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Jean-Pierre Vidal : "Je me touche le nez et je me rends compte que ça saigne bien"

François-Xavier Rallet

Mis à jour 21/01/2016 à 18:34 GMT+1

KITZBÜHEL - Il y a dix ans, jour pour jour, Jean-Pierre Vidal décrochait sa seconde victoire en Coupe du monde, à Kitzbühel. Une journée mythique, de la course jusqu’à la mythique soirée au Londoner, qui a marqué à vie notre consultant.

Jean-Pierre Vidal lors du slalom de Kitzbühel 2006

Crédit: Panoramic

Voilà dix ans que vous vous êtes imposé à Kitzbühel. Ça vous paraît loin ou vous avez l’impression que c’était hier ?
JEAN-PIERRE VIDAL : Un peu des deux, en fait. En terme d’émotion et de sensations, c’est un truc que je n’ai jamais oublié. C’est pour ça que je l’ai impression que ça s’est passé il n’y a pas si longtemps. Après, le ski a vite évolué depuis. Et cette année, on voit bien que pour gagner à Kitzbühel, ça ne va pas être simple. La discipline progresse encore. Le matériel a évolué, les prises d’angles aussi. La technique également. Si on calque les images de ma victoire en 2006 avec celles de cette année, il y a pas mal de choses qui ont bougé.
Si vous deviez garder une image de ce 22 janvier 2006…
J.-P.V. : Ce jour-là, ce que je retiens surtout, c’est la Marseillaise sur le podium. C’était super sympa. Ça faisait une éternité qu’un Français n’avait pas gagné à Kitzbühel. C’était qui d’ailleurs ? Je n’ai pas plus le nom en tête…
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Jean-Pierre Vidal sur le podium du slalom de Kitzbühel 2006

Crédit: Panoramic

Bravo ! C’était votre cousin, Jean-Noël Augert, en 1973...
J.-P.V. : Exact ! 33 ans avant moi, ça commençait à en faire du temps. Cette longue disette marque les esprits. Que ça soit chez le staff ou les athlètes. Il fallait qu’on mette fin à ça. Finalement, ma victoire a un peu débloqué tout ça. On l’a vu avec les victoires de Julien (Lizeroux en 2009) et de "Jibé" (Grange, en 2008 et 2011) qui ont suivi. Dans le sport de haut niveau, c’est compliqué quand il y a des gouffres comme ça à combler. Quand je gagne à Kitz’, c’est une fierté pour moi mais aussi pour toute l’équipe. On se dit : "enfin !"
Ce jour-là, vous faites le meilleur temps de la première manche. Que se passe-t-il à ce moment-là dans votre tête ?
J.-P.V. : Comme toujours, quand on est en tête d’une première manche, il y a une grosse pression. Surtout là-bas, à Kitzbühel. C’est la Mecque du ski. Mais j’avais l’expérience avec moi ce jour-là. Ce n’était pas la première fois que je refermais le portillon. Ça m’a aidé. Il y a des jours, comme aux JO (NDLR : de Salt Lake), où on se sent tellement bien qu’on ne doute pas trop. On se sent fort. Entre les deux manches, je suis assez confiant.
Et puis il y a cette image de vous dans l’aire d’arrivée. Vous célébrez votre victoire, avec le nez en sang…
J.-P.V : En fait, je me prends un piquet dans la tête au bout de dix portes. Je ne sais plus si c’était un bleu ou un rouge… Mais je miserais sur un bleu (rires). Ça me déconcentre un peu mais avec la force mentale et le matériel qui est super, je réussis à faire une bonne seconde manche. Quand je le percute, je sens que ça me fait mal. Ça a tapé fort, mais je suis tellement dans la course. Ce n’est qu’en bas que je me touche le nez et que je me rends compte que je saigne bien.
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Jean-Pierre Vidal lors du slalom de Kitzbühel 2006

Crédit: AFP

Sur le podium, on trouve deux Autrichiens à vos côtés. Vous a-t-on reproché d’avoir un peu gâché la fête ?
J.-P.V. : Ce qui est sympa à Kitzbühel, c’est que le public est connaisseur. Mais vraiment. J’ai connu ça à Schladming quand je fais deuxième derrière Bode Miller (NDLR : en 2002) : quand le spectacle est beau, les Autrichiens sont contents, même si c’est un étranger qui gagne. Après, c’est sûr que s’imposer à Kitzbühel, c’est surtout mythique pour les athlètes. Un skieur qui gagne là-bas, on parle de lui toute l’année en Autriche. J’ai surtout gâché la fête de Reinfried (NDLR : Herbst, le 2e) et Benni (Raich, 3e) en fait (rires). Mais c’est le sport de haut-niveau, ça.
Vous gagnez à Kranjska Gora en décembre 2001, quelques semaines avant votre titre olympique de Salt Lake City. En 2006, ce triomphe à Kitz’ intervient également juste avant les JO de Turin…
J.-P.V. : C’est vrai que le scénario était très ressemblant. Après cette victoire, je me suis dit que j’avais une vraie chance de victoire aux Jeux. J’étais revenu au plus haut niveau après quelques années difficiles. Et j’y croyais, c’est vrai. Malheureusement, on sait ce qui s’est passé pour moi à Turin (NDLR : Vidal s’est cassé le bras gauche à la veille du slalom olympique le jour de son anniversaire, n’a pu défendre son titre et a mis fin à sa carrière dans la foulée), mais c’est vrai que le timing était parfait.
En quoi cette course est différente des autres ?
J.-P.V. : Kitzbühel, c’est un peu un mini Championnat du monde. Encore plus quand c’est une année creuse, sans JO ni Mondiaux. Comme cet hiver. Tout le monde a les yeux rivés sur cette course. C’est la course où il y a la plus grosse prime, où il y a le plus de monde, où il y a le plus de télévisions qui retransmettent. Donc pour résumer, c’est LA course à gagner dans la saison.
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Jean-Pierre Vidal lors du slalom de Kitzbühel 2006

Crédit: Panoramic

A l’époque, vous aviez gagné environ 50 000 euros. Environ deux fois moins que le skieur qui s’imposera dimanche…
J.-P.V : Oui… Mais c’est une bonne chose. Les retombées ne cessent de croître car le prix du billet pour assister aux épreuves ne cesse d’augmenter. En conséquence, les organisateurs augmentent aussi les primes et récompensent les athlètes Ils maîtrisent bien leur sujet. L’organisation à Kitzbühel joue vraiment le jeu de ce côté-là. Ils ont compris que le mythe se construisait grâce aux skieurs et à leurs performances. Et c’est important de garder une trace de tout ça. On le voit avec les télécabines qui portent le nom des vainqueurs. Tout ça fait partie de la légende.
La soirée qui suit une victoire fait aussi partie du mythe…
J.-P.V. : Ah la fête au Londoner, c'était quelque chose, c’est sûr. C’était l’une des dernières fois où le bar a ouvert ses portes pour les skieurs. Le propriétaire a changé il y a 7-8 ans. A l’époque, chaque vainqueur finissait sa course là-bas. C’était un beau moment de partage, avec les supporters, les coaches. C’était open-bar pour tous les invités du vainqueur. Je me rappelle que Bode Miller avait son "corner" réservé. Et c’était la folie, c’est sûr. On s’était bien lâché. Aujourd’hui, avec les réseaux sociaux, c’est un peu plus compliqué (rires)…
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