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Les débats du Tour : Roglic doit-il éviter de prendre le maillot trop tôt ?

Eurosport
ParEurosport

Mis à jour 03/09/2020 à 09:58 GMT+2

TOUR DE FRANCE - Pour une étape de plat aussi calme que celle qui a mené le peloton de Gap à Privas mercredi, il y a pourtant beaucoup à dire au final. Primoz Roglic, clairement candidat au maillot jaune jeudi lors de l'arrivée au Mont Aigoual, ferait-il une mauvaise affaire en prenant si tôt le pouvoir ?

Primoz Roglic

Crédit: Getty Images

La sanction contre Alaphilippe est-elle trop sévère ?

  • Laurent Vergne
Il y a bien des façons de rendre un maillot jaune. A la pédale, face à plus fort que soi. A la (dé)faveur d'une échappée non maîtrisée par l'équipe du maillot jaune. Plus cruellement, sur une chute ou un abandon. Parfois même pour un contrôle positif. Tout arrive. Mais ça, franchement... Ecoper d'une pénalité de vingt secondes pour un ravitaillement dans les vingt derniers kilomètres d'une étape aussi tranquille, c'est probablement un des cas de figure les plus absurdes que l'on puisse imaginer.
Mais aussi "ridicule" soit la mésaventure vécue par Julian Alaphilippe mercredi, elle n'est que la conséquence de la stricte application du règlement. Les coureurs ne l'ignorent pas (a priori), leur équipe encore moins. La formation Deceuninck a commis une erreur, une faute même à ce niveau, et les commissaires sont là pour appliquer la règle. Sinon, elle ne sert à rien.
Si Alaphilippe avait compté une minute d'avance au général, personne n'aurait crié au scandale. Il aurait pris ses 20 secondes de pénalité et aurait conservé son maillot. Que sa marge de manœuvre soit faible et les conséquences douloureuses ne justifie pas qu'on n'appliquât pas ledit règlement. C'est regrettable pour le Français, et même pour la course, mais il ne faut pas confondre circonstance et conséquence dans ce cas de figure.
  • Maxime Dupuis
Le combat de l'esprit et de la lettre. De la cause, de ses conséquences et de la disproportion qui en découle parfois. Combat inutile et désespéré, mais qui a de beaux jours devant lui. Mercredi, au terme d'une des étapes les plus insipides de l'histoire moderne du Tour de France, Julian Alaphilippe en a été victime. Coupable d'être allé chercher un bidon pour un ravitaillement non-autorisé puisqu'effectué à moins de 20 kilomètres de l'arrivée, le maillot jaune a été forcé de rendre sa tunique au terme de la 5e étape.
Pénalisé de 20 secondes, Alaphilippe et son équipe Deceuninck-Quick Step n'auraient pas dû faire une faute aussi absurde. C'est une certitude et personne n'oserait avancer le contraire. Nul n'est censé ignorer la loi. Rien ne nouveau sous le soleil. Néanmoins, une fois que l'on a dit ça, on peut se poser la question de la règle et de la sanction qui parait excessivement lourde de conséquences au regard de la faute.
Sur le papier, vingt secondes, ce n'est pas grand-chose. Quand ça vous ôte un maillot jaune des épaules, cela paraît immense. Un peu trop. Heureusement, Julian Alaphilippe n'a pas semblé trop touché par cette péripétie. "Demain je vais me relever et on n'en parlera plus", a-t-il lancé au micro de France Télévisions.
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Alaphilippe n'est plus en jaune : "Une faute professionnelle de son équipe", pour J.Durand

Des courses sans échappée, est-ce le cyclisme du futur ?

  • Laurent Vergne
Le contexte a sans aucun doute joué dans le scénario de cette étape. Le Tour, ultra-exigeant, est abordé par le peloton dans des circonstances particulières, souvent avec peu de jours de courses dans les jambes, alors qu'il y a encore à peine plus d’un mois, personne n'avait repris la compétition. Et en choisissant d'inscrire au menu une première semaine très dure (sans parler des tourments climatiques de l'étape inaugurale), ASO a renforcé la tentation des coureurs de "sacrifier" les étapes intermédiaires. Au lendemain d'Orcières, à la veille de la Lusette, qui a vraiment envie d'aller au charbon, voire au casse-pipe, pour une échappée condamnée d'avance à 99,9% ?
Au moins, l'étape de mercredi a eu le mérite de la clarté, en mode : on sait qu'il y aura un sprint, alors autant rouler groupés jusqu'à ce sprint. On ne peut pas à la fois moquer Jérôme Cousin lundi et s'énerver mercredi. On ne peut pas non plus faire semblant de croire que l'étape de Privas aurait été plus intéressante avec une échappée. Nous aurions eu droit à deux plans différents à la télé, en alternance entre échappés et peloton, mais à part cela, ça n'aurait rien changé.
"Les coureurs font la course", rappelle-t-on souvent. Ils ont aussi la possibilité de ne pas la faire quand ils jugent que "ça ne sert à rien". Et sans y voir une tendance massive, elle pourrait devenir durable. Je ne serais pas surpris de voir ce cas de figure se reproduire à l'avenir. Peut-être pas sur ce Tour, mais sur d'autres épreuves par étapes.
  • Maxime Dupuis
Christian Prudhomme et Thierry Gouvenou aiment la nouveauté. Adorent tout ce qui casse les codes et la disruption. Ce mercredi, ils ont été servis. Les deux hommes ont eu droit à une étape extrême dans sa forme. Ces 183 kilomètres entre Gap et Privas ont accouché d'une course sans la moindre échappée. Pas un coureur n'a eu envie de jouer au chat et à la souris avec le peloton. Pas envie. Pas aujourd'hui. Parce que le Tour de France est assez dur comme ça.
Ce mercredi, les coureurs ont, à leur manière, prouvé une nouvelle fois que ce sont eux qui font la course. Après, faut-il le rappeler, être resté sans courir à cause du Covid pendant le printemps, avoir commencé par un weekend niçois pluvieux puis montagneux, le peloton ne s'est pas fait prier lorsqu'il a vu cette fenêtre de répit sur sa feuille de route. Difficile d'en vouloir à quiconque.
Les engagés sur cette Grande Boucle ont dû cravacher depuis le début et savent que la suite sera encore plus difficile. Alors, quelle idée d'aller tenter sa chance dans une entreprise désespérée face aux sprinteurs et à leurs armadas ? Est-ce une tendance lourde ? Non, je ne crois pas. L'audace a de beaux jours devant elle. Mais ce mercredi 2 septembre 2020 n'était pas coché sur son calendrier.
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Le débat des RP : Les coureurs ont-ils respecté le Tour mercredi ?

Primoz Roglic doit-il éviter de prendre le maillot trop tôt ?

  • Laurent Vergne
C'est une musique bien connue sur le Tour : ne pas prendre le maillot jaune trop tôt, pour ne pas assumer le poids de la course si loin de Paris. Mardi, après sa victoire à Orcières-Merlette, Primoz Roglic avait même avoué qu'il se moquait bien de ne pas avoir réussi un coup double en prenant le pouvoir au classement général. Mais autant je suis d'accord qu'il serait inconséquent de tout faire pour endosser le maillot jaune en première semaine, autant je trouve exagéré de dire qu'il faut à tout prix éviter de le faire.
Lors de sa domination écrasante sur le Tour depuis 2012, l'équipe Sky (ou Ineos) a le plus souvent récupéré le maillot jaune très tôt. La preuve.
2018 : Thomas en jaune à la 11e étape
2017 : Thomas et Froome ont eu le maillot de la 1re à la dernière étape en dehors d'un intérim de deux jours de Fabio Aru en milieu d'épreuve
2016 : Froome en jaune à la 8e étape
2015 : Froome en jaune à la 7e étape
2013 : Froome en jaune à la 8e étape
2012 : Wiggins en jaune à la 8e étape
Quant à Vincenzo Nibali, lors de sa victoire en 2014, il avait été en jaune de la 2e à la 21e étape, à l'exception de 24 heures au profit de Tony Gallopin.
Il ne faut donc pas pousser : Roglic en jaune jeudi, ce ne serait pas une catastrophe pour Jumbo-Visma. L'armada néerlandaise a largement la capacité d'assumer ce statut. Quand on est fort, on est fort. Puis Roglic n'a jamais goûté le maillot jaune. Cette tunique, elle ne se refuse pas, ne se galvaude pas. On ne sait jamais ce qui peut arriver. Il peut aussi ne jamais la porter à vouloir trop se dérober.
  • Maxime Dupuis
Auteur d'un premier petit coup de force mardi à Orcières-Merlette, Primoz Roglic dépossédera-t-il Adam Yates de sa tunique jeudi soir au Mont Aigoual ? Possible. Serait-ce un souci, après six petites étapes que d'endosser la tunique du chassé ? Je suis assez vieille école : si on est le plus fort, il n'y a aucune raison de louvoyer et de jouer au plus malin. Si Roglic a l'occasion de prendre les commandes et de taper un petit coup sur les têtes de ses adversaires, il aurait bien tort de s'en priver. Un Tour se gagne à la pédale, évidemment. Mais dans la tronche aussi. Quand vous êtes le meilleur, pas besoin de bluffer.
De surcroît, Roglic ambitionne de gagner le Tour de France et ne se mettrait pas de pression supplémentaire avec le jaune sur le paletot. Ajoutez à cela qu'avec la Jumbo-Visma, il semble plutôt bien accompagné dans sa quête historique. Enfin, on a vu d'autres vainqueurs du Tour de France, et pas des moindres, profiter des premières occasions qui se présentaient à eux pour mettre les autres prétendants au pas et ne pas le regretter.
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Primoz Roglic.

Crédit: Getty Images

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