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Antonio Conte, le nouveau sélectionneur de l'Italie, ne rénovera pas la Squadra à lui tout seul

Valentin Pauluzzi

Publié 20/08/2014 à 16:20 GMT+2

Valentin Pauluzzi salue la nomination d'Antonio Conte au poste de sélectionneur. Mais estime que l'ancien coach de la Juve devra être épaulé dans sa tâche.

Antonio Conte, le nouveau sélectionneur de l'Italie.

Crédit: Panoramic

L’équipe d'Italie est restée sans sélectionneur pendant pas moins de cinquante-et-un jours. Vous nous direz que ça valait le coup d'attendre vu celui qui a été désigné pour succéder à Cesare Prandelli. En effet, qui de mieux que le triple champion d'Italie en titre (avec une pluie de records à la clé) ? Il est évident que, sur le papier, la nomination d'Antonio Conte est le meilleur choix possible et ne souffre d'aucune contestation. Certes, on pourrait sortir l’éternel débat concernant les différences entre le métier d'entraîneur et de sélectionneur, mais l'Italie n'est pas en mesure de faire la difficile vu dans l'état où elle se trouve. Cependant, ce choix, aussi légitime soit-il, doit être accompagné d’une politique de rénovation sur le long terme car tout Conte qu’il est, le néo-sélectionneur italien ne pourra rien faire tout seul.

Nouveau sélectionneur, mais aussi nouveau président

Avant de choisir son nouveau sélectionneur, le football italien a élu son nouveau président de Fédération et ça ne s'est pas fait sans polémiques. La presse et l'opinion publique (cette dernière n'avait jamais suivi cette élection d’aussi près) réclamaient de la jeunesse et du changement pour tourner la page de la gérontocratie et des petits arrangements entre amis. Et bien les différentes corporations votantes (Ligues, joueurs, arbitres et entraîneurs) ont élu Carlo Tavecchio, 71 ans et dans les instances depuis quatre décennies.
Bref, la prolongation du pouvoir qui était en place. Le tout assorti d'une phrase aux relents racistes prononcée durant sa campagne et qui pourrait ne pas rester sans suite d'un point de vue disciplinaire. Précision importante, aussi condamnable soit-elle, elle ne visait absolument pas Paul Pogba, comme l'ont rapporté de nombreux collègues de façon erronée. Parole d'italianiste et de résident italien. Une "gaffe", comme la qualifie son propre auteur, qui a terni une fois de plus la réputation de ce Calcio conservateur, mais qui n'a cependant pas empêché l’élection du "gaffeur" à la tête de la FIGC. Le candidat perdant, Demetrio Albertini, 43 ans et ex-grand footballeur s'il en est, représentait une alternative d'un tout autre acabit du point de vue de l'image, mais il devra repasser dans deux ans pour opérer sa révolution. Quoi qu'il en soit, Tavecchio a démarré son opération rachat en grandes pompes en faisant signer Conte.

Le court terme plutôt que le long terme

Mettons de côté les polémiques superflues sur ses modalités de rémunération (tout Top Manager mérite salaire, c'est la loi du marché) et soulignons surtout qu'il endossera un double costume, sélectionneur et coordinateur des sélections de jeunes, poste occupé précédemment par Arrigo Sacchi. Durée du contrat ? Deux ans. Et c’est là que l'on commence à avoir des doutes concernant la vision sur le long terme.
D'autant que Conte aurait demandé à ce qu'on ne lui impose aucune contrainte, du style : donner la priorité aux plus jeunes et faire peut-être l'impasse sur l'Euro 2016. Gagnant dans l'âme, il veut la meilleure équipe possible pour la prochaine échéance. Alors, c'est éventuellement une bonne chose pour le palmarès mais cela a tout d'un "one-shot" sans lendemain, c’est-à-dire exploiter au maximum le potentiel de la génération actuelle et son réservoir de sélectionnables réduit à peau de chagrin, sans réellement investir sur les suivantes.
En outre, connaissant la nature du bonhomme qui a besoin de vivre le football quotidiennement, on imagine mal Conte rester plus de deux ans sur le banc de la Nazionale si une belle offre d'un grand club italien ou européen lui est adressée à la fin de son bail. Le coup de Trafalgar fait à la Juve nous met sur nos gardes concernant sa fiabilité, ses ambitions personnelles peuvent passer avant le projet s'il le faut. L'Italie nécessite pourtant une profonde rénovation à travers un processus décennale. L’idée serait de s’inspirer d'un Joachim Löw ou d'un Vicente Del Bosque, sélectionneurs au long cours des sélections les plus performantes de la dernière décennie. Il fut une époque pas si lointaine où la fédération italienne possédait ses propres techniciens qui exerçaient pendant longtemps en son sein. Se sont ainsi succédé Bearzot (champion du monde 1982) en poste de 1975 à 1986, Vicini avec les U21 de 1976 à 1986 puis les seniors jusqu'en 1991 (demi-finaliste de l'Euro 88 et du Mondial 90) et - après la parenthèse Sacchi - Maldini Sr adjoint de 1980 à 1986, chez les U21 pendant dix ans (avec trois titres continentaux à la clé) puis sélectionneur de 1996 à 1998, façonnant en quelque sorte la génération dorée de 2006.

Conte trop "Juventino" pour ses détracteurs et pour ses anciens disciples ?

Enfin, une provocation pour finir mais qui n'est pas si déplacée que vous le pensez. Antonio Conte est-il trop "Juventino" pour occuper ce poste ? Certes, on a vu d'autres sélectionneurs estampillés tel ou tel club passer sur le banc de la Nazionale (le "Juventino " Lippi, le "Milanista" Sacchi), mais ils étaient moins "intégristes" que le natif de Lecce. Ses succès écrasants et sa tendance à être régulièrement sur la défensive devant les médias font de lui un adversaire détesté à la manière d'un Mourinho. Difficile, dans ce contexte, d'être le sélectionneur de tout un peuple déjà miné par un esprit de clocher extrêmement présent dans la Botte.
Plus surprenant, Conte est ou était trop "Juventino" pour une bonne partie du peuple bianconero qui vit cette nouvelle aventure comme une véritable trahison. Niveau popularité, il part de très loin, mais il est habitué à parler avec les faits. A la manière de la Juve il y a trois ans, la Squadra Azzurra a aussi besoin d’un condottiere pour retrouver les sommets, son intransigeance disciplinaire et sa capacité à exhorter ses troupes et en tirer le meilleur devraient vite déboucher sur des résultats positifs (son CV parle pour lui). Ainsi, devant l’absence de réel projet, le souhait est qu’il inculque cette culture de l'exigence aux institutions italiennes afin de préparer le terrain à son successeur. Car pour la révolution tant attendue et espérée après le flop du Mondial, il faudra patienter.
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