Tour de France 2024 : Après son Giro réussi, Julian Alaphilippe n'a pas intérêt à participer à la Grande Boucle

Avec Tadej Pogacar, il était probablement le bizut le plus attendu. Et comme le phénomène slovène, vainqueur incontesté de l'épreuve, il n'a pas déçu. Julian Alaphilippe a participé au Giro pour la première fois de sa carrière en ce mois de mai et, le moins que l'on puisse dire, c'est qu'il n'y est pas entré sur la pointe des pieds. Le Français a au contraire été l'un des acteurs les plus en vue pendant les trois semaines de course, multipliant les offensives et se glissant dans un nombre incalculable d'échappées. Jusqu'à décrocher la récompense qu'il recherchait tant, à savoir une victoire d'étape pleine de panache, obtenue à Fano.

Alors que son début de saison n'incitait pas vraiment à l'optimisme, entre chutes, blessures et piques envoyées par son manager Patrick Lefevere, le double champion du monde (2020 et 2021) a semblé renaître de l'autre côté des Alpes. "Je n'ai jamais douté, je savais que je pouvais revenir à mon meilleur niveau et que j'avais de belles choses à faire. Même s'il y a eu des moments difficiles, je suis revenu", s'est d'ailleurs félicité l'intéressé au moment de tirer le bilan de son aventure italienne. Ce bilan, justement, a été tellement resplendissant qu'une idée a commencé à germer : et si le puncheur tricolore prenait le départ du Tour de France, le 29 juin prochain à Florence ?

Cette hypothèse n'avait pas lieu d'exister en début d'année mais, comme révélé par L'Équipe, Remco Evenepoel ferait le forcing pour avoir le natif de Saint-Amand-Montrond à ses côtés en juillet. "Quand on dit que Remco veut Julian, c'est vrai. Il est à la base de la démarche", confirme Philippe Gilbert, consultant Eurosport et fin connaisseur de la Soudal Quick-Step. Après tout, on comprend aisément le Belge, qui fera ses débuts sur le grand rendez-vous hexagonal et pourrait ainsi s'appuyer sur l'expérience considérable de son équipier. S'il s'en tient à ses ambitions personnelles, Alaphilippe aurait cependant tout intérêt à faire l'impasse sur le Tour.

Cela peut sembler surprenant de prime abord. Oui, l'homme aux trois victoires sur la Flèche Wallonne adore la Grande Boucle, où il a déjà tant brillé par le passé et où il peut encore, à l'évidence, faire vibrer ses nombreux supporters. La tentation de s'y aligner à nouveau serait donc tout à fait légitime. Mais le calendrier de l'été 2024 comprend une autre échéance, ô combien prestigieuse. "À la place de Julian, je refuserais (d'aller sur le Tour de France, ndlr) pour une bonne raison : il y a les JO cette année, en France qui plus est, sur un parcours qui convient très bien à Julian", expose sobrement Gilbert.

Longue de 273 kilomètres, avec dix côtes répertoriées tout au long du tracé, l'épreuve en ligne des Jeux de Paris a un profil qui semble en effet taillé sur mesure pour le coureur de 31 ans, très à son aise dès qu'il s'agit de placer des attaques incisives dans des bosses et de négocier des virages techniques. S'il est sélectionné - cela fait peu de doute, bien que ce ne soit pas encore officiel -, le protégé de Thomas Voeckler fera vraisemblablement partie des prétendants à la médaille, le 3 août prochain. À condition qu'il profite du début de l'été pour se préparer dans cette optique, au lieu d'enchaîner deux grands tours énergivores, dont un dans la peau d'un équipier de luxe.

"Vu la forme qu'il a eue sur le Giro et le peu de temps de repos qu'on a pour aller au Tour, je privilégierais un stage, une prépa spécifique aux JO", préconise Philippe Gilbert, qui estime qu'Alaphilippe ne travaillera pas de façon optimale s'il endosse un rôle d'ange gardien auprès d'Evenepoel. "Imaginez que Remco prenne le maillot jaune, il faudra rouler tous les jours pour lui, ça ne sera pas la prépa idéale pour Julian, concède l'expert Eurosport. Il faudra faire du tempo, ne plus faire d'intensité. Or, Julian a besoin de travailler son explosivité, elle revient tout doucement, il s'améliore de jour en jour."

"Il a besoin de continuer à travailler son punch. Il doit se reposer d'abord et travailler ça", martèle le champion du monde 2012, qui avait terminé 19e des Jeux Olympiques de Londres. En bref, et même s'il n'est pas du genre à courir à l'économie, "Alaph" devra avant tout bien cerner ses objectifs. "Que veut-il ? Refaire le Tour de France ou mettre toutes les chances de son côté pour devenir champion olympique ?", s'interroge Gilbert. Au fond, poser la question, c'est déjà y répondre.