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Coupe du monde - Pablo Aimar en pleurs, Lionel Messi en transe : l'Argentine est-elle trop émotive ?

Cyril Morin

Mis à jour 30/11/2022 à 17:07 GMT+1

COUPE DU MONDE 2022 - Après avoir vu le gouffre de près face au Mexique (2-0), l'Argentine remet ça ce mercredi face à la Pologne pour un match décisif en vue de sa qualification (20h). Tout un pays a repris espoir grâce aux éclairs de Lionel Messi. Avant cela, l'Albiceleste a semblé paralysée. Après ça, elle fut submergée d'émotions. Un problème pour la suite ?

Pourquoi l'Argentine serait l'adversaire idéal pour les Bleus

Le mot a fleuri dans tous les titres de la presse argentine dimanche : "Desahogo", à savoir "soulagement". Un terme quasi-clinique pour cette Albiceleste : sa victoire face au Mexique (2-0) eut des allures de médicaments : elle fit disparaître simultanément les maux de crâne et les maux de ventre de 45 millions de personnes aux symptômes similaires. La défaite inaugurale face à l'Arabie Saoudite avait alourdi l'ambiance autour de cette troupe, emmenée par son général Lionel Messi.
La libération n'en fut que plus belle : le but du génial argentin fut un tsunami d'émotions dans tout le pays mais également sur la pelouse du stade de Lusail. Lui, le si placide Messi, celui dont l'Argentine regrettait parfois son côté effacé et sa discrétion naturelle, a exulté comme rarement. Habité, le numéro 10 a célébré de longues minutes face à son public, dans une transe collective réjouissante pour tout amateur de football.
Ce surplus d'émotions a même complètement fait perdre ses moyens à Pablo Aimar, l'entraîneur adjoint argentin. Lui, l'idole de Messi, a fondu en larmes sur le banc, incapables d'aligner trois mots pour répondre aux questions coaching de Lionel Scaloni dans un moment pourtant décisif. Le même Scaloni qui avait les yeux embués après le but d'Enzo Fernandes. Sans doute parce que le chemin emprunté pour arriver à ce résultat fut sinueux et l'atmosphère longtemps irrespirable.
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Angel Di Maria presque en larmes après le but de Messi face au Mexique

Crédit: Getty Images

Trouille au ventre et jambes qui tremblent

C'est avec la trouille au ventre que les Argentins ont débuté ce duel face au Mexique. La peur au ventre et donc les guiboles qui tremblent. Dos au mur, ils ont semblé paralysés par l'enjeu, comme ce fut déjà le cas en 2018, dans une phase de poules plus que poussive. Messi, déjà, les avait sortis d'un mauvais pas. Mais, en quatre ans, le maillot n'est pas devenu beaucoup plus léger.
Scaloni l'expliquait très bien juste avant le match face à la Tri : "C'est normal d'être nerveux au moment de débuter en Coupe du monde, c'est logique, avançait-il. Et l'Argentine est différente de beaucoup de sélections. Sans manquer de respect à personne, ce n'est pas la même chose de débuter en Coupe du monde avec le maillot de l'Argentine qu'avec un autre."
Cette pression fut au cœur de la période post-Arabie Saoudite et pré-Mexique. "A partir de maintenant, on va pouvoir un peu profiter du Mondial parce qu'on ne l'a pas fait sur les trois derniers jours, a reconnu Rodrigo de Paul dimanche au camp de base argentin. On s'est retourné le crâne mais on a essayé de se réveiller entre nous".
Plus que médiatique, cette nervosité est aussi populaire. C'est Dibu Martinez qui l'expliquait très bien après le soulagement mexicain, évoquant l'importance de l'accompagnement mental dans un pays qui détient le record du monde de psychologues par habitant. "J'ai beaucoup souffert ces derniers jours, reconnaissait le portier argentin. J'ai parlé avec mon psychologue parce que l'Arabie Saoudite n'avait frappé que deux fois et qu'ils m'ont mis deux buts. J'ai 45 millions d'Argentins derrière moi et je devais faire mieux".
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Un supporter argentin en larmes à Lusail lors du match face au Mexique

Crédit: Getty Images

Messi, la peur de tout un pays

Personne n'a osé l'avouer mais s'ils sont des millions derrière cette sélection, c'est un sort unique qui concerne tout le monde au pays. En Argentine, le sauveur est aussi la source principale d'angoisse. Parce que quitter ce Mondial sur un échec reviendrait à entériner un fait considéré comme une injustice au pays : Messi finirait sa carrière sans Coupe du monde. La psyché populaire ne s'arrête pas aux portes d'un vestiaire qui voue une fascination sans faille à la Pulga.
Il suffit de relire le long post Facebook du jeune Enzo Fernandes, alors 15 ans, après la première retraite internationale de Messi en 2016. Le gamin d'alors implorait celui qui est aujourd’hui son capitaine de revenir sur sa décision : "Comment allons-nous te convaincre alors que nous ne sommes que de simples mortels ? Comment allons-nous te convaincre alors que nous n'avons eu à supporter qu'1% de la pression que tu as sur tes épaules, quand tu te lèves le matin, que tu regardes le miroir et que tu sais que plus de 40 millions de gens demandent non pas que tu fasses les choses parfaitement mais exigent que ce soit le cas […] Te voir avec le maillot albiceleste est la plus grande fierté au monde". Dans ces conditions, difficile d'avoir la tête froide quand les choses se corsent, même si le jeune milieu a parfaitement su épauler son idole.
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Enzo Fernandez après son but contre le Mexique - Coupe du monde 2022

Crédit: Getty Images

Les matches couperets, il n'y aura plus que ça…

Il n'est d'ailleurs pas le seul. Au fond, Messi dépasse le simple cas argentin, comme le soulignait Marquinhos dimanche. "Messi comme Ronaldo vont plus loin que simplement l'Argentine ou le Portugal. Ce sont des bénédictions pour le football, pour les gens qui aiment ce sport, ces tournois, ces compétitions. Ce sont deux trésors et ils n'appartiennent plus uniquement à leur pays", expliquait le défenseur du PSG. Alors, forcément, ça pèse dans les têtes.
Interrogé en fin de match, Messi confirmait que cet impératif de résultats, pour son équipe mais aussi pour lui, avait été source "d'anxiété" : "On était obligés de gagner, c'est forcément difficile dans ces conditions". Le souci, c'est que ces conditions de quitte ou double vont se répéter inlassablement, dès mercredi face à la Pologne puis à chaque tour si l'Argentine intègre le cercle des qualifiés en 8es. Un vrai souci pour un prétendant auto-déclaré au sacre final.
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Et si c'était la Coupe du monde des surprises ?

En conférence de presse, De Paul a tenté de surfer sur la libération pour créer une vague d'optimisme au pays, plus facile à supporter plutôt qu'une angoisse collective. "A ceux qui, en une demi-heure, ont oublié les trois années et demie passées, on vous invite à monter à nouveau dans le bateau", a souri le milieu de l'Atlético. Certains de ses coéquipiers présents en Russie et victimes de la folie de Kazan pourront lui confirmer : les miraculés ont souvent des bonnes gueules de champion du monde.
C'est finalement Scaloni, le discret submergé par l'émotion samedi, qui résumait la balance que devront trouver les siens. "Il faudrait savoir raison garder, c'est juste un match de football, expliquait-il en prenant l'exemple de son frère qui lui avait envoyé un message pour lui expliquer qu'il avait dû arrêter le visionnage du match pour aller pleurer. Je ne dis pas que ce n'est rien de plus qu'un match de foot. Mais il faut qu'on corrige ça. Après, c'est compliqué de faire comprendre aux gens que le soleil se lèvera quand même demain que la sélection ait perdu ou non. Le plus important, c'est de savoir si on a fait le maximum, comme c'est notre cas actuellement".
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Lionel Messi, buteur et sauveur de l'Argentine face au Mexique

Crédit: Getty Images

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