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Rudi Garcia, l’exception qui confirme la règle

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ParEurosport

Mis à jour 13/06/2013 à 15:43 GMT+2

Rudi Garcia, nomme à la tête de l’AS Roma, rejoint Arsène Wenger (Arsenal) parmi les entraîneurs français à la tête de grosses écuries. Pourtant le made in France n’est pas recherché sur les bancs européens. Pourquoi ? Enquête.

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Crédit: Eurosport

Arsène Wenger et désormais Rudi Garcia, les exceptions qui confirment la règle. Le coach d’Arsenal et le futur technicien de la Roma sont aujourd’hui les seuls entraineurs français à exercer dans l’un des clubs des quatre grands championnats étrangers. Philippe Montanier, qui a bénéficié des recommandations de Reynald Denoueix et donc d’un circuit particulier, est de son côté rentré au bercail après une expérience couronnée de succès à la Real Sociedad.
Si bien que parmi  les 78 clubs de l’élite européenne, hors L1, seuls Arsenal et la Roma font confiance à un technicien tricolore. Or, en Espagne parmi les cadors, seul le Barça et Valence sont coachés par un Espagnol. Même constat en Angleterre avec l’exception Ferguson à MU dans le top 5 de la saison 2012-13. Les Argentins, les Espagnols, les Italiens et les Néerlandais s’exportent à merveille sur les bancs des clubs étrangers.
Même en France, les deux clubs aux projets les plus ambitieux (Paris et Monaco) ont confié leur destin à des techniciens étrangers, comme si les Français n’avaient pas les épaules assez larges. Hormis les championnats de seconde zone (Qatar) et les sélections plus ou moins exotiques, le marché à l’export du coach français est inexistant. Pourquoi l’Europe boude les entraineurs français ? Tentative de réponse.
UNE QUESTION DE COMPÉTENCE
"C’est avant une question de compétence. Nos entraineurs sont simplement moins bons que les techniciens italiens, espagnols, allemands ou anglais. Je parle autant de leurs compétences techniques que de leur mode de management", nous a confié un agent sous couvert d’anonymat. Aujourd’hui, parmi les entraineurs constants au plus haut niveau et qui ont amassé des trophées, seuls Didier Deschamps et Arsène Wenger sortent du lot. Même en Ligue 1, les coaches se succèdent au sommet du championnat (Houiller, Perrin, Blanc, Deschamps, Garcia, Girard, Ancelotti ces sept dernières années). Une instabilité qui ne favorise pas la formation d’une élite susceptible d’intéresser les meilleurs clubs étrangers.
A l’échelle européenne, seul Deschamps a connu des résultats probants avec des clubs différents (finale de C1 avec Monaco, quart avec l’OM). "Aucun coach en France ne remporte des trophées avec une grande régularité. Or à l’heure actuelle, c’est l’un des critères de recrutement pour les grosses écuries d’Europe", diagnostique Damien Comolli, ancien directeur sportif de Liverpool et Tottenham après avoir débuté à Arsenal. Il réfute cependant la thèse de la compétence pour explique l’absence de coach tricolore au haut niveau. "Ces dernières années, Rudi Garcia est peut-être le plus régulier mais son parcours en Coupe d’Europe est un frein majeur", continuait-il avant que l’intérêt de la Roma – absent de la C1 et la C3 – soit établi.
LA LANGUE, BARRIÈRE PRINCIPALE
"J’ai déjà eu à recruter un entraineur pour un grand club européen et je me suis penché sur des profils de coaches français mais la principale barrière, c’est la langue", témoigne aujourd’hui Damien Comolli. "Aujourd’hui, Ancelotti parle italien, anglais et français, Benitez maîtrise l’anglais et l’italien. Ce n’est pas le cas des techniciens français", poursuit-il. Bruno Satin, agent de joueurs, dresse le même constat : "Comment est-ce possible de façonner une équipe sans parler la langue ? C’est la grosse lacune des entraineurs en L1."  En France, Rudi Garcia, qui maîtrise parfaitement… l’espagnol, fait figure d’exception. Ce n’est sans doute pas un hasard si son nom a circulé du côté de Malaga ou de Séville. "Jacques Santini a fait du tort aux techniciens français lors de son passage à Tottenham. Ses conférences de presse restent dans toutes les mémoires", continue Satin.
LA LIGUE 1, UNE CONTRE-PUBLICITÉ
"L’image du foot français à l’étranger n’est pas bonne. Il est trop défensif et la notion de spectacle, si importante en Espagne, Allemagne et Angleterre, n’existe pas en L1. Cela rejaillit sur la réputation des entraineurs français." Damien Comolli met le doigt sur un problème majeur, une contre-publicité pour tous les techniciens de l’Hexagone. "Lorsque les scouts des clubs anglais viennent en Ligue 1 superviser des joueurs, ils s’ennuient profondément", témoigne Fabien Piveteau, agent de joueurs. "La L1 est trop tactique, pas assez ouverte. Les entraineurs en France pensent au respect de l’organisation avant de penser au jeu." Les options tactiques privilégiées en L1 ne sont pas celles des championnats voisins. Un obstacle rédhibitoire pour l’exportation du banc made in France.
UNE RÉPUTATION DE FORMATEUR
"Les entraineurs français peuvent être sollicités en Angleterre, pour diriger des académies…", constate Fabien Piveteau. Les coaches français sont vus de l’étranger comme des formateurs. A l’image des joueurs qu’elle expose tous les week-ends, la L1 fait sait faire confiance à ses jeunes. Comme Claude Puel, René Girard, Frédéric Antonetti ou Jean Fernandez, les coaches français sont d’excellents formateurs. Une image flatteuse mais aussi réductrice lorsqu’il s’agit d’exporter son savoir-faire dans les meilleurs clubs du monde. Un doute subsiste quant à leur capacité à gérer un vestiaire de cadors ou un environnement plus exigeant en termes d’ambition. L’échec de Puel à Lyon l’illustre à merveille. 
UNE QUESTION DE RÉSEAUX
"Pour entrainer en Angleterre, il faut faire du lobbying, avoir des réseaux. Ce n’est pas dans les cordes des entraineurs français", note Bruno Satin. Un agent, qui a tenu à garder l’anonymat, est plus clair : "Les entraineurs de L1 sont dans leurs certitudes. On voit toujours les mêmes, on a l’impression d’une consanguinité. Ils fonctionnent en cercle restreint, en vase clos et manque clairement d’ouverture." Une étroitesse de points de vue qui expliquerait en partie pourquoi l’étranger leur semble si loin aujourd’hui.
DES EXCEPTIONS MALGRÉ TOUT 
Arsène Wenger est une figure incontournable à Arsenal depuis plus de quinze ans, Didier Deschamps a pris les rênes de la Juventus : les meilleurs clubs européens ne snobent pas totalement le technicien français et le PSG rêve de confier son futur à Wenger. "La génération 1998 qui a joué à l’étranger est dans le circuit. Les clubs étrangers se sont déjà penché sur leur cas", témoigne Damien Comolli. "La langue n’est pas un problème pour eux. Si Laurent Blanc n’a pas encore entrainé un grand club, c’est avant tout une question de circonstances. Didier Deschamps a lui aussi une grosse cote mais il est pris", précise encore Comolli.
Rudi Garcia et Christophe Galtier bénéficient également d’une réputation flatteuse hors des frontières de l’Hexagone car leur style de jeu porté vers l’avant séduit les recruteurs. "Les décideurs en Angleterre, en Espagne ou en Allemagne cherchent des hommes qui, s’ils n’ont pas gagné de trophée, ont surperformé par rapport aux moyens dont disposent leurs clubs. Voilà pourquoi beaucoup de clubs étrangers regardent actuellement le travail de Claude Puel", nous informe Comolli. En attendant, l’année prochaine, Wenger et Garcia continueront de former le bataillon restreint des entraîneurs français exerçant dans les quatre championnats majeurs d’Europe.
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Arsene Wenger (FC Arsenal)

Crédit: Getty Images

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