Les débats du Tour : Les favoris vont-ils attendre les 30 derniers kilomètres pour bouger ?

François-Xavier Rallet

Mis à jour 16/07/2017 à 10:56 GMT+2

TOUR DE FRANCE - Chaque jour, trois questions sont posées à deux membres de la rédaction. Chacun donne son point de vue et vous invite à prendre part à la discussion. Ce samedi, on se demande si Fabio Aru a bien calculé ses efforts depuis quinze jours, si Michael Matthews a une solution pour aller chercher Marcel Kittel et on espère voir du mouvement dimanche, en fin de 15e étape.

Froome, Aru, Bardet, Uran

Crédit: Getty Images

Fabio Aru était-il en forme trop tôt sur ce Tour ?

François-Xavier Rallet
Fabio Aru a connu un sacré coup d'arrêt dans la rampe finale de Rodez. Le voir autant en difficulté m'a surpris. Le voir être abandonné par ses équipiers, beaucoup moins. Astana n'est pas équipée pour lui rendre la vie plus simple. Surtout après les abandons de Cataldo et Fuglsang. Excellent en première semaine, vainqueur royal à la Planche des Belles-Filles, très solide lors de la deuxième, l'Italien commence à payer le contrecoup de ses nombreux efforts. Mais attention, tout n'est pas perdu pour lui. Il n'est finalement qu'à 18 secondes de Froome.
Pour espérer succéder à Vincenzo Nibali dans la camp italien au palmarès du Tour, Aru va devoir inventer quelque chose en troisième semaine. Il avait promis de faire vivre un enfer à Froome. Il n'avait pas précisé quand et comment et il faut avouer qu'on reste un peu sur notre faim. S'il veut renverser de nouveau le Britannique, il va lui falloir retrouver ses jambes des premiers jours car sur le chrono marseillais, "Froomey" risque de lui en mettre "une petite". Mais qu'Aru se rassure, il ne sera sûrement pas le seul adversaire du "Kenyan blanc" dans ce cas-là.
Christophe Gaudot
Pour moi oui. Et ceci peut s'expliquer d'une manière assez simple. Tout son début de saison était axé sur son grand objectif de l'année : le Giro, qui partait de chez lui en Sardaigne. Contraint de déclarer forfait et de changer son fusil d'épaule à cause d'une blessure au genou, Aru a dû s'adapter, ce qui est d'autant moins facile quand on manque encore d'expérience, comme lui.
Au Dauphiné, le Sarde était apparu en grande forme, terminant sur les talons de Chris Froome au classement général (5e). A La Planche des Belles Filles, il avait dynamité la course et fait naître de grands espoirs. Depuis ? Plus rien. Je suis un peu dur mais il avait promis la guerre à Froome et on attend toujours. Dans le final vers Rodez, il a certes été esseulé beaucoup trop tôt mais il a aussi été incapable de remonter à la pédale. Dans la bosse finale, on l'a vu se tasser sur son vélo quand Froome, plus loin devant, était plus aérien, plus fluide. Pour connaître une réponse totale à cette question, il faudra sans doute attendre les Alpes. Mais les signes ne sont pas bons.

Matthews peut-il encore briguer le maillot vert ?

François-Xavier Rallet
A la pédale ? Non. Sur un coup du sort ou une mise hors course de son principal adversaire ? Evidemment. Une réponse de Normand, vous allez me dire. Et vous aurez raison. Si on est raisonnable, il est difficile d'imaginer un autre scénario qu'un Marcel Kittel affublé de vert sur le podium des Champs-Elysées. Après cinq années de "saganisme" aigu, l'heure est venue de triompher enfin pour l'Allemand. Mais qu'il reste vigilant. Le Tour est encore long. Les étapes qui peuvent le mettre en péril (et hors-délais) sont nombreuses.
Avec 99 points d'avance, Kittel peut voir venir mais Matthews a confirmé ce samedi qu'il ne lâcherait rien. Meilleur que l'Allemand quand la pente s'élève, l'Australien va tout faire pour le piéger. La Sunweb va-t-elle prendre les choses en main pour y parvenir ? Difficile à dire. Mais après deux semaines rondement menées, Kittel devra s'accrocher. Dès dimanche notamment où le profil risque de lui donner quelques sueurs froides.
Christophe Gaudot
Non. Aucune chance. Quasiment cent points (99) de retard, c'est déjà un avantage énorme en faveur de Kittel mais l'Allemand a en plus deux avantages. Premièrement, évidemment, son ultra-domination dans les sprints massifs. Deuxièmement, l'absence d'arrivées qui conviennent à Matthews jusqu'à la fin du Tour de France. Dimanche, vers Le Puy-en-Velay (15e étape), l'Australien sera évidemment incapable de jouer la gagne alors qu'à Romans-sur-Isère (16e étape), à Salon-de-Provence (19e étape) et sur les Champs (21e étape), Marcel Kittel sera l'immense favori.
Même si Matthews marquait TOUS les points à chaque sprint intermédiaire dans les étapes difficiles (15, 17, 18), il n'inscrirait que 60 points et resterait à 39 unités de son adversaire au classement. Tout ceci me parait bien hypothétique et Kittel est dans une telle forme que je ne peux imaginer qu'il finisse une étape alpestre hors-délais. La Sunweb n'a d'ailleurs pas assez de grimpeurs pour faire exploser l'Allemand au point de le mettre hors course. Pour moi, Kittel remportera, sauf chute, son premier maillot vert à Paris, dimanche prochain.

Dimanche, est-ce que les favoris vont attendre les 30 derniers kilomètres pour bouger ?

François-Xavier Rallet
Avant de profiter d'une seconde journée de repos, le peloton doit encore se farcir 189,5km entre Laissac-Sévérac L'Eglise et Le Puy-en-Velay, ce dimanche. Une étape qui fait le lien entre les deux grands massifs français. Si les baroudeurs devraient trouver un terrain d'expression sur ce parcours vallonné, on espère voir les favoris en découdre également. Encore une fois, l'organisation a placé la dernière grosse difficulté à près de 30km de l'arrivée, le Col de Peyra Taillade (8,3km à 7,4%), une ascension inédite sur l'épreuve.
Certains vont émettre de nouvelles critiques, comme ce fut le cas pour les étapes de Chambéry et Foix. Mais je ne mettrais pas ces trois exemples sur le même plan. Selon Bardet, ce col, qui propose un passage à 14%, est susceptible d'opérer une sélection. Il se peut aussi que le peloton ait beaucoup roulé avant ça pour provoquer des bordures. Les routes sur le Plateau de l'Aubrac sont exposées au vent. Les candidats au général devront se montrer vigilants pour éviter des cassures. Les trente derniers kilomètres sont casse-pattes. Ça descend, puis ça grimpe de nouveau (la côte de Saint-Vidal, 4e cat, 1,9km à 6,8%) avant de redescendre vers le Puy-en-Velay. Le terrain de jeu est appétissant. Aux protagonistes de l'utiliser comme il se doit.
Christophe Gaudot
Ce sera déjà mieux que depuis le début de ce Tour de France ! Si les écarts ténus entre les quatre premiers (29 secondes) rendent ce Tour de France indécis au possible, le spectacle se fait pour le moment attendre. L'étape entre Laissac-Sévrac L'Église et Le Puy-en-Velay (189,5 km) serait un terrain idéal pour une belle bagarre.
Un col de première catégorie dès le kilomètre 17 (la Montée de Naves d'Aubrac), puis un parcours en forme de "montagnes russes" jusqu'au Col de la Peyra Taillade (8,3 km à 7,4% et des passages à 14%) avant un final escarpé. Malheureusement, je ne crois pas que les ténors vont se faire la "guerre" sur cette étape. On l'a vu depuis le début de ce Tour de France, les favoris se regardent beaucoup et les écarts moindres n'obligent personne à prendre des risques. Vous me direz que les Aru et Bardet ont tout intérêt à arriver à Marseille avec un bon matelas d'avance. Je vous répondrai que je suis d'accord mais que pour le moment, j'attends encore l'attaque de grande envergure de l'un de ces deux coureurs. Pour la belle bagarre, j'ai bien peur qu'il faille attendre les Alpes, mercredi et jeudi.
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