65 kilomètres et trois cols : une étape pour le spectacle… et contre Sky ?

On peut avoir gagné le Tour de France quatre fois et craindre encore et toujours l’inconnue dans laquelle les organisateurs de la Grande Boucle vont vous plonger en juillet prochain. Sur la scène du Palais des Congrès de Paris, mardi, le front de Chris Froome s’est ainsi couvert de rides au moment de se projeter sur l’édition 2018, dont le parcours allait être présenté quelques minutes plus tard. “Chaque année c’est différent, il faut changer notre préparation, notre tactique”, annonçait le leader du Team Sky. Les équipes d’ASO n’ont pas démenti cet augure.

Sur le Tour, Froome a déjà connu les pavés (avec succès en 2015, avec malheur en 2014), volé dans le vent et dompté tous types de défis montagneux ou chronométriques. Mais “je n’ai jamais fait une étape de 65km, je partirai dans l’inconnu”, reconnaissait-il après avoir découvert le tracé de la 17 étape du prochain Tour : 65 kilomètres et trois cols entre le départ de Bagnères-de-Luchon et une arrivée inédite au sommet du col de Portet. “Un format dynamique pour une étape dynamite”, promet le patron du Tour Christian Prudhomme.

C’est l’un des plus gros défis du Tour, avec les pavés”, abonde Julien Jurdie, directeur sportif chez AG2R-La Mondiale et homme de confiance de Romain Bardet. Mais si le rendez-vous de Roubaix n’est pas pour avantager l’Auvergnat léger, “on sait que ces étapes très courtes offrent un profil qui plaît à Romain”, nous explique Jurdie. “C’est un avantage pour nous. On sait que la force collective de Sky pourra être mise en difficulté ce jour-là.”

En plus du format, la dernière difficulté inédite oppose un défi supplémentaire à des coureurs en mal de repères. Ils connaissent bien la première partie de l’ascension, jusqu’à Saint-Lary-Soulan. Mais ils devront ensuite prolonger jusqu’au sommet du col de Portet, soit 16km très exigeants (8,7% de pente moyenne).

Avec ce condensé de difficultés (38km d’ascensions, soit 58% du parcours), les organisateurs de la Grande Boucle poussent un cran plus loin une logique déjà éprouvée ces dernières années. L’étape de l’Alpe d’Huez 2011, avec la victoire de Pierre Rolland et un maillot jaune (Thomas Voeckler) bousculé d’entrée, avait validé l’idée selon laquelle un parcours ramassé offrait une course bien plus dynamique. En 2017, il a suffi de 101km vers Foix pour voir Warren Barguil triompher d’une des étapes les plus animées du Tour.

Plus loin dans le temps, François Lemarchand, qui a tracé cette étape vers le Col de Portet, se souvient lui du Tour 1985, son premier en tant que coureur, avec “une arrivée au sommet de l’Aubisque, l’étape faisait moins de 55km”. Pour cette demi-étape, la 18A, les coureurs s’étaient levés aux aurores et avaient commencé par se faire le col du Soulor avant de voir Stephen Roche s’imposer sur l’Aubisque.

Mais de mémoire de Lemarchand, “trois ascensions consécutives comme ça, je crois que c’est nouveau”. Pour les responsables sportifs d’ASO, l’objectif est de “bousculer les stratégies des équipes”. “Sur la ligne de départ, il va y avoir beaucoup de tension, que ce soit chez les leaders, les équipiers et même les staffs d’équipe parce qu’ils ne savent pas où ils vont”, se réjouit Lemarchand. Et nous avec lui.