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Claudio Ranieri nommé entraineur de l'année ? Un beau pied de nez au foot italien

Valentin Pauluzzi

Mis à jour 10/01/2017 à 20:15 GMT+1

Le technicien transalpin a été élu entraineur de l'année par la FIFA mardi soir. Une reconnaissance pour son historique titre de champion d’Angleterre conquis avec Leicester City. L’Italie est fière de lui, mais elle devrait faire profil bas.

Claudio Ranieri avec son trophée d'entraineur FIFA de l'année

Crédit: AFP

C’était une énième soirée monotone des récompenses de la FIFA dont je n’attendais rien de particulier. Je n’étais même pas surpris de voir le FIFPro World XI sans italien pour la 9ème fois consécutive (même pas un Bonucci ou un Buffon cette année, vraiment ?). L’Italie ne fait plus que de la figuration dans cette cérémonie avec ses anciennes gloires qui participent au match de gala organisé par Gianni Infantino. Il y avait bien Ranieri nommé parmi les trois meilleurs coaches de l’année, mais j’étais persuadé que l’aura de Zidane aurait fait la différence auprès des votants. Quel plaisir d’avoir été démenti. Alors disserter sur ce résultat ne m’intéresse guère, revenir sur la portée de son exploit non plus, tant tout a été dit… ou presque.

Claudio la bonne poire

Comme partout ailleurs, Sir Claudio a été célébré comme il se doit en Italie, tout un pays était derrière lui la saison passée. La page Facebook Calciatori Brutti, qui mélange savamment satire et football, organisa même un convoi en bus et en voiture de Milan jusqu’à Leicester afin de fêter le titre sur place, c’est dire ! Les médias de la presse écrite et audiovisuelle ont retracé cet exploit historique de toutes les manières possibles. Un sujet qui collait parfaitement au storytelling tellement en vogue ces derniers temps. La larmichette était assurée. Leicester, l’histoire du petit qui fait la nique aux gros pleins de sous de la Premier League avec à sa tête un gentleman éternel second.
Tellement gentleman qu’il a passé des années à encaisser les moqueries de supporters et journalistes italiens. Pas fait pour une grande équipe, tout juste bon à la remettre sur pied et à laisser sa place à plus doué que lui pour finir le travail (sous-entendu gagner des titres). Pas assez bon tacticien. Trop gentil. Parfois incompétent. Des critiques qui ont souvent tourné au bashing envers cette cible idéale, bien trop poli pour répondre aux attaques déplacées. Mais le marché transalpin des vestes réversibles a connu d’incroyables pics de vente en 2016.
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Claudio Ranieri lors de son passage sur le banc de la Juve

Crédit: Eurosport

Il avait pansé les plaies de la Vieille Dame

Une coupe et une Supercoupe d’Italie, c’est le bilan comptable de Ranieri dans son pays en une dizaine de saisons en Serie A. Je n’avais pas eu le temps de connaitre son premier passage avec Cagliari, le Napoli et la Fiorentina (avec qui il a gagné ces deux trophées), mais son retour en 2007 après une décennie entre l’Angleterre et l’Espagne m’avait particulièrement marqué. Il avait pris Parme avant-dernier à 16 matches du terme du championnat et l’avait remonté jusqu’à la 10ème place ! Un passage qui l’avait bien relancé et lui avait permis d’obtenir un contrat à la Juve, de retour parmi l’élite et désireuse d’être immédiatement compétitive, ce qui ne coulait pas de source. Mission accomplie avec une 3e et une 2e place et un Top 3 constamment squatté.
A qui avait-on attribué le mérite ? Aux champions restés malgré la relégation administrative (les Nedved, Buffon, Trezeguet, Del Piero, etc…). D’ailleurs, Ranieri fut lourdé à deux journées du terme de sa seconde saison, après une série de six nuls et une défaite, pour promouvoir Ciro Ferrara aujourd’hui perdu en D2 chinoise. A l’image des Parmesans relégués pour de bon après son départ, les Bianconeri enchainèrent sur deux piètres 7es places. Grâce à lui, les tifosi turinois avaient retrouvé le doux parfum des sommets du Calcio. Ils ont oublié.

La Roma, son Leicester italien

Malgré son style très british loin de celui rustre qu’on lie à ses origines, Ranieri est bien un vrai romain du quartier de Testaccio. Son arrivée sur le banc de la Roma était un retour aux sources puisque c’est le club où il avait fait ses classes en tant que joueur. Spalletti venait de claquer la porte après deux défaites lors des deux premières journées. La situation était délicate. La Louve était au bord de la faillite depuis quelques années. La fin de l’ère Sensi, une agonie financière. De fait, le pouvoir d’achat était quasiment réduit à néant, si bien que le mercato estival 2009 avait été fait de prêts et retours de prêts.
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Football - Serie A 2009/2010 - Roma-Lazio De Rossi, Ranieri

Crédit: Eurosport

Là encore, les mémoires flanchent, rien ne laisser présager que cette équipe pouvait jouer les premiers rôles. Et pourtant, elle a réussi à tenir tête à la seule formation italienne capable de réaliser un historique triplé Champions League, coupe, championnat : l’Inter de Mourinho, aux moyens bien plus importants. Les Nerazzurri avaient dû s’arracher jusqu’au dernier match, idem en finale de Coupe d’Italie. Mais sur les 36 journées auxquelles il a pris part, personne n’a fait mieux que Ranieri cette saison-là. Un exploit injustement relégué aux oubliettes par la saison suivante conclue sur une démission. La Roma n’a jamais été aussi proche d’un titre de champion depuis.

Plus de place sur son char

Reste l’Inter, dans le dur, comme tous les entraineurs qui y sont passés depuis sept ans. On le dégagea pour Stramaccioni, ex-futur prodige aujourd’hui sans emploi à 41 ans. C’était en 2012, son dernier contrat italien, car il ne reviendra pas exercer dans son pays. Ni le temps, ni l’envie, ni l’intérêt. L’an dernier, il a donné un nombre incalculable d’interviews, mais jamais il n’a laissé transparaître une once de rancune. Pourtant, une petite remarque pouvait bien lui échapper. Rien. Niente !
En contrôle total et avec une hauteur remarquable. Sa revanche, il l’a prise à sa façon, en laissant ses nouveaux admirateurs "grimper sur son char" - comme on dit en italien - s'y entasser et s’étouffer dans leurs éloges à la sincérité tout à fait relative. Car détrompez-vous, dans le fond, la perception qu'on a de lui ne changera pas. Et une fois Leicester sorti de la Champions League, Ranieri redeviendra l'éternel second capable d'un exploit illustre mais isolé. Les modes passent mais les vestes réversibles restent.
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Claudio Ranieri

Crédit: AFP

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