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Tour de France - Mark Renshaw, ex-poisson-pilote de Cavendish : "Dans 80% des cas, je savais s’il allait gagner ou pas"

Benoît Vittek

Mis à jour 12/07/2021 à 15:47 GMT+2

TOUR DE FRANCE 2021 - Poisson-pilote historique de Mark Cavendish jusqu’en 2019, l’Australien Mark Renshaw analyse le retour au sommet de celui qu’il considère comme "le meilleur sprinteur de l’histoire".

Mark Cavendish, Tour de France 2021

Crédit: Getty Images

Qu’avez-vous ressenti en voyant Mark Cavendish retrouver la victoire ?
Mark Renshaw : Je ne suis pas choqué mais je suis émerveillé. Il était au fond du trou et il est remonté tout en haut de l’échelle. Il a connu des moments très sombres avant de rebondir, mais ça montre sa détermination. Avec Mark, je n’ai jamais douté qu’il accomplirait quelque chose, donc je ne suis pas choqué de le voir revenir au premier plan, mais je n’imaginais pas qu’il pourrait retrouver son meilleur niveau. Il a été malade, puis il s’est retrouvé dans une mauvaise spirale. Et il a retourné la situation. Si quelqu’un pouvait le faire, c’était Mark Cavendish. Je pense qu’il a progressé et changé en tant que coureur ces deux dernières années.
Qu’imaginiez-vous lorsqu’il a rejoint Deceuninck-Quick Step après une année très difficile chez Bahrain ?
M.R. : Je me suis dit que c’était un beau geste de Patrick [Lefevere], de laisser Mark revenir dans l’équipe [il y avait couru de 2013 à 2015] et finir sa carrière avec des gens qui l’ont accompagné pendant toutes ces années : les soigneurs, masseurs… Il allait pouvoir finir sur une belle note. On a toujours été heureux dans cette équipe même si les circonstances nous avaient amené à partir à un moment. Je pense qu’il est heureux à nouveau et c’est un facteur majeur. Plus il est heureux, plus il est performant.
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De là à ce qu’il brille sur le Tour, il restait un gouffre…
M.R. : Je n’ai jamais pensé qu’il aurait l’opportunité de disputer le Tour de France. Avec Sam Bennett, maillot vert en 2020, c’est inenvisageable même dans vos rêves les plus fous. Mais la beauté du cyclisme, c’est qu’on ne sait jamais ce qui va se passer. Sam a eu une blessure et ça a ouvert la voie au deuxième meilleur sprinteur de l’équipe. Mais c’est Fabio Jakobsen qui avait cette place avant sa chute en Pologne qui l’a ramené au point de départ. Donc Cav a été appelé, mais en étant sélectionné, vous n’avez résolu que la moitié du problème. Il s’est préparé, il a eu sa chance, et il s’est révélé être le meilleur sprinteur du Tour de France.
Cav’ n’a peut-être plus la même accélération que lorsqu’il était jeune, mais il a gardé la vitesse
Qui est Mark Cavendish, au sein d’une équipe ?
M.R. : Il a une immense personnalité. Il a toujours été un leader. Il n’aura pas attendu le Tour de France pour montrer cette même mentalité. Il est toujours le même gars qui veut rassembler l’équipe et en tirer le meilleur. Il a d’immenses attentes envers les autres et envers lui-même. Il est toujours le premier à vouloir aider, parce qu’il a reçu tellement de soutien pendant sa carrière. Deceuninck-Quick Step court toujours en équipe et il a l’expérience pour leur dire comment faire dans les sprints. Et il apprécie énormément tous ceux qui travaillent pour lui. On voit les embrassades à l’arrivée, les câlins avec tout le monde. C’est sa façon de faire. Il est émotionnel.
Comment comparez-vous le train que vous meniez chez HTC et celui mis en place par Deceuninck ?
M.R. : Je pense que c’est très similaire. Ils ont, et de loin, la meilleure équipe pour emmener les sprints. On a traversé une période où il y avait beaucoup d’équipes en mesure de faire de très bons trains. Ça complique la tâche au moment de contrôler le final. Aujourd’hui, Deceuninck est capable d’emmener et tout le monde est bien content de suivre leurs roues. C’était comme ça aussi avec HTC. Michael Morkov est clairement une jambe au-dessus de la concurrence en ce moment. Et puis Davide Ballerini, en avant-dernier lanceur, est super fort. Pour moi, c’est celui qui se distingue dans ce Tour. Ces deux-là mettent tout en place, et ils sont les meilleurs en ce moment.
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Et Cavendish, a-t-il changé ?
M.R. : À mon avis, il n’est peut-être plus aussi rapide qu’auparavant. Mais il a la meilleure équipe et une très bonne vitesse. Il n’y a pas une fois où on l’a vu ralentir, il accélère jusqu’à la ligne. Dans certains sprints, Philipsen ou Van Aert ont pu l’approcher, mais une fois qu’ils s’écartaient et prenaient le vent, ils ne pouvaient pas aller plus loin. Ça montre que Cav’ est toujours capable de maintenir cette vitesse maximale en fin de sprint. Il n’a peut-être plus la même accélération que lorsqu’il était jeune, mais il a gardé la vitesse.
Ça répond à l’idée selon laquelle n’importe quel sprinteur gagnerait avec ce train ?
M.R. : Mettez n’importe qui dans cette position, et il sera près de la victoire, parce que Deceuninck a la meilleure équipe. Mais Cavendish a tellement d’expérience ! On a vu des moments où il perdait la roue de Morkov et parvenait à se replacer. Dans un sprint, à 500m de la ligne, il a quitté la roue de Morkov pour suivre Philipsen. Il aurait peut-être gagné en suivant Morkov mais il s’est servi de son instinct pour aller chercher la victoire. Bien sûr, d’autres sprinteurs se débrouilleraient très bien mais il a montré qu’il pouvait lire la course et gagner indépendamment.
Il faut comparer Cav à d’autres sprinteurs, parce que c’est ce qu’il fait
Il ne voulait pas parler du record d’Eddy Merckx. Vous comprenez pourquoi ?
M.R. : On compare des choses différentes. Eddy Merckx a rappelé qu’il avait gagné des contre-la-montre, le général… Cavendish a gagné 34 sprints. C’est sympa de comparer le nombre de victoires, mais on ne peut pas les comparer en tant que coureurs. Déjà, ils appartiennent à deux époques différentes. Et ils ne font pas la même chose. Finalement, il faut comparer Cav à d’autres sprinteurs, parce que c’est ce qu’il fait. Et pour moi, il restera comme le meilleur sprinteur de l’histoire.
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Cavendish et Matthews, sur le Tour 2021

Crédit: Getty Images

Si vous ne deviez retenir qu’une seule de ces 34 victoires…
M.R. : Évidemment, notre sprint le plus couronné de succès, c’est le doublé sur les Champs-Élysées, à l’issue de notre meilleur Tour de France [2009, 6 étapes pour Cavendish]. C’était juste incroyable et c’est la plus belle image qu’on peut avoir en tant que lanceur. Mais je pense qu’il y a d’autres sprints où j’ai été encore meilleur, en termes de puissance et de placement.
Quand vous le lanciez, vous saviez s’il allait gagner ?
M.R.: Dans 80% des cas, dès qu’il commençait son sprint, je savais. Il y a eu quelques fois chez Dimension Data où je n’étais pas sûr. On remontait de l’arrière parce qu’on n’avait pas une équipe aussi forte. Mais dans les premières années, à partir du moment où je le lançais, je savais.
Que peut-on attendre de lui dans cette dernière semaine du Tour de France 2021 ?
M.R. : Dimanche, à Paris, ce sera évidemment un sprint, mais il faut qu’il y soit. Samedi, c’est un contre-la-montre, et vendredi un sprint. Donc il doit surmonter les étapes de montagne de mardi, mercredi et jeudi. Vu comme il grimpe en ce moment, ça ne devrait pas être un trop gros problème s’il reste en bonne santé. Donc je le vois viser la 35e sur les Champs-Élysées, avec un sprint en forme de conte de fées. Je ne veux même pas imaginer la pression sur Michael [Morkov] dans le dernier tour de circuit !
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