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Il était une fois le Tour

Eurosport
ParEurosport

Publié 14/07/2009 à 17:15 GMT+2

Chaque jour, découvrez ou redécouvrez une grande page de l'histoire du Tour de France. Mardi, cap sur l'édition 1995 et sur un fameux 14 juillet. Pris d'un coup de folie, Laurent Jalabert se lance dans une offensive d'envergure à 200 km de Mende. Il remporte l'étape et fait vaciller Indurain.

Pour tout suiveur du Tour de France, Radio Tour est un outil indispensable. Les informations sont distillées en direct dans les voitures, permettant à chacun de se tenir informé des péripéties de l'étape pendant qu'il rallie la ville arrivée. En ce matin du 14 juillet, le grésillement si spécifique de Radio Tour semble pourtant avoir des ratés. Quand la voix de Radio tour égrène le nom des coureurs présents dans l'échappée sortie du peloton à 198 kilomètres de l'arrivée à Mende, il semble y avoir une erreur. Dossard 61, Laurent Jalabert. Pardon? Dossard 61, Laurent Jalabert, insiste la voix.
Champion réfléchi et raisonnable, le Mazamétain a été pris d'un véritable coup de folie. Il est vrai que, depuis quatre mois et sa victoire dans Paris-Nice, Jalabert a pris conscience qu'il pouvait devenir davantage qu'un homme des courses d'un jour. Les pentes commencent à lui plaire. A 26 printemps, un an après son terrible accident d'Armentières, Jaja est en train de prendre une nouvelle dimension. Ce 14 juillet va constituer une étape supplémentaire dans la maturation de la star du cyclisme tricolore. "Après ce qui m'est arrivé l'an passé, dit-il, j'ai une énorme envie de réussir cette saison. Et quand les jambes vont bien, la tête suit ". Là, elle va même tourner. Le coup (de folie) part donc moins de 25 kilomètres après le départ de Saint-Etienne. Jalabert a accéléré dans la première montée, la côte de Saint-Maurice-en-Gourgois. Le peloton revient une première fois.
Panique chez Banesto
L'ambiance dans le peloton devient électrique. A quoi joue Jalabert, s'interrogent les coéquipiers du maillot jaune Miguel Indurain, peu habitués à une telle fronde, tant le Navarrais a pris l'habitude de cadenasser la course. Mais Jalabert insiste. Il repart, flanqué cette fois de l'Italien Dario Bottero. Indurain n'a plus que trois équipiers à ses côtés, les autres sont pris dans une cassure bien mal venue. C'est l'hallali chez Banesto. Les attaques se succèdent. Dont celle de Neil Stephens, équipier de Jalabert. Cette fois, Indurain en personne tente de faire le ménage. Stephens est repris. Puis Johan Bruyneel, le futur manager de Lance Armstrong, alors coéquipier de Jalabert, place une nouvelle bombe. Jaja, devant, attend le renfort qui ne vient pas. Indurain va encore chercher Bruyneel. C'est la guerre des nerfs. Botero et Jalabert sont alors seuls devant, avec une avance réduite. Et voilà les ONCE qui remettent ça. Au tour de Melchior Mauri, vainqueur de la Vuelta 1991, une grosse caisse comme on dit, de prendre la fuite. Cette fois, Indurain ne peut plus y aller. Mauri revient sur le duo de tête. Jalabert sourit. Il va franchement se poiler, quelques secondes plus tard, en voyant arriver Neil Stephens en compagnie de Massimo Podenzana et Andrea Peron. Le gros coup vient de partir. Six hommes devant, dont trois ONCE.
Jalabert s'est retourné une fois, deux fois, dix fois. Dix fois il aurait pu se relever. Il aurait dû, s'il avait fait preuve de bon sens. "Je sais que j'aurais dû me relever, raconte Jalabert, mais quand j'ai vu Mauri arriver, je me suis dit qu'il fallait y aller. Il fallait qu'ils viennent me chercher. J'étais prêt à prendre le risque d'exploser." Mais Jalabert n'explosera pas. C'est plutôt la hiérarchie qui va se trouver sur le point d'éclater. A mi-étape, l'avance des échappés dépasse les 10 minutes. Prise au piège par sa consoeur espagnole, la Banesto se voit contrainte de mener la poursuite. Le vaisseau ibérique commence sérieusement à tanguer quand, à moins de 80 kilomètres de l'arrivée, Jalabert se retrouve même maillot jaune virtuel avec plus d'une minute de marge sur Miguel Indurain. Le Navarrais commence à ne plus rigoler du tout. "Je mentirais en affirmant que je n'y ai pas pensé. Mais je me doutais bien qu'on fléchirait dans le final et qu'il serait impossible de prendre le maillot, avoue toutefois Jalabert. Il nous aurait fallu au moins 15 minutes pour cela." Le jaune, Jalabert ne le verra pas. Il n'aura fait que le rêver.
"La cerise sur la gâteau"
N'empêche, au cours de ce Tour 1995, le 5e du roi Miguel, il aura été le seul à faire vaciller un tant soit peu le maître. Pour ne pas perdre la face, Jalabert doit tout de même arracher cette étape, à défaut de troquer son maillot vert pour du jaune. Alors dans l'ultime montée du Causse, terrible avec ses passages à 13%, il s'arrache, seul. Mauri et Stephens, épuisés, ont tout donné pour leur leader. Podenzana et Bottario, les Italiens, s'accrochent, mais ne peuvent suivre longtemps le rythme du Français. Irrésistiblement, Jalabert s'envole vers l'une des plus grandes victoires de sa carrière. Derrière, la bagarre s'est déclenchée. Indurain et Pantani ont fait exploser le peloton. Riis a suivi, Zülle un peu moins. Le groupe maillot jaune coupe la ligne avec 5'41" de retard sur Jalabert, qui remonte à la troisième place du classement général.
Le Mazamétain devient un héros, obtenant un certain rééquilibrage vis-à-vis de Richard Virenque, au palmarès inférieur au sien, mais à la popularité déjà plus fortement établie. "J'étais venu sur ce Tour pour gagner une étape. Gagner le 13 ou le 15 aurait été formidable. La Fête Nationale, c'est la cerise sur le gâteau ", conclut Jalabert. Il terminera à Paris à une superbe quatrième place, qui, croit-il, lui ouvre les portes d'une victoire future. Jaja devra déchanter par la suite. Il ne gagnera jamais ce Tour, mais trouvera à travers de grandes envolées sa parcelle de gloire. Comme en ce 14 juillet.
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