Top 10 Monde 2014 : Renaud Lavillenie (France athlétisme) à la 1re place

C'est une grande première pour nous. Depuis une décennie que la rédaction d'Eurosport.fr désigne ses sportifs de l'année, jamais un Français n'avait trôné au sommet de la hiérarchie mondiale. Le palmarès, réservé à des monstres du sport du XXIe siècle, d'Hicham El Guerrouj à Usain Bolt, de Michael Phelps à Valentino Rossi en passant par Roger Federer, Novak Djokovic ou Rafael Nadal, semblait trop loin, trop haut pour qu'un Tricolore puisse y apposer son nom dans un futur proche. Mais en 2014, Renaud Lavillenie s'est imposé presque comme une évidence. Pas parce qu'il est Français. Pas, non plus, pour une question d'impact "médiatique". Non. Un impact sportif. C'est bien parce qu'il a fait tomber une de ces barrières que l'on croyait trop solidement ancrée pour s'écrouler si vite que l'Auvergnat hérite de cette place.

Renaud Lavillenie a donc battu un record du monde cette année. La belle affaire. En réalité, il n'a pas battu un record du monde. Il a battu le record de Serguei Bubka. Et ça change tout. C'est dans cette subtilité que tient la raison de son sacre. Un jour, c'est le sens de l'histoire, Lavillenie sera dépossédé de son record. Quelqu'un, à son tour, ira plus haut que lui. Peu importe. Le Clermontois restera l'homme qui a déboulonné un mythe. Il y a des records dont on se souvient. Et il y a trois raisons pour lesquelles ces records-là restent : soit parce qu'ils impliquent une performance alors inimaginable (les 8,90m de Beamon, par exemple), soit parce qu'ils brisent une barrière (les 10 secondes sur 100m, les 3'30" sur 1500m, les 6 mètres à la perche, etc.) soit, enfin, parce que le précédent record portait en lui une empreinte presque mythique.

C'est le cas de celui que Renaud Lavillenie a fait chuter. Serguei Bubka constituait la référence à la perche depuis quasiment trois décennies, sans discontinuer. Depuis le 31 août 1984 exactement. Ce soir-là, à Rome, au terme d'un concours de dingues, Thierry Vigneron avait détenu le record d'une poignée de minutes avec un saut à 5,91m. Puis Bubka a franchi 5,94m et personne, plus personne, n'a été capable de le suivre. Son dernier record du monde, les fameux 6,15m, dataient eux de 1994. 20 ans, donc, quand Renaud Lavillenie est allé un centimètre plus haut. A Donetsk. Chez Bubka, et sous les yeux de celui-ci. Ce "hasard" a sans doute renforcé encore l'aspect magique de la performance du Français.

Renaud Lavillenie a raison de considérer, comme il nous l'a expliqué dans l'entretien qu'il a accordé à Eurosport.fr, qu'un titre olympique possède, de par son aspect éternel, une force qu'un record du monde, à la durée de vie par nature limitée, n'aura jamais. Mais à l'inverse, des champions olympiques, en athlétisme, il y en a une petite cinquantaine à chaque édition, hommes et femmes confondus. Des records comme celui qu'il a conquis en 2014, sont, eux, nettement plus rares. C'est cette rareté qui confère sa force à son exploit et l'installe, de fait, dans l'histoire de son sport. Dans l'histoire du sport.

Le côté exceptionnel de la performance a donc emporté la décision au sein de la rédaction, repoussant les concurrents de Lavillenie, de Marc Marquez à Rory McIlroy en passant par les héros, nombreux, des Jeux d'hiver. Pour le priver de ce trophée qu'il nous a fait l'honneur de recevoir dans nos locaux, il aurait fallu un autre extra-terrestre. Une saison à la Djokovic 2011 en tennis ou un quintuple champion olympique à Sotchi sortant incontestablement de la mêlée (ils sont trois, en Russie, à avoir décroché trois titres). Pour nous, c’était l'année Lavillenie, alliant un exploit hors du temps et une régularité remarquable dans la performance. C'était l'année du nouveau tsar.