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Avant France-USA : Des étoiles américaines aussi suffisantes que brillantes ?

Loris Belin

Mis à jour 27/06/2019 à 16:50 GMT+2

COUPE DU MONDE – Adversaires des Bleues vendredi, les Etats-Unis se positionnent en grands favoris de la rencontre et de la compétition. Sûres de leur force, les Américaines fascinent autant qu'elles agacent. Les championnes du monde en titre enchaînent ainsi avec autant de facilité les prestations de haut vol sur la pelouse et les déclarations tapageuses en dehors.

L'équipe des Etats-Unis avant leur huitième de finale contre l'Espagne lors de la Coupe du monde 2019

Crédit: Getty Images

Les Françaises sont prévenues, les Américaines ne manquent pas de talent. Les tenantes du titre sont unanimement considérées comme les principales prétendantes à leur propre succession. Les 23 joueuses présentes pour le Mondial dans l'Hexagone forment une équipe digne d'une sélection All-Star. Alex Morgan, Carli Lloyd, Megan Rapinoe… les vedettes sont toutes présentes. Cette armada ne doute de rien, ni de personne. Et elle finit par s'attirer les foudres de nombreux observateurs et spectateurs pour leur supériorité un peu trop assumée, voire affichée.
Il faut bien dire qu'avec un premier match transformé en véritable boucherie et remporté 13-0 face à la Thaïlande, il y avait de quoi faire les belles et bomber le torse. Cet excès de zèle offensif a été bon pour le spectacle, un peu moins pour la cote de popularité des Stars and Stripes. La deuxième période conclue avec dix buts a parfois été perçue comme une correction irrespectueuse et a particulièrement fait jaser. L'équipe américaine s'en défend, la Thaïlande comprend, la bulle Twitter dégonfle en un rien de temps, fin de l'histoire ? Ce n'en est en fait que le début.

Grand talent et grandes gueules

Car quand cette Team USA est forte, elle le sait et l'assume ouvertement. Dès son deuxième match contre le Chili, la sélectionneure Jill Ellis ose faire tourner son effectif, une rareté aussi tôt dans une compétition internationale. Résultat, une victoire 3-0 et une confiance au beau fixe. En conférence de presse, la défenseure Ali Krieger se lâche. "Les Etats-Unis sont la meilleure et la deuxième meilleure équipe du monde" assène-t-elle. La polémique couvait, la voilà définitivement lancée. "A chaque poste, nous avons plusieurs joueuses qui peuvent faire le boulot. Je pense que chacune d'entre nous est capable de jouer et d'être titulaire. Je ne sais pas si je pourrais en dire autant de nos précédentes équipes."
La belle assurance vire pour certains à une forme de prétention beaucoup moins acceptée. Il est pourtant vrai que la profondeur de l'effectif américain est sans égal dans le football féminin. Même les plus sérieux outsiders ne peuvent compter sur autant de joueuses de très haut niveau et ne peuvent pas se permettre de placer sur son banc une légende comme Lloyd (278 sélections !) ou une joueuse comme l'ancienne Parisienne Lindsey Horan, double MVP sortante du championnat nord-américain. Tout n'est finalement qu'une question de perception. Après tout, dans un pays qui a fait du "self-made man" un modèle sociétal, pourquoi la confiance - une des composantes essentielles de ce mythe - devrait gêner lorsqu'il concerne une femme ?
On a toujours une cible dans le dos mais qui n'en voudrait pas ?"
Ce trait de personnalité Yankee a transformé les vedettes américaines, ambassadrices rêvées d'un football féminin en plein boom en grandes méchantes détestables aux yeux d'une partie des suiveurs. Entre prendre à bras le corps l'étiquette de favorites et faire preuve de suffisance, la ligne peut parfois être ténue. Qu'importe, les championnes du monde ne changeront pas ce qu'elles sont. Elles en tirent même une forme de fierté. "Les gens aiment à détester les équipes les plus accomplies, a ironisé Carli Lloyd après leur large succès contre la Thaïlande face à la presse. Tout le monde déteste les Patriots (NFL). J'ai toujours soutenu les Eagles, mais vous êtes obligé de respecter ce que les Patriots ont fait. Ce que les Warriors (NBA) ont fait. J'ai beaucoup d'admiration pour Steve Kerr et tous ses joueurs. Car je sais à quel point il est difficile de rester au sommet une fois qu'on l'a atteint. On sait qu'on a toujours une cible dans le dos. Mais qui n'en voudrait pas ?"
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Carli Lloyd of the USA celebrates with teammates after scoring her team's third goal during the 2019 FIFA Women's World Cup France group F match between USA and Chile at Parc des Princes on June 16, 2019 in Paris, France.

Crédit: Getty Images

Les Américaines se défendent ainsi de vouloir manquer de respect à qui que ce soit et imputent leur soif de dominer leurs adversaires par une envie toute aussi irrésistible d'être les meilleures, tout simplement. Avec leurs trois titres de championnes du monde, c'est aussi le poids de l'histoire qu'elles portent sur les épaules. "Cette équipe a toujours connu beaucoup de pression, car c'est dans son ADN de gagner, confirme Alex Morgan. On est très exigeantes envers nous-mêmes et les gens le sont avec nous aussi." Rien de plus logique en somme pour la Team USA. Leur coach est d'ailleurs totalement de cet avis. Jill Ellis, comme ses joueuses, attend le défi français avec une grande impatience et ce ton qui fait parfois tant grincer des dents. "Ces grands matches ont plus de signification, il y a plus en jeu et c'est pour cela que vous faites ce métier. Vous ne vous lancez pas dans le sport pro ou comme entraîneur, si vous ne le faites pas dans ce but et pour ces raisons."

La jurisprudence espagnole

Cette équipe qui polarise à ce point les avis ne serait finalement que la conséquence d'une ambition forte et de quelques langues bien pendues. Homosexuelle revendiquée, anti-Trump déclarée, Megan Rapinoe est certainement la plus identifiée d'entre elles. Alors quand on demande à la fantasque milieu de terrain son avis sur son quart de finale à venir, c'est avec cette même verve tantôt polémique qu'elle régale de ses bons mots. "J'espère que ce sera grand et fou, c'est ce que cela doit être. C'est le meilleur match, c'est ce que tout le monde voulait. J'espère simplement que ce sera un cirque total, une vraie dinguerie ("a shitshow circus" en version originale). Cela va être absolument génial."
Cette passion débordante et ces grandes gueules ne laissent en tout cas pas insensibles, au risque d'en payer le prix fort. Car à brandir aussi fermement leur ambition comme un étendard, elles se savent encore plus attendues et moins autorisées à l'échec. Elles en ont d'ailleurs été quitte pour une belle frayeur et quelques critiques en huitièmes de finale contre une Espagne accrocheuse (2-1). Si l'ancienne star de la sélection Hope Solo a expliqué pour le Bleacher Report que selon elle, "nous n'avons pas encore vu le meilleur de cette équipe", c'est aussi parce que certaines joueuses "doivent hausser leur niveau de jeu". Le problème pour les Américaines est que si elles peuvent bien compter sur onze joueuses de grand talent, il ne suffit que d'un petit but pour faire basculer un match. Et passer ainsi de la postérité au ridicule.
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