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Roland-Garros : Pourquoi Federer aurait intérêt à ne pas jouer à Paris

Laurent Vergne

Mis à jour 17/04/2017 à 16:44 GMT+2

Jouera, jouera pas ? Après avoir annoncé son absence de l'intégralité de la préparation sur terre battue, Roger Federer laisse maintenant planer le doute sur sa présence à Roland-Garros. Et si le bon choix pour le Suisse était de ne pas se rendre à Paris à la fin du mois de mai ?

Roger Federer.

Crédit: Panoramic

La dernière fois que l'on a vu Roger Federer sur la terre battue de Roland-Garros, il venait d'être battu par son compatriote Stan Wawrinka en quarts de finale. C'était en 2015. Deux ans déjà. Forfait l'année dernière, le Bâlois envisage très sérieusement de faire à nouveau l'impasse sur le Grand Chelem parisien. Après avoir annoncé qu'il ne disputerait pas un seul tournoi sur l'ocre avant Roland, il a mis samedi en suspens sa présence Porte d'Auteuil. "Décision le 10 mai", a-t-il averti ce week-end.
Il ne s'agit pas ici de lancer le concours de pronostics. L'intéressé restant lui-même indécis, tout est ouvert, même s'il a assuré que "pour l'heure", son "intention est de disputer Roland-Garros". La vraie question réside plutôt dans la pertinence du choix que l'ancien numéro un mondial opèrera : Roger Federer a-t-il vraiment intérêt à s'aligner à Roland-Garros ?
C'est évidemment plus une affaire de contexte qu'un débat empirique. Par essence, il faut toujours souhaiter la présence des plus grands acteurs sur les plus grandes scènes. L'absence de Federer serait regrettable, d'autant qu'elle légitimerait la possibilité qu'il ne revienne plus jamais sur la terre parisienne. Comme beaucoup, je le regretterais.

Venir à Paris pour gagner... ou ne pas venir du tout

Mais s'il n'a jamais été un champion ordinaire, il n'est plus un joueur tout à fait comme les autres. A bientôt 36 ans, il a passé la moitié de son existence sur le circuit professionnel. Or, s'il veut rester compétitif durablement, et cela semble être le cas puisqu'il a fixé 2019 comme horizon, Federer n'a d'autre choix que de se ménager. Et surtout de cibler ses objectifs. Plus que jamais, quand il s'aligne quelque part, ce doit être avec la conviction qu'il est en mesure d'aller au bout. C'est sans doute cela qui motivera au final sa décision : suis-je capable de gagner Roland-Garros ? De la réponse à cette question dépendra sa présence à Paris fin mai.
C'est parce que j'ai beaucoup de mal à envisager une réponse affirmative à cette interrogation que je pense que Roger Federer aurait sans doute intérêt à zapper Roland-Garros. Bien sûr, il peut paraitre cocasse ces temps-ci de miser contre lui, à l'heure où il vient d'accomplir le triplé majeur du premier trimestre que seul Novak Djokovic avait accompli (à trois reprises !) au cours des dix dernières années.
Pour autant, en dépit de son extravagante réussite actuelle, j'ai beaucoup de mal à imaginer Federer en grand triomphateur le 9 juin sur le Chatrier. Depuis 2012, il n'a gagné qu'un seul titre sur terre, il y a deux ans à Istanbul, un tournoi mineur, où il n'avait eu à battre que Cuevas, Schwartzmann, Gimeno-Traver et Nieminen. En choisissant de ne pas disputer le moindre tournoi de préparation avant Roland-Garros, Federer diminue de fait ses chances de victoire à Paris.
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Roger Federer lors de son titre à Istanbul en 2015. Son seul titre sur terre au cours des dernières années

Crédit: Panoramic

Paris n'est pas Melbourne

Alors, oui, il s'est imposé à Melbourne au sortir d'un semestre vierge. Mais on peut douter d'une ré-adaptation aussi souple sur terre battue. Federer est-il apte à jouer et gagner sept matches au meilleur des cinq sets sur terre en ayant joué seulement cinq rencontres sur cette surface au cours des 24 derniers mois ? Cela semble complexe. Est-il capable de battre Nadal, Djokovic, Murray ou Wawrinka en trois sets gagnants sur terre ? A minima, on peut s'interroger.
Mais le plus gros handicap dans son cas, c'est la suite du calendrier. Si l'enchainement terre-gazon n'était pas aussi brutal, il aurait pu venir à Paris l'esprit tranquille. Mais voilà, entre la fin de Roland-Garros et le début de Wimbledon, il n'y aura que trois semaines.
La campagne sur herbe démarre même le lendemain de la finale parisienne. Federer est d'ailleurs engagé à Stuttgart dès le 12 juin. Il doit ensuite disputer le tournoi de Halle. Imaginons que le Bâlois aille en quarts de finale à Roland-Garros, avec deux ou trois matches en cinq sets et un dos qui siffle. Prendra-t-il le risque de compromettre ses chances pour Wimbledon ? Pas sûr que le jeu parisien vaille la chandelle londonienne.
A partir de la mi-juin, Federer va entrer dans une zone extrêmement chargée : deux tournois de préparation sur herbe plus Wimbledon. Puis la tournée américaine arrivera vite. Entre mi-juin et début septembre, ce sont six tournois, dont deux majeurs et deux Masters 1000 que Federer pourrait être amené à disputer.
Roger Federer aurait-il intérêt à ne pas s'aligner à Roland-Garros ?

"All In" à Wimbledon ?

Reste l'argument du classement. En esquivant complètement la terre battue, le Suisse limite ses chances de reconquête du pouvoir, c'est indéniable. A la sortie de Roland-Garros, il est probable qu'il ne sera plus numéro un à la Race.
Mais, d'une part, l'accès au trône ne lui serait pas fermé de façon rédhibitoire. Ses 4000 points pris depuis le mois de janvier constituent un matelas intéressant et un second titre en Grand Chelem pourrait lui permettre d'envisager sérieusement la place de numéro un mondial, même sans terre battue. De toute façon, sa présence à Roland-Garros ne modifierait pas foncièrement la donne, sauf à atteindre au minimum le dernier carré.
Surtout, Federer joue clairement aujourd'hui pour les titres. Le classement sera une éventuelle et agréable conséquence de ses performances. S'il venait à ramasser un maximum de points lors de la courte saison sur gazon, sans doute commencerait-il à y penser. Mais pas avant.
Encore une fois, seule la certitude de pouvoir gagner à Paris l'amènera à y jouer. Je ne suis pas convaincu qu'il en soit convaincu et le pas franchi samedi, celui de l'incertitude, est en sans doute le premier indice tangible. Si la saison ATP était un tournoi de poker, Federer aborderait Roland-Garros avec des cartes faiblardes. Pourquoi donc engager de gros jetons avec une main dépareillée s'il sait pouvoir disposer d'une paire d'as à l'abord de Wimbledon ?
En laissant de côté l'intégralité de la période terrienne pré-Roland-Garros, Federer a d'ores et déjà acté que cette partie de la saison est celle qui l'intéresse le moins. Autant aller au bout de cette logique, s'octroyer deux mois et demi de véritable coupure pour se donner les meilleures chances de briller au second semestre. Là où il pourra envisager de battre n'importe qui, n'importe où.
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Roger Federer - Wimbledon 2016

Crédit: AFP

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