Finale de Wimbledon 2008, Nadal - Federer : les bonnes feuilles du livre (2e extrait)

"Federer doit traverser son chemin de croix. Durant ses dix entretiens avec les médias, il balaie d’un revers de la main les allusions et autres spéculations concernant son déclin. "Je n’ai rien lu et rien entendu à propos de ce que l’on dit de moi", déclare-t-il en mentant. Questionné à propos des remarques peu charitables de son aîné Borg, Federer fait la grimace. "Il a le droit de dire ce qu’il pense et je me moque de ce qu’il peut bien raconter. Dès qu’on lui met un micro sous le nez, on lui fait dire tout et n’importe quoi. Parfois il dit des choses positives, parfois négatives." Lorsque l’on demande à Federer s’il pense parler de tout cela avec Borg, il répond : "Oh non, je ne me permettrais pas de le rencontrer avec une telle approche. Je ne veux pas de problème avec le King."

Mais toute cette veillée mortuaire, d’une malveillante jubilation, qui se prépare autour de Federer ne fait que l’énerver. En quatre ans, il a gagné tout ce qu’il était possible de gagner, avec tous les honneurs et la reconnaissance du métier. Comment seulement quelques mois de battement peuvent-ils lui attirer autant de commentaires négatifs ? Ses actions passées n’ont-elles plus aucune signification ? "Pour être honnête, j’ai été très surpris par l’extrémisme et les proportions que cela a pris. J’entendais : 'Il n’est plus capable de gagner quoi que ce soit désormais.' Vous essayez de l’ignorer, mais ce n’est pas si facile et cela vous affecte, c’est très difficile."

Federer se trouve dans une position de perdant. S’il se défend des critiques, s’il essaye de minimiser sa récente défaite et continue de se déclarer le grand favori de Wimbledon, il risque de passer pour un présomptueux ou pire un manipulateur en communication. S’il donne la réplique en faisant remarquer l’hypocrisie de certaines personnes - Borg qui s’amuse à dire que quelqu’un est fini après une défaite - il risque de se retrouver diminué par ce genre d’agression gratuite. De façon surprenante, ce sont certains de ses adversaires qui prennent sa défense et font entendre la voix de la raison. Ainsi, lorsqu’on demande à Nadal s’il pense que Federer est, selon l’expression du moment, vulnérable, l’Espagnol lève les yeux au ciel et répond d’un ton ironique : 'Énormément. Imaginez-vous, la semaine dernière il n’a pas perdu un seul set. Et il a gagné 59 matchs sans en perdre un seul... Soyons sérieux!'"