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Rare mais majestueux : l'Iseran, un géant si discret

Laurent Vergne

Mis à jour 26/07/2019 à 14:22 GMT+2

TOUR DE FRANCE - Après l'Izoard et le Galibier jeudi, le Tour aborde vendredi un autre col mythique du massif alpin avec l'Iseran. Pourtant très rarement emprunté par le Tour, il n'en possède pas moins une aura très particulière.

Les lacets du col de l'Iseran.

Crédit: Getty Images

Au lendemain du tandem légendaire composé de l'Izoard et du Galibier, les coureurs s'attaquent vendredi à un autre monument des Alpes avec l'Iseran. Un géant, point culminant du Tour par essence puisqu'il est le plus haut col routier des Alpes avec son sommet perché à 2770 mètres d'altitude. Majestueux, le col de l'Iseran entretien un rapport particulier avec la Grande Boucle : il fait partie intégrante de sa légende, tout en n'ayant été utilisé qu'avec une grande parcimonie.
Il faut dire que la route de l'Iseran est bien plus jeune que le Tour de France. Les travaux, lancés en 1929, se sont achevés en 1937. Inauguration en grande pompe de ce lieu stratégique, reliant la Haute Tarentaise (Val d'Isère) à la Haute Maurienne (Bonneval), tout près de la frontière italienne, en présence du Président de la République d'alors, Albert Lebrun. Très vite, le Tour se saisit de ce nouveau jouet si imposant. L'Iseran figure ainsi au menu du parcours en 1938 et 1939, lors des deux dernières éditions avant la Guerre.
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1937 : Albert Lebrun, Président de la république, inaugure l'ouverture de la route franchissant le sommet de l'Iseran.

Crédit: Getty Images

Pour sa première, l'Iseran est marqué par un temps épouvantable, qui deviendra sa marque de fabrique. La route n'est encore qu'un chemin de terre, le bitume n'a pas imposé sa loi. Sous une pluie battante, Gino Bartali sauve son maillot jaune dans la descente. Un an plus tard, c'est lors d'un... contre-la-montre de 64 kilomètres menant à Bourg-Saint-Maurice que le géant est emprunté. Bien né sur le Tour, l'Iseran a alors tout pour s'imposer comme un incontournable, mais après ces deux passages précoces, il n'a plus été emprunté que... cinq fois lors des huit décennies suivantes.

L'adieu de Bobet

A la quantité, l'Iseran préfére la qualité, offrant quelques inoubliables pages d'histoire en un minimum d'apparitions. La plus célèbre date sans doute de 1959. Cette année-là, Louison Bobet, triple vainqueur de l'épreuve et roi de la décennie finissante, apparait loin de son meilleur niveau. Le héros tricolore le sait, le déclin est là.
Alors, comme pour toiser sa gloire déchue, Bobet s'inflige l'ascension glaciale de l'Iseran, bien en retrait de la tête de course. Juste après le sommet, il descend de son vélo, enfile un manteau et quitte à jamais le Tour de France. Au sommet, Bartali, suiveur pour un journal italien, assiste à la scène. Gino descend de sa voiture et vient saluer Louison Bobet. L'hommage d'une légende à une autre.
L'Iseran deviendra ensuite le grand oublié du Tour. Après un passage en 1963, il est ignoré pendant près de trente ans, jusqu'à son retour en 1992, où il obtient le classement en hors catégorie. C'est Claudio Chiappucci qui le franchit alors en tête, dans la si fameuse étape de Sestrières, qui vit le grimpeur italien signer un numéro insensé, en solitaire pendant plus de 200 kilomètres avant de s'imposer sur ses terres transalpines. L'Iseran n'était pas venu pour rien.
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Le col de l'Iseran

Crédit: Getty Images

Prudhomme : "Il fait partie du mythe"

L'Iseran impose souvent son propre micro-climat. En 1949, le mercure avoisine les 25 degrés dans la vallée et le soleil règne. Mais au sommet du col, une pluie mêlée de flocons tombe sur les coureurs. C'est cela, l'Iseran. Aussi capricieux que majestueux. En 1996, il dut même être rayé de la carte au tout dernier moment tant la météo était épouvantable. Le départ de l'étape prévu à Val d'Isère avait été reporté en raison de chutes de neige rendant la route impraticable pour une course cycliste.
Jeudi, ce ne sera donc que la huitième ascension du col de l'Iseran sur le Tour en 81 ans. Paradoxalement, c'est peut-être sa discrétion, couplée à sa hauteur, qui lui confère sa place, unique, dans le gotha de l'épreuve. "L'Iseran a été très peu emprunté mais il fait partie du mythe, qui naît souvent de la rareté, soulignait Christian Prudhomme en octobre dernier lors de la présentation du parcours 2019. Il y a aussi son altitude, on est quasiment à l'altitude des sommets environnants, les paysages, toutes les couleurs du ciel. C'est magnifique".
Magnifique, mais éreintant. Vendredi, l'Iseran sera abordé par son versant sud. 32 kilomètres de montée via le marchepied de la Madeleine mais l'ascension proprement dite du col débute dans le superbe village de Bonneval-sur-Arc. Près de 13 kilomètres vous séparent alors du sommet avec une pente moyenne de 7,5%. En dehors de deux replats pour souffler au tiers puis aux trois-quarts de la pente, il n'y a guère de répit. L'avant-dernier kilomètre, à plus de 10% de moyenne, est aussi le plus dur. Là, il faudra s'accrocher. Ou oser, pour ceux qui en auront les moyens...

Ils sont passés en tête au sommet de l'Iseran

1938: Félicien Vervaecke (BEL)
1939: Sylvère Maes (BEL), Meilleur temps - contre-la-montre
1949: Pierre Tacca (FRA)
1959: Adolf Christian (AUT)
1963: Fernando Manzaneque (ESP)
1992: Claudio Chiappucci (ITA)
2007: Yaroslav Popovych (UKR)
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