 sont cadrées. Il faut environ 8 occasions à Osvaldo ou à Destro pour en mettre une au fond. Et quand en plus Lamela, l'un des meilleurs joueurs jusqu'en décembre, retombe dans ses travers à base de gestes techniques superflus, possession de balle à outrance au lieu de servir rapidement ses coéquipiers et manque de conviction, c'est toute l'attaque qui flanche. Et ce, malgré un Totti qui, à 36 ans, se démène et affiche 7 buts, 8 passes décisives et 75% de passes réussies (quasiment exclusivement dans la moitié de terrain adverse), dans un poste d'ailier gauche qu'il redécouvre douze ans plus tard.
Francesco Totti affiche un état d'esprit exemplaire et apprécie énormément Zdenek Zeman. L'entraîneur peut compter sur le soutien de son capitaine, ce qui à Rome n'est pas rien, mais cela sera-t-il suffisant pour éviter un divorce entre Zeman et ses dirigeants avant la fin de la saison ? Tite-Live, historien de la Rome antique, disait que "Mieux vaut la paix certaine que la victoire espérée". Pour finir la saison, l'un n'ira pas sans l'autre du côté de Trigoria…
JOHANN CROCHET
Créateur de flashfoot.fr, blogueur, Johann Crochet a l'habitude de dire qu'une bonne journée commence par une revue de presse italienne et qu'une bonne année se mesure au nombre de matches de Serie A vus dans les stades. Par goût, il suit aussi le foot néerlandais et les championnats scandinaves.
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