Pourquoi il faut relativiser la fatigue des Croates avant la finale contre la France

En Russie, la Croatie est la seule équipe à avoir disputé un seizième de finale. Ou, du moins, un équivalent. L’équipe au damier a disputé, en phase à élimination directe, trois prolongations contre le Danemark (1-1, 4-3 TAB), la Russie (2-2, 6-5 TAB) et l’Angleterre (2-1 a.p.). Soit 90 minutes supplémentaires par rapport à l’équipe de France, son adversaire en finale dimanche. Pour autant, difficile d’imaginer les Croates handicapés par la fatigue. Le temps de jeu des coéquipiers de Luka Modric dans la compétition n’est en effet pas si éloigné de celui des Bleus.

Certes, les Valtreni ont globalement plus joué que les Tricolores. Au total, les Croates ont joué chacun 315 minutes en moyenne dans ce Mondial. C’est 57 minutes de plus que la moyenne de l’équipe de France, qui culmine à 258 minutes par joueur. Huit joueurs de l’équipe de Zlatko Dalic ont dépassé les 500 minutes de jeu en Russie (Modric, Lovren, Rakitic, Perisic, Vida, Subasic, Mandzukic, Vrsaljko). Celle de Deschamps n’en compte que trois avec Varane, Kanté et Hernandez.

Suffisant pour penser, comme Frédéric Antonetti, que les Bleus auront "un avantage". "Oui, il y aura de la fatigue, qu’elle soit physique ou psychologique, pense l’actuel entraîneur du FC Metz. Cela ne fera pas nécessairement la différence, mais les Français auront un avantage. Après, la victoire gomme beaucoup de choses. Et d’autres paramètres peuvent entrer en ligne de compte : le match peut se jouer dans les 60 premières minutes, Luka Modric peut faire une partie exceptionnelle…"

À bien regarder les chiffres, les écarts ne sont pourtant pas si importants entre les deux équipes. Les Bleus ayant le plus joué pendant cette Coupe du monde, à savoir Raphaël Varane et N’Golo Kanté, comptent tous les deux 540 minutes de jeu. Seuls six Croates ont égalé ou dépassé ce total. En tête, Modric est loin devant avec ses 604 minutes de jeu. Le milieu du Real Madrid est d’ailleurs sorti épuisé, contre l’Angleterre en demi-finale. Mais derrière, les chiffres sont proches. Lovren compte 561 minutes de jeu, Rakitic 548, et Perisic 542.

Cela s’explique notamment par une rotation plus importante, du côté de l’équipe au damier. Les Bleus ont fait tourner lors du troisième match contre le Danemark ? Les Croates également, dans des proportions encore plus importantes. Au total, les remplaçants rouges et blancs ont plus joué que leurs homologues vêtus de bleu. Le remplaçant le plus utilisé côté français (outre cas particulier de Matuidi, d’abord sur le banc, puis suspendu), à savoir Corentin Tolisso, compte 177 minutes de jeu. C’est moins que Josip Pivaric (200 minutes) ou Mateo Kovacic (183 minutes), notamment. En moyenne, les remplaçants bleus ont joué 75 minutes, quand leurs équivalents croates ont passé 116 minutes sur le pré.

Pour chercher une réelle différence, mieux vaut fouiller du côté des kilomètres parcourus. Dans ce domaine, la Croatie est loin devant. Les joueurs de Zlatko Dalic ont, au total, couru 723 kilomètres, dont 414 lors des seuls matches à élimination directe, selon les chiffres de la FIFA. C’est 116 kilomètres de plus que les Bleus, sur l’ensemble de la compétition. Pour autant, le sélectionneur croate n’en fait pas une excuse : "C'est très dur, les joueurs ont fait énormément d'efforts, mais on dirait que plus les circonstances deviennent dures, mieux on joue. (...) Je suis sûr qu'on va récupérer à temps. Il ne peut pas y avoir d'excuse. C'est une finale de Coupe du monde."

Les Bleus non plus n’en font pas une montagne, Blaise Matuidi le premier. "Ils ont fini en trombe face aux Anglais, on avait l'impression qu'ils jouaient leur premier match, a dit le milieu français en conférence de presse vendredi. La Croatie va répondre présent, c'est une finale de la Coupe du monde. (...) Je ne pense pas que [la fatigue] sera un handicap pour eux." Jeudi, Kylian Mbappé, dans une vidéo diffusée sur Twitter par la FFF, disait déjà la même chose : "Quand tu joues une finale, la fatigue, tu en fais abstraction." Que la Coupe du monde ait été un sprint ou marathon, la bataille sera de toute façon âpre dimanche, à quelques encablures de la ligne d’arrivée.