Tevez, Vidal et Pirlo sont partis : comment la Juve va-t-elle remplacer sa colonne vertébrale ?

“La Juve est en train de changer de peau”, annonçait Max Allegri lors de la première conférence de presse de la saison il y a deux semaines. L’entraîneur turinois ne pouvait pas viser plus juste. Le vice-champion d’Europe a beaucoup changé cet été. Mais le board turinois a les idées claires et ne veut pas commettre l’erreur de se reposer sur ses lauriers. Avant-dernière équipe de Serie A à retrouver les terrains d’entraînement, l’effectif de la Vieille Dame s’est présenté avec six nouveaux visages pour huit départs. Et ceci, à un peu plus d’un mois de la clôture du mercato. Une révolution assumée et abordée avec tranquillité. Peut-être même un peu trop.

L’Argentin l’avait déclaré dès son arrivée, il n’était que de passage avant un retour chez lui à Boca Juniors. Un homme qui tient ses promesses certes, mais la Vieille Dame perd surtout son top player capable d’inscrire 50 buts en deux saisons et de lui faire passer un pallier offensivement. Plus qu’un buteur, Tevez était un des leaders moraux de l’effectif. Personne ne réussissait à transcender autant que lui ses coéquipiers. Une grosse perte assurément.

Comment le remplacer ? Pour un Tevez de perdu, un Zaza, un Dybala et un Mandzukic de trouvés. Vous l’aurez compris, une véritable révolution est opérée en attaque, d’autant que Llorente va également plier bagages. Unique rescapé, Morata récupère les gallons de point de repère offensif. Il est pour le moment l’unique certitude, en attendant l’adaptation de Mandzukic, et les conséquences de la pancarte “40 millions” que le jeune Dybala trimbalera toute l’année.

Est-ce vraiment l’âge qui a eu raison du départ du Maestro, ou s’agit-il plutôt d’un péché d’orgueil ? Oui, 36 ans, ça commence à faire pour un playmaker, mais ne se sentant plus titulaire indiscutable, Pirlo a opté pour une pré-retraite en MLS. Pourtant, il aurait encore pu donner un sacré coup de main à la Juve, dans l’optique d’un turnover ou en tant que joker pour débloquer un match sur coup de pied arrêté. On respecte son choix de carrière, mais on aurait aimé le voir honorer sa dernière année de contrat dans un registre différent.

Comment le remplacer ? La solution interne s’appelle Marchisio, milieu relayeur recyclé devant la défense avec d’excellents résultats. Des caractéristiques différentes de son ancien coéquipier pour une formule plus efficace et surtout plus solide. Indirectement, c’est Sami Khedira qui remplace l’Italien, mais seulement d’un point de vue numérique. Gratuit oui, mais à la condition physique entamée et dans avec un répertoire plus classique. La Juve perd énormément en matière d’imprévisibilité.

Disons qu’on le sentait un peu venir, surtout après ses multiples écarts de conduite. Mais s’il y a un joueur qui incarnait le retour de la Juve au haut niveau, c’était bien lui. Il s’en va donc au Bayern contre seulement 40 millions. Oui, “seulement”, puisqu’il s’agit d’un chiffre finalement dérisoire comparé aux sommes déboursées pour l’achat de joueurs beaucoup moins confirmés. Non seulement le club turinois sacrifie un élément phare malgré quelques passages à vide, mais en plus, il l’a surement mal vendu.

Comment le remplacer ? Peut-être un Allemand, en tous les cas, un vrai numéro 10 afin de récupérer en qualité, ce qui a été perdu avec Pirlo. C’est le projet. En interne, des solutions existent déjà. L’Argentin Pereyra fut un excellent 12e homme l’an passé mais n’a pas encore l’abattage du Chilien. C’est finalement à Paul Pogba que l’on demandera de récupérer ce rôle de box-to-box. Néanmoins, le Français va devoir passer encore un pallier et gagner en constance.

C’est peut-être ce que la Juve a le mieux géré durant sa mue. En effet, de multiples petites opérations se sont ajoutées à ces trois départs. Storari sera suppléé par le Brésilien Neto, un des meilleurs portiers de la “Botte” et digne successeur du plus efficace des doublures. Encore mieux pour Ogbonna, 4e défenseur dans la hiérarchie, revendu 11 millions à West Ham malgré des prestations ordinaires, et remplacé par Rugani, le phénomène de retour d’Empoli. La Juve gagne également au change avec le retour de Matri au Milan et le rapatriement de Zaza, attaquant titulaire de la Nazionale. Tout ceci à moindre coût.

A l’instant T, l’effectif de la Vieille Dame a perdu en qualité technique, tactique et surtout en expérience. Cependant, la marge sur les concurrents nationaux est tellement importante que la conquête d’un cinquième scudetto d’affilée est toujours envisageable. Pour dire, c’est l’Inter qui est désignée adversaire numéro un, une équipe également révolutionnée et qui reste sur 7e place l’an passé. En revanche, cela pourrait coincer en Champions League.

On s’attendait à un effectif renforcé en vue de confirmer une place dans l’élite continentale, il est presque déforcé. Les investissements ont été faits dans une stratégie à moyen terme et le mercato ferme les portes dans un mois, mais pour viser le graal européen, la sensation est que les facteurs incontrôlables (tirage, forme de l’adversaire, arbitrage) seront encore trop décisifs. A se demander si la Juve est en train de se diriger vers une année de transition. Reculer pour mieux repartir ?