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Ukraine - France (2-0), analyse tactique : Comment l'Ukraine a bloqué Ribéry

Florent Toniutti

Mis à jour 16/11/2013 à 18:28 GMT+1

L'analyse tactique montre que les Ukrainiens, agressifs devant et au milieu, dominateurs derrière, ont remporté la bataille des duels, notamment face à Franck Ribéry.

FOOTBALL 2013 Ukraine-France ( Ribery)

Crédit: Panoramic

Une belle claque. Dépassés dans l’engagement et dans les duels, les Bleus sont repartis d’Ukraine avec une défaite plus que logique. Parfaitement préparée pour affronter la France, la sélection de Mikhail Fomenko s’est rapprochée du Brésil, même si elle peut regretter d’avoir manqué une balle de 3-0 dans le final.
Alors que le 4-3-3 était pressenti durant la semaine, c’est finalement en 4-2-3-1 que les Bleus ont débuté la rencontre à Kiev. Comme c’était prévisible, Valbuena a fait les frais de sa méforme du moment, Nasri en profitant pour récupérer son poste derrière l’attaquant. A part ça, du grand classique dans la formation de Didier Deschamps, qui devait toutefois composer sans Varane blessé (Lloris – Debuchy, Koscielny, Abidal, Evra – Pogba, Matuidi – Rémy, Nasri, Ribéry – Giroud).
Côté ukrainien, Mikhaïl Fomenko alignait lui aussi un 4-2-3-1. Les ailiers tant redoutés, Yarmolenko et Konoplyanka étaient là, tout comme Rotan et Stepanenko au milieu de terrain. Devant, Edmar était positionné en soutien de Zozulya (Pyatov – Fedetskiy, Khacheridi, Kucher, Shevchuk – Rotan, Stepanenko – Yarmolenko, Edmar, Konoplyanka – Zozulya).

La bataille du milieu :

Sans surprise, les premières minutes de la rencontre ont été le théâtre d’une grosse bataille au milieu de terrain. D’un côté comme de l’autre, les deux équipes faisaient tout pour empêcher l’adversaire de mettre en place son jeu aux abords de la ligne médiane. Dès la première minute, les Français ont ainsi tenté de casser leur 4-2-3-1 pour retrouver l’animation développée face à l’Australie. Nasri décrochait dans sa moitié de terrain afin de participer à la relance, tandis que Evra et Debuchy montaient pour occuper les couloirs.
Evidemment, l’Ukraine avait préparé une réponse à cette animation : lorsque les Bleus tentaient de créer le surnombre dans l’axe de cette manière, Stepanenko ou Rotan étaient amenés à quitter leur position devant la défense centrale pour accompagner le travail d'Edmar et Zozulya en première ligne. Le reste du bloc réagissait en conséquence : Konoplyanka et Yarmolenko restaient dans leur moitié de terrain afin de bloquer les ailes. L’ailier du Dinamo Kiev se retrouvait alors aux côtés de Fedetskiy afin de conserver la prise à deux sur Ribéry. Lorsque l’Ukraine évoluait plus bas, Yarmolenko s’occupait d’Evra et c’est Rotan qui s’excentrait pour aider son latéral gauche (voir par ailleurs).
La relation entre les milieux axiaux ukrainiens et leurs attaquants ne s’arrêtait pas là puisque les uns couvraient aussi le pressing des autres. Ainsi, Stepanenko accompagnait le pressing de Zozulya lorsque ce dernier sortait sur Koscielny durant le premier quart d’heure. Les minutes passant, l’avant-centre a toutefois baissé de pied et les Bleus ont pu mettre le pied sur le ballon au milieu de terrain, et commencer leurs mouvements en partant justement de la relance du défenseur d’Arsenal. Car dans l’entrejeu, Edmar abattait un travail monstre pour bloquer tout milieu qui tentait de s’approcher de la ligne médiane.
Les Français aussi ont tenté de mettre sous pression la relance ukrainienne en début de partie. En première ligne, Giroud et Nasri sortaient sur les défenseurs centraux adverses afin de forcer leur relance. Derrière eux, c’est tout le bloc bleu qui remontait pour tenter d’occuper le camp adverse. Mais l’Ukraine n’a jamais pris de risque au moment de sortir de sa moitié de terrain. Pyatov a été souvent sollicité par ses défenseurs ou milieux de terrain lorsque les Bleus se faisaient trop "pressants" dans leur dos.
Au final, l’Ukraine jouait long et renvoyait le jeu dans le camp français… Et les Français se retrouvaient à nouveau sous la pression d’Edmar et des milieux ukrainiens, qui les forçaient à allonger à leur tour pour rechercher Giroud. Bref, du gagne-terrain qui arrangeait plutôt les affaires ukrainiennes puisqu’ils pouvaient gêner la mise en place française grâce à l’énergie de leurs attaquants et milieux de terrain. Les hommes de Fomenko apparaissaient en effet beaucoup plus à l’aise avec ce jeu direct que les Bleus de Deschamps.
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Roman Zozulya (Ucrania) y Éric Abidal (Francia)

Crédit: AFP

L’Ukraine en défense : 

Bien en place pour gêner la relance française, l’Ukraine a aussi réalisé un énorme travail sur son côté droit afin d’enfermer Ribéry dans son couloir. Les Jaunes ont bien rempli leur mission tout au long de la première mi-temps puisque le milieu du Bayern n’a quasiment pas eu la moindre occasion de se signaler par ses débordements. Et pour cause, il devait faire face à un marquage très serré de la part de Fedetskiy, parfaitement aidé par le positionnement de ses trois milieux de terrain (Edmar, Stepanenko et Rotan) afin de couper Ribéry des solutions courtes qui pouvaient se présenter à lui et contenir les courses venant de l’arrière qui pourraient lui créer de l’espace (Evra, Matuidi).
Privé des débordements de Ribéry côté gauche, l’équipe de France devait trouver d’autres circuits pour approcher les buts de Pyatov. Malheureusement, aucun d’entre eux ne s’est révélé concluant. Souvent sollicité en tant que point de fixation, Giroud a la plupart du temps souffert face à l’agressivité des défenseurs ukrainiens. Sans ses relais pour fixer la défense adverse, Ribéry et Nasri s’enferraient dans des courses faciles à contenir par leurs défenseurs adverses, qui ne se livraient pas et attendaient le repli d’un partenaire pour récupérer le ballon.
Ribéry bloqué à gauche, Giroud dominé dans l’axe, les Bleus n’avaient plus que le couloir droit pour peser dans le camp adverse. C’est ainsi que la plupart des relances de Koscielny ont été à destination de Rémy en début de partie. Loin d’être un milieu de terrain, le Magpie a montré toutes ses limites dans ce rôle jusqu’à ce que Didier Deschamps lui demande de jouer plus haut en milieu de première mi-temps. Attiré par le côté gauche jusqu’alors, Nasri a commencé à s’aventurer côté droit pour récupérer les relances de son défenseur et rechercher Giroud ou Rémy en pointe. Une nouvelle animation qui a abouti à la meilleure situation des Bleus de la première mi-temps (ouverture de Nasri, remise de Giroud, duel perdu par Rémy, 28e). Une (petite) raison d’espérer pour mardi ?
Un joueur était particulièrement capital dans le bon équilibre défensif de l’Ukraine : il s’agissait du "meneur de jeu" Edmar. Dans un rôle qui pouvait rappeler celui occupé par Sneijder dans l’Inter Milan de José Mourinho, le milieu de terrain du Metalist Kharkov a passé sa soirée à "pourrir" la circulation de balle française. Lorsque le ballon était encore dans le camp français, il alternait son travail entre Pogba et Matuidi afin de bloquer le jeu des Bleus sur un demi-terrain. En phase défensive, il n’hésitait pas à redescendre très bas pour aider Rotan et Stepanenko. Fatigué, Edmar a cédé sa place à Bezus à l’entrée du dernier quart d’heure (76e) et sera clairement un problème à solutionner pour les Bleus dans quatre jours.
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FOOTBALL Ukraine - France (Ribery)

Crédit: Eurosport

L’Ukraine par les ailes : 

Paradoxalement, c’est après cette occasion (Rémy, 28e), et alors que la demi-heure de jeu venait d’être franchie, que les Français ont donné l’impression de baisser de pied. Beaucoup moins entreprenant au pressing, ils ont commencé à subir les remontées de balle très efficaces des Ukrainiens dans les couloirs. Côté droit, les Jaunes s’appuyaient évidemment sur Yarmolenko qui recevait le soutien d'Edmar, Zozulya et Fedetskiy pour combiner autour de Matuidi, Abidal et Evra. Cette présence en nombre a souvent permis à l’Ukraine de passer dans le dos d’Evra pour forcer Abidal à se décaler dans le couloir.
A gauche en revanche, Konoplyanka se retrouvait très souvent en solitaire, bloqué par deux ou trois adversaires. Dans l’entrejeu, Rotan et Stepanenko étaient des solutions de soutien, tout comme les défenseurs centraux en cas de force majeure. Là aussi, les Ukrainiens ont joué très intelligemment leurs phases de possession, évitant les pertes de balle qui auraient pu offrir des munitions aux Bleus en contre-attaque. Bloquer les circuits principaux et limiter le jeu en transition : une formule classique mais qui a fait et fera toujours ses preuves dans ce genre de rencontres décisives.

Deuxième mi-temps : 

Après avoir souffert avant la mi-temps, les Bleus ont eu un petit coup de mieux après la pause. Reprenant le pressing du début de partie dans la foulée de Nasri et Giroud, les Français sont parvenus à dégager quelques espaces à Ribéry côté gauche. Malheureusement pour eux, ces derniers ont surtout permis de constater que Fedetskiy ne cèderait rien au Bavarois sur ce match.
Passée cette courte période, le match a basculé à l’heure de jeu, l’Ukraine débloquant la marque par Zozulya (61e,voir l’analyse tactique du but). Quatre minutes après, Nasri manquait la balle d’égalisation à la conclusion d’un mouvement avec Ribéry et Giroud. Un mouvement initié par une passe de Pogba dans la défense ukrainienne. Sur cette occasion, les attaquants bleus ont enfin pris le dessus sur l’impact physique ukrainien… Mais ce fut la seule fois de la rencontre.
La sortie de Rémy dans la minute suivante, au profit de Sissoko (66e), a mis un premier coup aux offensives des Bleus. L’ancien Toulousain n’a pas eu plus d’impact offensif que son partenaire à Newcastle et les Bleus ont en plus dû composer avec une équipe d’Ukraine surmotivée après son ouverture du score. Moins pressant mais toujours aussi solidaires, les Ukrainiens ont fait front dans leurs 35 derniers mètres, explosant en contre-attaque en se servant des déplacements de Zozulya en pointe pour tenir le ballon en attendant les montées de Yarmolenko, Konoplyanka ou Edmar.
Le dernier quart d’heure a vu Didier Deschamps achever son coaching en faisant entrer Valbuena et Benzema à la place de Nasri et Giroud. Du poste pour poste qui n’a rien changé à la donne, tant offensivement que défensivement pour des Bleus qui, à 0-1, ne s’en sortaient peut-être pas si mal aux yeux de leur sélectionneur. C’était sans compter sur la fin de match très compliquée de la défense française. Après avoir frôlé la sanction avec Abidal, c’est Koscielny qui a finalement concédé un penalty après avoir laissé s’échapper Zozulya (82e). Les Ukrainiens auraient même pu aggraver le score dans le final sur une contre-attaque mal menée par Bezus.
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Ukraine France Remy 2013

Crédit: Panoramic

Conclusion : 

Si l’accent a été mis sur Konoplyanka et Yarmolenko avant la rencontre, l’Ukraine a d’abord prouvé sur ce match pourquoi elle n’avait encaissé que 4 buts sur l’ensemble de la phase éliminatoire (et ce, malgré un groupe relevé avec la Pologne, le Montenegro et l’Angleterre notamment). Agressifs devant et au milieu, dominateurs derrière, les Ukrainiens ont d’abord remporté la bataille des duels face à des Français qui n’ont jamais su répondre au défi proposé.
Tactiquement, l’Ukraine a aussi réalisé le match idéal, ne faisant aucune erreur susceptible d’offrir des munitions à son adversaire (possessions intelligentes), bloquant ses points forts (Ribéry), et insistant sur ses points faibles (dans le dos des latéraux). Une chose est sûre au moment d’aborder le match de mardi : il faudra autant une grande équipe de France qu’une petite équipe d’Ukraine pour espérer aller au Mondial. Un facteur que les Bleus n’avaient pas forcément prévu au moment de négocier ce barrage.
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