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Sotchi 2014 : comment le curling balaie les moqueries dans un paisible entre-soi

Patrick LAFAYETTE

Mis à jour 11/02/2014 à 00:24 GMT+1

La "pétanque des glaces", également appelée curling, est un sport définitivement à part, même lors d'un rendez-vous olympique. Ceci est une chronique paisible.

Eve Muirhead Britain (Reuters)

Crédit: Reuters

C’est un havre de paix. Loin du joli crépitement victorieux des carabines françaises au biathlon, aux antipodes de la fureur d’une descente d’alpin, de la ferveur contagieuse du patinage artistique, de la violence des duels du hockey, des souffles courts du ski de fond et du fracas des bobsleighs : le curling !
Dans son petit Ice Cube à l’ambiance feutrée, devant un public clairsemé, attentif et réservé, la pétanque des glaces a commencé ce lundi son tournoi en cultivant tranquillement, comme à chaque rendez-vous olympique, son étiquette et ses codes. Il n’y a guère que les Norvégiens et leur tenue zig-zag bariolée pour bousculer la tradition et attirer l’attention. On les regarde d’un œil intrigué et méfiant. Ici, on préfère rester entre soi.
Ce vieux jeu aux origines moyenâgeuses, déjà peint par Pieter Brueghel l’Ancien quand c’était une pratique populaire sur les lacs gelés du nord de l’Europe, s’est doucement aristocratisé jusqu’à se poser subrepticement sur les JO d’hiver, où il est objet de moqueries, souvent, mais aussi d’une vraie passion discrète. Il indique d’ailleurs, sans vouloir donner de leçon, la marche à suivre aux petits sports qui aimeraient s’offrir un transat au soleil olympique : candidatez aux Jeux d’hiver, où il y a encore de la place et où, à la différence de ceux d’été, on accueille toujours plus de monde. Les échecs, déjà en lice, et pourquoi pas nos amis boulistes, qui ne toquent peut-être pas à la bonne porte, ont ainsi les moyens d’intégrer un jour le programme qui les fait fantasmer.
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Norway Curling Team

Crédit: Eurosport

Seule, peut-être, avec sa silhouette gracile et ses yeux menthe à l’eau, Eve Muirhead, la brune des Highlands, aimantera les regards au-delà du cercle des initiés
Le curling vit ainsi sa vie un peu en marge, une quinzaine ronronnante et alanguie (11 ou 12 rencontres avant d’arriver au sacre…) que ses stars vont traverser dans l’anonymat : Niklas Edin (Suède), Torger Nergaard (Norvège), David Murdoch (Grande-Bretagne). Seule, peut-être, avec sa silhouette gracile et ses yeux menthe à l’eau, Eve Muirhead, la blonde des Highlands, aimantera les regards au-delà du cercle des initiés… Surtout parce que les couleurs de l’Union Jack ne sont pas celles qui l’habillent habituellement : mais rien n’indique qu’elle ne portera pas la tunique écossaise lors de la prochaine édition, si le référendum de septembre prochain installe un gouvernement indépendant à Edimbourg.
Oui, ce sont ces petits événements en interne qui scandent le rythme des pierres. Les desperate housewives qui en ont choisi la pratique, de préférence au bridge, s’offrent parfois quelques crêpages de chignons vite circonscrits. Les hommes font dans la solidarité virile, souvent mature : ce n’est pas par hasard que les participants les plus âgés de l’histoire des JO ont été d’alertes curlers sexagénaires, en… 1924 à Chamonix !
Il faut avoir vécu une après-midi d’été sur les patinoires en plein air de Saint-Moritz ou Wengen, en Suisse profonde et éternelle, à suivre les lentes évolutions des retraités britanniques, balai en main et tasse de thé entre deux mènes, pour comprendre le cœur de cible de ce passe-temps reposant. Un havre de paix vous dit-on. Où la France, parce qu’elle préfère depuis longtemps d’autres jeux d’adresse ancestraux, parce qu’elle se contente d’un petit foyer et d’une guerre de clochers autour du Mont Blanc, n’est pas de la partie.
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Curling, generic (Reuters)

Crédit: Reuters

Quatre chiffres pour comprendre

  • 1 : une médaille de bronze (en 1924 !), tel est le bilan global, en curling, de la France aux JO. Les Français ne se sont ensuite qualifiés que deux fois pour les Jeux, depuis le retour de la discipline au programme olympique (1998) : en 2002 et en 2010, uniquement pour le tournoi masculin et avec une équipe issue du club de Chamonix.
  • 3 : le Canada (chez les hommes) et la Suède (chez les femmes) sont en lice pour le premier triplé de l’histoire olympique en curling après leurs sacres respectifs en 2006 et 2010. Le Canada, par ailleurs, a toujours été sur tous les podiums masculins et féminins des Jeux depuis 1998.
  • 20 : en kilos, le poids maximal d’une pierre de curling (entre 38 et 44 livres) ; elles proviennent toutes de l’île inhabitée de Ailsa Craig, en Ecosse, où la société Kays exploite une carrière de granite exclusivement dédiée à leur fabrication. Prix : environ 500 euros pièce.
  • 98 : le nombre d’épreuves au programme des Jeux de Sotchi, soit 12 de plus qu’à Vancouver en 2010.
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