"Il est le meilleur"

Sur les coups de 19h55, quand Pep Guardiola a décacheté son enveloppe et révélé le nom du 56e Ballon d'Or de l'histoire, on a entendu comme un murmure dans l'auditorium du Kongresshaus de Zurich. Comme si les invités, de Cristiano Ronaldo à Lothar Matthaus, en passant par Margarita Louis-Dreyfus, étaient étonnés de voir le génial Argentin se succéder à lui-même. Ils n'ont sans doute pas été les seuls. Le principal intéressé ne s'est-il pas affalé sur le plateau, comme secoué par la surprise ? Pour beaucoup et pour lui, comme il l'a reconnu après son triomphe, Xavi et Iniesta étaient les grands favoris, en raison de leur succès en Coupe du monde. Mais voilà, le Ballon d'Or version FIFA/France Football a rebattu les cartes. Et Lionel Messi est devenu le premier joueur depuis Marco van Basten (1988 et 1989) à réussir le "back-to-back". En passant complètement à côté de son Mondial.

A Barcelone, où l'on connait plutôt bien le personnage et où l'on sait ce que les termes partage, collectif ou altruisme signifient, il n'y a pas eu une voix pour s'étonner. Et encore moins pour s'offusquer du choix du collège électoral composé des sélectionneurs, capitaines des équipes nationales et journalistes du monde entier. Même Xavi, troisième du scrutin avec 16,48% des voix (quand Iniesta en a recueilli 17,36 et Messi 22,65) et prétendant "naturel" à la récompense : "C'est un footballeur extraordinaire, il le mérite amplement. Bravo à Leo", a-t-il confié juste après la cérémonie. Aucune amertume visible. Mais une forme de satisfaction, même si le Mondial n'a finalement que très peu pesé : "Ce sont des votes... C'est comme ça. Les prix individuels dans un sport collectif, c'est injuste pour moi. Mais être ici est un privilège. C'est la philosophie du Barça qui triomphe." Le talent à l'état pur également. Le meilleur joueur de l'année est aussi le meilleur joueur du monde.

Giovanni van Bronckhorst, qui a eu le privilège de côtoyer Lionel Messi quand il était encore "petit", ne dit pas le contraire. "C'est le meilleur du monde! Même si Iniesta et Xavi ont remporté le Mondial, Messi est pour moi incroyable", a lancé le Néerlandais, désormais à la retraite, dans un sourire franc. Dernier arrivé dans la maison blaugrana, David Villa n'a pas dépareillé dans le concert de louanges à destination du roi du monde. "Ce n'est pas une surprise. Même si Xavi et Andres auraient fait de beaux vainqueurs... Les trois pouvaient gagner et il faut tous les féliciter." Au fond de lui, n'aurait-il pas aimé qu'un Espagnol soit couronné ? "Oui, ç'aurait été bien que cela soit un joueur espagnol, mais Leo le mérite également."

Ce que l'attaquant barcelonais avance du bout des lèvres, Iker Casillas, capitaine des champions du monde, y fait écho un peu plus fort : "Tous les Espagnols doivent être un peu déçus. J'aurais bien aimé que Xavi ou Andres l'emporte." Avant d'ajouter : "Je dois cependant reconnaitre que Lionel Messi est, avec Cristiano Ronaldo, le meilleur joueur du monde." Le compliment sort de la bouche du capitaine du Real Madrid. C'est peut-être celui-là le plus bel hommage qu'aura reçu Messi lundi à Zürich. Là où il est entré un peu plus dans la légende. A 23 ans.